Jean-Philippe Sylvestre, lorsque virtuosité rime avec accessibilité

Entrevue réalisée par Alain Brunet
Genres et styles : classique / période moderne / post-romantique

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Après un concert concluant à la Philharmonie de Berlin, le pianiste Jean-Philippe Sylvestre donne deux récitals consécutifs au Québec, soit  ce samedi 22 octobre à la Maison Symphonique de Montréal et le 11 novembre prochain au Palais Montcalm de Québec. 

Le soliste originaire de Montérégie compte ainsi présenter un programme « d’une grande profondeur musicale et d’une grande virtuosité » et «  souhaite communiquer un message très profond et rempli d’émotions qui vous transportera dans une autre dimension transcendante et méditative », pour reprendre les propos  très motivés du principal intéressé.

Bardé de prix canadiens et québécois, sans compter celui du Concours international Concertino Praga, Jean-Philippe Sylvestre mène une carrière amorcée à la fin des années 2000 – soit lorsqu’il rafla le fameux Prix Virginia Parker remis par le Conseil des Arts du Canada.

Comme les pianistes québécois Marc-André Hamelin, Louis Lortie, Bruce Liu, Charles Richard Hamelin, Alain Lefèvre et autres David Jalbert, Jean-Philippe Sylvestre est un soliste invité régulièrement en Europe où il a vécu quelques années  – plus précisément en Italie, à Berlin et à Paris où il a passé 5 ans avant de rentrer à Montréal il y a un an « pour l’instant », dans un contexte de pandémie.

Jean-Philippe Sylvestre s’est produit notamment sur les scènes de la Philharmonie de Berlin,  du  Concertgebouw (Amsterdam), de Musikverein (Vienne), de la Salle Gaveau (Paris), du Palais des Beaux-Arts (Bruxelles), du Teatro Mayor (Colombie), du Theatro Municipal et Teatro B32, (Brésil), du Recital Hall (Sydney), de la Maison Symphonique, de la Salle Wilfrid-Pelletier et  de la Salle Bourgie (Montréal),  du Glenn Gould Studio et  du George Weston Hall (Toronto), du Centre national des arts (Ottawa).

Le virtuose vient tout juste d’enregistrer un concerto pour piano avec le London Symphony Orchestra, une composition du Montréalais Airat Ichmouratov à laquelle il a pris part au processus créatif. L’album sera rendu public dans quelques mois.

Dans le cas qui nous occupe, un programme très accessible sera ainsi suggéré au public de Jean-Philippe Sylvestre, programme autour duquel il a choisi la version pour piano seul du fameux Concerto d’André Mathieu, remis de l’avant par l’interprète à l’instar d’Alain Lefèvre comme on le sait.

PAN M 360 :  Comment votre programme a-t-il été conçu?

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Le programme a été fait pour pour vulgariser. La moitié du programme est composée d’œuvres très connues. On peut même entendre la Rhapsodie hongroise de Liszt dans Bugs Bunny et les Looney Tunes! La Sonate au clair de lune de Beethoven, Pavane pour une infante défunte de Ravel, ce sont des pièces très connues. Et pour l’autre moitié du programme, ce sont des œuvres peut-être un peu moins connues que je découvre, qui me passionnent et que je veux faire découvrir au public. 

PAN M 360 :  Vous avez choisi une part importante de pièces évidentes qui font partie de l’imaginaire collectif. Trucs hyper-évidents. Par exemple , la Sonate au clair de lune , soit la 14. Il y a sûrement une raison à cela!

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Les sonates de Beethoven me parlent toutes, mais la 14 est la plus connue. Et je fais exprès de la choisir car il est important pour moi que mon public ait un repère, je pense que c’est agréable pour le public d’avoir un repère. La musique s’adresse à tout le monde, c’est puissant et précieux. Alors il importe que celles et ceux qui viennent pour la première fois à un tel concert ne se sentent pas perdus, et c’est bien qu’il puisse reconnaître une pièce comme la Sonate au clair de lune.

