Monument de la scène allemande ayant participé aux premiers pas de l’électronique, du krautrock, de l’ambient et de la musique expérimentale, l’inépuisable Hans-Joachim Roedelius, aujourd’hui âgé de 85 ans, ajoute avec Wahre Liebe un neuvième volet à sa célèbre série Selbstportrait.
L’étiquette Bureau B s’est affairée au cours des dernières années à rééditer les premières explorations minimalistes du compositeur berlinois, le faisant ainsi découvrir à une nouvelle génération avide d’ambient. Son fondateur, Gunther Buskies, a approché l’ancien de Cluster et d’Harmonia en 2014 pour lui demander de poursuivre sa suite atmosphérique, considérée comme la pierre d’assise de son imposante carrière en solo. Seule contrainte, utiliser les mêmes instruments qu’à l’enregistrement du premier titre paru en 1979, soit un orgue Farfisa, une boîte à rythmes, un tape delay et un Rhodes.
Nous retrouvons donc au fil des douze pièces le style propre à sa Kosmische Musik. En harmonie avec les textures de l’album original, il parcourt la topographie accidentée de l’intimité en mariant les introspections de Brian Eno aux expérimentations soniques de Kraftwerk. Ses paysages mélancoliques empruntent à l’École de Berlin, à l’onctuosité du New Age et aux timbres 8-bit associés aux vieilles bandes sonores de jeux vidéo. Ce retour aux sources analogiques dégage une allure cérémonieuse tout en conservant l’énergie spécifique de ses ondulations oniriques. Celles-ci nous happent, nous consolent et nous rappellent sagement que l’âge n’est pas un obstacle à l’excellence.