Bons Times Bad Times, dans le journal intime de Miro Chino

Entrevue réalisée par Jacob Langlois-Pelletier
Genres et styles : hip-hop / indie pop / rap keb

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Vous aimez le rap keb et êtes à la recherche de quelque chose de différent? Ne cherchez pas plus loin! Au début du mois d’octobre, Miro Chino a fait paraître Bons Times Bad Times, son premier album et véritable récit de son quotidien. 

De bons textes, des refrains accrocheurs et un heureux mélange de hip-hop, de jazz et de soul en guise de trame sonore. Voilà ce qu’il propose dans ce projet qui transpire la vie montréalaise.

Voici notre discussion avec l’artiste de 23 ans. 

Même s’il ne se qualifie pas de rappeur, Miro Chino démontre d’excellentes qualités rythmiques. En collaboration avec le réalisateur Philippe Brault et plusieurs musiciens, le Québécois a combiné à merveille l’électronique et l’organique. La présence de différents instruments comme la guitare, les cuivres et la batterie donne un résultat orchestral et cohérent.

Dans ce premier ouvrage, Miro parle de sa vie, de ses bons et mauvais coups. À chaque écoute, on entend un nouveau détail dans la production et on esquisse un sourire de plus en comprenant l’une de ses multiples métaphores. Avec Bons Times Bad Times, les auditeurs sautent à pieds joints dans son univers, et prêt à parier qu’ils souhaiteront y rester.

PAN M 360 : Bonjour Miro, parlez-moi un peu de vous! D’où provient votre passion pour la musique?

MIRO CHINO : Miro, c’est mon vrai nom. Miro Chino, c’est mon nom d’artiste. J’ai grandi à Montréal. Mes parents ont beaucoup déménagé et moi aussi. Disons que j’ai vécu à plusieurs endroits différents à Montréal. Je fais de la musique depuis le secondaire. Comment dire? 

Je n’ai jamais eu de formation musicale, j’ai presque tout appris sur le tas ou avec des tutoriels sur YouTube. J’ai commencé avec le rock parce que je trippais pas mal sur les Rollings Stones, Led Zeppelin et compagnie. Au fil du temps, j’ai expérimenté plusieurs styles comme le folk. Et puis il y a deux ans, je suis allé à l’école de production Musitechnic. Là-bas, j’ai découvert la production électronique, et c’est à ce moment que j’ai commencé à faire du rap.

C’est comme ça que je me suis rendu compte de la puissance du rap. J’aimais que ça soit rapide et que je puisse dire plusieurs choses en une phrase. Ce que j’ai le plus, c’est l’écriture. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai commencé dans le rap. Mais je ne pense pas qu’on puisse me qualifier de rappeur. Je me considère comme un artiste polyvalent qui intègre du rap à son art. Je n’ai pas l’attitude d’un king. 

PAN M 360 :  Vous dites que l’essence de votre musique n’est pas nécessairement reliée au monde du rap, c’est bien cela?

MIRO CHINO : C’est vraiment ça. Dans ma musique, je suis éclectique, je touche vraiment plein de styles. J’adore le rap et j’en consomme beaucoup, mais je ne me considère pas comme étant dans le rap game. Dans la vie, je suis une personne assez diversifiée. Je me tiens avec toutes sortes de monde et j’ai une panoplie de passe-temps différents. Je pense que ça transparaît dans ma musique, je n’ai pas vraiment de style défini. 

PAN M 360 : Depuis combien de temps créez-vous?

MIRO CHINO : J’ai 23 ans et j’ai commencé en 2014 ou 2015, ça fait environ 8 ans. 

PAN M 360 : Comment avez-vous changé depuis votre participation en finale au Festival de la chanson de Granby en 2022?

