Pays : Canada (Québec) Label : Folivora Genres et styles : expérimental / post-minimaliste / post-rock / shoegaze Année : 2023

Milanku – À l’aube

· par Louise Jaunet

“Lorsque les choses se passent trop vite, on ne peut être sûr de rien, de nulle chose, et encore moins de soi-même.” Milan Kundera, La Lenteur

La colère ne s’estompe pas, c’est extrême ce qui se passe. Sur le long terme, les larmes des cortèges vont accumuler un immense chaos qui risque de faire mal. Face à une catastrophe qui plaide sa cause d’une voix assurée, leurs silences craignent la mort, tandis que les oiseaux charognards se tiennent près des cadavres. Le monde doit continuer à se réunir pour chaque rituel et cérémonie, même lorsque nous aurons presque disparu. L’objectif sera de survivre lorsqu’il sera tout simplement trop tard. 

Inspiré par Godspeed You! Black Emperor, Neurosis, Envy et par les textes de l’écrivain tchèque naturalisé français Milan Kundera, ce cinquième album “À l’aube” du groupe montréalais Milanku s’appuie sur les arrangements dépouillés typiques du post-rock, ainsi que sur une présence vocale ambitieuse, défiante, criante et influencée par le quotidien de chacun de ses membres (François Lemieux à la guitare, au synthétiseur, piano, wurlitzer et à la voix, Carl Ruest à la guitare et à la voix, Guillaume Chamberland à la basse et à la voix, Guillaume Boudreau-Monty à la batterie et Jean-François Bourbonnais à la guitare).

Conçue par François Lemieux, l’élégante couverture de cet épilogue illustre le sentiment de légèreté que cet album poignant et intense peut paradoxalement procurer intérieurement dès la première écoute. Plongés dans une réalité où tout va très vite, nous sentons notre impuissance face à la dictature qui nous pousse à suivre le rythme effréné de l’évolution technologique. Prêchant la mauvaise nouvelle, un outrage à la morale publique nous oblige à dire quelque chose qu’il ne fallait pas et nous exclut de la ronde de la grande tristesse : ce n’est vraiment pas un accident, c’est un crime. Où commence et où finit cette maladie du cœur ? 

Hypnotisées par la rage d’un.e guerrier.ère écorché.e par ses propres désillusions, les paroles sont inspirées par les émotions collectives de désespoir et de solitude engendrées par la pandémie et mettent en scène un personnage brutal, empreint de mélancolie, voire de dystopie, qui tente de se tenir droit sur un fil face aux obstacles. À L’aube; nous sommes disparus se transforme lentement en cyclone, tandis que la voix de la chanteuse pop jazz Erika Angell résonne comme celle d’une grande prêtresse face à une tempête à laquelle tout le monde essaie d’échapper. Les faux espoirs sournois, La Chute, La Nausée, l’illumination du bourgeonnement universel sur le banc d’un jardin public, une Hypomanie, Le labyrinthe, Le mouvement du non-vivant, les Fragments de néant, l’aube – l’ensemble se retrouve caché dans À l’aube. Une porte se referme au pied du courant. Notre responsabilité sera de suivre les nuages en route sur le chemin d’une clé qui ouvrira à nouveau cette même porte : le vide en reconstruction. À l’aube infinie d’une grande force, la colère ne s’estompera pas. Le deuil frappe bien le talon d’Achille de la machine infernale.

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