Si vous aimez le minimalisme tendance post-pop/Bang on a Can, vous aimerez très fort Sun, Will Grow du compositeur (et cinéaste) étatsunien Taylor Joshua Rankin. Le jeune homme est basé à Los Angeles, contrairement à la majorité des compositeurs marquants de cette école, qui sont souvent enracinés dans la côte nord-est, principalement new yorkaise.
Allant du piano à l’orchestre de chambre relativement étoffé, et souvent bonifié d’un synthétiseur, le répertoire qu’offre Rankin est varié en textures et en couleurs instrumentales. Si les certaines pièces (comme Speaking Clearly) sont assez lumineuses et aérées, genre Music for 18 Musicians de Steve Reich, d’autres comme Snow Leopard viennent densifier l’expression, avec des harmonies serrées qui étouffent l’espace émotionnel avant d’amorcer une libération sous forme de contemplation onirique et planante. A Cloud Stands, Geometric a quelque chose de wagnérien, mais dépouillé de sa grandiloquence orchestrale pour ne retenir que la marche vers une lumière métaphysique. Cette marche est cependant erratique, et oscille entre plénitude solaire et ombres passagères qui font grincer des dents, et douter de la pertinence du voyage. Fabuleux. Sun, Will Grow, pour piano et synthé, rappelle un générique de film d’auteur. Et ça se poursuit comme ça, plusieurs univers stylistiques s’enchaînant avec facilité.
Rankin dit être inspiré par ses cinéastes favoris pour écrire sa musique : Tsai Ming-liang, Hiroshi Teshigahara, Andrei Tarkovsky et Federico Fellini. Les liens avec la musique manquent de clarté, si bien que cette information, connue ou absente, ne remet aucunement en question le plaisir de l’écoute.
Un détail du processus de création de Rankin est original : ses compositions incluent un espace créatif pour la partie studio de tout enregistrement qui se fera dans l’avenir. Les éléments électroniques qui côtoient étroitement les portions acoustiques pourront évoluer selon le développement des outils et des instruments à la disposition des ingénieurs studios du futur.
Chaque mélomane qui apprécie la musique moderne jouxtant les univers savants et pop de chambre devrait porter attention à cet album et ce compositeur.