MIRO CHINO : Ce festival a été un bon tremplin pour moi et il m’a permis de me faire connaître. C’était la première fois que j’avais autant de moyens pour produire un spectacle. J’avais des gens autour de moi pour me conseiller et un band. C’était une expérience très formatrice. Il faut dire qu’à ce moment-là, j’étais vraiment un bébé en tant qu’artiste. J’étais très candide et naïf. Depuis ce temps, j’ai acquis davantage de maturité artistique et je sais plus où je m’en vais. Mon style est plus clair.

PAN M 360 : Vous dites que « vous savez où vous allez maintenant ». Vers où allez-vous exactement? Comment décririez-vous votre son en ce moment?

MIRO CHINO : Pour Bons Times Bad Times, je dirais que c’est avant tout un album hip-hop. Il y a des sonorités hip-hop, mais c’est un peu orchestral. Avec le réalisateur Philippe Brault, j’ai été capable de créer quelque chose de cinématique. C’est comme ça que je le décrirais. 

PAN M 360 : Parlons de votre récent projet Bons Times Bad Times. Que raconte-t-il?

MIRO CHINO : C’est vraiment un recueil d’histoires. C’est plein de petites nouvelles qui forment un journal intime sur ma vie des dernières années. C’est assez rétrospectif et introspectif, c’est une sorte de bilan de mes bons et moins bons coups. C’est pour cela que ça s’appelle Bons Times Bad Times. J’ai essayé d’aller chercher le plus possible cette dualité dans mes chansons. Dans l’album, il y a une certaine progression, ça part de léger à plus sombre.

PAN M 360 : Quelle impression voulez-vous laisser avec ce projet?

MIRO CHINO : Avec l’album, je veux passer un message d’acceptation et d’ouverture à la vulnérabilité. Je trouve que le rap est un médium très puissant pour passer un message. Dans cet album, je m’assume, je me mets en valeur et je m’accepte comme je suis. Je me montre vulnérable, mais de manière positive. Mon message c’est que nous sommes tous imparfaits, nous avons tous nos défauts, mais c’est ça qui nous rend beaux et on doit s’accepter. Les humains sont complexes, on n’est pas toujours bons ou mauvais et il faut entretenir un équilibre dans nos vies.

PAN M 360 : On retrouve une personne divisée en deux couleurs sur la pochette de l’album. Qu’est-ce que cela représente?

MIRO CHINO : J’ai demandé à une de mes amies qui s’appelle Sarah Leblanc de s’occuper de la pochette. Je lui ai demandé de créer un personnage qui représente le principe de Bons Times Bad Times, et voilà le résultat. Pour moi, la partie en bleu représente la nuit et celle orange, le jour. En tant qu’humains, nous sommes tous polarisés et nous avons un bon et un mauvais côté à l’intérieur. Nous avons tous un ange et un démon. Cependant, c’est rare qu’on démontre les deux en même temps. J’ai voulu représenter ça sur la pochette. 

PAN M 360 : Les productions qu’on retrouve sur votre premier album sont  polyvalentes et on y entend entre autres des influences jazz, soul et blues. Ces instrumentales mêlées à votre rap donnent un résultat franchement intéressant. D’où puisez-vous vos inspirations aussi vastes? 

MIRO CHINO : J’ai vraiment des phases dans ce que j’écoute. C’est cliché à dire, mais j’écoute vraiment de tout. En ce moment, j’écoute beaucoup de musique africaine. L’hiver passé c’était le rap français et cet été la house. Récemment, j’ai retrouvé mon vieil iPod que j’avais quand j’étais adolescent. On y retrouve beaucoup de rap québécois, et je réécoute souvent les vieux albums de Dead Obies, Loud Lary Ajust et autres. Ça varie beaucoup !

PAN M 360 : Assurez-vous la production de Bons Times Bad Times?

MIRO CHINO : Ça dépend des chansons, j’ai collaboré avec plusieurs personnes pour l’album. J’ai produit les maquettes pour la plupart des titres, il y en a même certaines que j’ai gardées telles quelles. Pour certains morceaux, on a réenregistré les instruments en studio avec des musiciens. Sinon, il y en a d’autres que mon équipe et moi avons travaillés from scratch. 

