Allumez de l’encens, enfilez vos écouteurs, installez-vous confortablement et lancez la lecture. Pendant les 50 prochaines minutes, laissez le projet prog Ruins of Azur, basé à Montréal, vous tenir la main dans une fugue rétro prospective de la vie humaine à l’ère moderne reflétée dans un miroir noir.
Le fait marquant de cet album éponyme est la beauté du son qu’il génère. L’instrumentation passe sans transition d’une cavalcade de styles musicaux habilement exécutés : du psychédélique à la bossa nova, du funk aux marches militaires, du jazz à la downtempo-pop et au rap. Ce flux changeant de sons, de tempos et d’intensité entre et au sein des morceaux reflète les pics et les vallées de la modernité, tant sur le plan humain que du sociétal.
Nous entendons les verts des paysages, les beiges des palais luxuriants, les néons séduisants des paysages nocturnes glamour des villes, et les péchés qui les sous-tendent tous : le colonialisme, la violence et la poursuite de l’exploitation. Mais ce n’est que la moitié de l’histoire ; l’autre moitié est celle de l’innocence, de la tristesse, de la nostalgie, de la persévérance et de toutes les émotions humaines dont Ruins of Azur veut que nous nous souvenions pour rester éternellement en contraste avec ce moment historique. En flottant dans cet éther, nous ressentons ce que signifie être un sujet dans cet environnement ainsi qu’un agent libre.
Le miroir est peut-être noir, mais son reflet brille de mille feux. Fruit du travail éclectique de musiciens de rock et de jazz confirmés, Emmanuel Eustache au clavier et au chant, Hugo Leclerc aux vents, Olivier Guertin à la batterie, Marc-Gabriel Laverrière à la guitare et Philip Saucier à la basse, Ruins of Azur apporte l’éventail et les compétences techniques nécessaires à la composition d’un excellent morceau de rock progressif.