PAN M 360 : Néanmoins, vous réservez à votre auditoire des éléments de découverte.

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Oui. Le Prélude et fugue no.4 de Bach est une œuvre peu connue. Miroirs de Ravel est mois connue. Et Islamey, op. 18 de Mili Balakirev, encore moins! Je la joue parce qu’elle est perçue comme l’œuvre classique la plus difficile jamais écrite pour le piano. J’adore cette pièce pleine d’énergie et de passion, c’est du beau romantisme et je suis heureux de la partager avec le public.

PAN M 360 : Au centre du programme se trouve la version piano seul du Concerto de Québec, d’André Mathieu dont vous êtes désormais un interprète fervent.

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Le Concerto de Mathieu, c’est encore un honneur pour moi de le jouer au cœur de chez moi à Montréal, à la Maison symphonique. André Mathieu avait lui-même prévu cette version pour piano, et j’aime dire que je l’ai « engraissée ». J’ai ajouté plus de matière dans son deuxième mouvement. 

PAN M 360 : Ce n’est pas la première fois qu’on « engraisse » les partitions d’André Mathieu.  Jacques Marchand en avait retravaillé la partition pour orchestre, joué par Alain Lefèvre. Vous le faites à votre tour pour la version piano solo. Pourquoi?

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Il faut se souvenir qu’André Mathieu improvisait. On n’est même pas sûr que c’est lui qui a écrit les partitions pour sa version piano. Lorsqu’on écoute les rares enregistrements d’archives joués par lui-même, les versions sont toutes différentes ! Horowitz faisait de même à l’époque, ajoutant des basses, des octaves, des quintes, etc. Alors une raison de plus de changer un peu la version du Concerto de Québec avec un petit côté improvisation. Alors moi je m’arrange pour jouer ce que le compositeur voulait.

PAN M 360 : Pouvez-vous nous donner des exemples de vos modifications?

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Prenons le 2e mouvement qu’on connaît bien. Pour orchestre, ce mouvement durait 10 minutes, et André Mathieu l’avait raccourci à 5 minutes pour la version piano, alors que la mienne fait environ 8 minutes. Je n’ai rien changé du texte d’origine mais j’ai ajouté d’autres matériaux au mouvement Vu que j’aime beaucoup improviser, je peux ajouter une quinte, une dixième dans un accord, je vais jouer un octave plus haut ou plus bas, je peux rajouter une mesure d’un motif rythmique. On entend la même œuvre mais elle est enrichie par des ornementations, couleurs, notes, agréments spontanés.

PAN M 360 : Il ne s’agit donc pas de nouvelles variations.

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Non, ce sont des agréments, je dois être très clair là-dessus. Ce n’est pas ma composition et je veux rendre justice à André Mathieu et son Concerto de Québec.

PAN M 360 : Et vous respectez aussi l’esprit aussi improvisateur d’André Mathieu.

JEAN-PHILIPPE SYLVESTRE : Voilà ! Je veux lui rendre hommage de cette manière parce que lui-même était ainsi.

 Les récitals du pianiste Jean-Philippe Sylvestre seront donnés :

• À la Maison Symphonique à Montréal
Samedi 22 octobre 2022, à 19h30
Billetterie : Place des Arts

• Au Palais Montcalm (Salle Raoul-Jobin) à Québec
Vendredi 11 novembre 2022, à 19h30
. Infos et billets Palais Montcalm ICI

Programme : 
 Rhapsodie hongroiseno. 2 de Franz Liszt
Miroirs et Pavane pour une infante défunte de Maurice Ravel
Concerto de Québec d’André Mathieu
Sonate pour piano no. 14 en do dièse mineur op. 27 no. 2 « Clair de lune » de Ludwig van Beethoven
Prélude et Fugue no. 4 en do dièse mineur BWV 873 de Jean-Sébastien Bach
Islamey, op. 18 de Mili Balakirev

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