PAN M 360 : À plusieurs reprises dans votre album, on entend des extraits vocaux tirés d’émission de télévision ou autres. Quel était le but d’inclure ces extraits sonores?

MIRO CHINO : Je vois mes chansons comme étant des captures de moments de ma vie,  un portrait de ce que j’ai vécu. Pour que ça représente encore plus mon quotidien, j’ai décidé d’incorporer plusieurs extraits sonores de ma vie. J’ai des enregistrements de conversation avec des amis et pleins d’autres choses. Par exemple dans rdv, j’ai ajouté des bruits de transports comme le métro et un vélo. J’aime ça ajouter une ambiance sonore à mes chansons pour vraiment situer les environnements. 

PAN M 360 : Vos textes regorgent de références à Montréal et au style de vie montréalais. Parlez-moi de votre relation avec la ville?

MIRO CHINO : J’ai vraiment une relation d’amour avec la ville. Je dirais qu’on n’a pas beaucoup de conflits et qu’on s’entend bien! Sans blague, j’ai voulu en quelque sorte rendre hommage à Montréal avec mon album. Avec tout ce qui se passe dans le monde en ce moment, je me dis souvent qu’on est chanceux d’être ici. 

PAN M 360 : L’un des titres les mieux ficelés de l’album est sans équivoque bad little bunny. Comment est né ce titre? 

MIRO CHINO : Au niveau de la création, c’est probablement l’un des titres qui a été le plus ardu à faire. Ça a été un immense casse-tête parce qu’à la base j’avais écrit les couplets de la chanson sur une autre instrumentale. Un jour, je composais une chanson dans un style bossa nova et c’est à ce moment-là que le refrain de bad little bunny m’est venu à l’esprit. Cela étant, j’ai décidé de mélanger ce refrain aux autres couplets.Ensuite, j’ai montré le texte à mon band, et je leur ai demandé de me faire des arrangements pour donner vie à ma chanson. Les membres de mon band sont des musiciens jazz. Ils ont commencé à jammer et c’est là que tout a cliqué.  

bad little bunny, ça parle de ce désir en moi à vouloir chiller et « me pogner le beigne » en bon québécois. Ça fait partie de mon histoire et j’ai l’impression que j’ai « perdu » beaucoup d’années de ma vie à fumer et passer du temps avec mes amis. En même temps, j’ai toujours eu en moi ce désir d’avoir du succès en musique. Cette chanson parle justement de faire la part des choses entre avoir du fun et travailler fort. En quelque sorte, c’est une chanson pour me motiver. Tout le temps que j’ai passé avec des amis n’est pas nécessairement perdu, ça m’a permis de vivre de très beaux moments. Maintenant, ces années-là sont derrière moi et j’ai eu mon fun. Je sais ce que je veux dans la vie et je dois travailler en ce sens. 

PAN M 360 : Vous sentez que vous êtes rendu à une autre étape dans votre vie?

MIRO CHINO : Absolument. Dans mon entourage, mes amis commencent à avoir des emplois sérieux en administration ou autres, ils vont bientôt s’acheter une maison et fonder une famille. En voyant ça, je me dis qu’il est temps pour moi de me concentrer sur ma carrière et ma musique. Je suis rendu à ce stade dans ma vie, je veux être sérieux dans ma passion. 

PAN M 360 : Que nous réserve l’avenir pour Miro Chino? Quelles sont vos ambitions?

MIRO CHINO : Je vais profiter pleinement de la sortie de mon projet. J’ai déjà envie de plonger dans la création de mon deuxième album. J’ai déjà une idée de l’univers que j’aimerais créer. Ça va être un peu dystopique et post-apocalyptique. Je veux aller davantage dans la fiction et raconter des histoires que d’aborder ma vie personnelle. C’est vers ça que je veux aller prochainement, j’ai très hâte!

Crédit photo : Éléonore Delvaux Beaudoin

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