LEV veut dire cœur en hébreu, et Shesh-Besh se rapporte au jeu de backgammon, dans la même langue. Donc, ‘’aimer le backgammon’’ serait le thème central de cet album du duo de ‘’gratteux’’ (dit ici avec le plus immense respect) formé de Samuel Bonnet à la guitare et de Jean-Philippe Reny au oud. En vérité, le jeu spécifique importe peu, si ce n’est que les deux artistes aiment s’y adonner et que celui-ci est particulièrement prisé au Moyen-Orient. Ce qui compte vraiment, c’est le principe du jeu en commun. Avec Shesh-Besh, oud et guitare retrouvent leur lien de parenté trop longtemps négligé en amorçant un périple de découverte du répertoire de tradition juive ancienne. Les deux musiciens sont des maîtres respectifs de leur instrument, et leurs habiletés pan-stylistiques (world, jazz, classique) leur permettent de réinventer ces mélodies avec beaucoup de spontanéité. L’écoute de Shesh-Besh donnera aux mélomanes familiers du classique l’impression de redécouvrir une multitude d’images et de lignes mélodiques fréquentées dans de nombreuses œuvres savantes, d’Albeniz à Falla en passant par Tarrega, Bloch ou même Ravel. Tant de chefs-d’œuvre ont été inspirés par ces perles musicales d’un temps immémorial! On remarque la présence de Damian Nisenson sur quelques pièces, deux avec sa voix, mais surtout deux autres où son saxophone s’invite tel une couche supplémentaire de chaleur et de velours, dans un décor déjà riche des teintes suggestives d’un Orient encore fantasmé.
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