Il s’est écoulé beaucoup de temps depuis l’apogée de Skrillex (alias Sonny Moore) il y a plus d’une décennie. Adulé et raillé à la fois pour sa démocratisation du dubstep, Skrillex est désormais un nom connu de tous. Alors qu’une version plus jeune de moi-même aurait rejeté sa musique avec une sorte de blague sur les modems qui forniquent, j’ai été intrigué par ses dernières sorties : Quest For Fire et Don’t Get Too Close.
Sortis à un jour d’intervalle, il est difficile de parler de l’un de ces albums sans faire référence à l’autre. Cependant, c’est Don’t Get Too Close, avec son hérisson animé à la fois nerveux et adorablement ringard sur la pochette, qui a attiré mon attention. Skrillex s’est complètement éloigné du son qui l’a rendu célèbre, abandonnant les basses gonflées, les drops massifs et les synthés agressifs au profit de quelque chose de plus proche de la dream house dissociative.
La liste des invités sur ces deux projets est impressionnante, les invités sur Don’t Get Too Close étant particulièrement efficaces. On retiendra notamment « Ceremony » (ft. Yung Lean et Bladee) avec son beat data-heist inquiétant venu du futur, la jam rap emo évocatrice « Summertime » (ft. Kid Cudi), et « Bad For Me » (ft. Corbin et Chief Keef) avec son ambiance zonée, mais étrangement optimiste.
Toutes les chansons de l’album ne sont pas des expériences : certaines sont clairement conçues pour figurer dans les hit-parades. « Don’t Go » (ft. Justin Bieber et Don Toliver) est une chanson pop bien conçue et brillamment produite dans laquelle Bieber chante de manière prévisible à quel point il aime sa femme, sur des riffs acoustiques cotonneux et des samples sifflants – inoffensif, oubliable, mais aussi pardonnable lorsqu’on le compare aux nombreux moments de bizarrerie non dissimulés de l’album.
Loin des club bangers et des face melters de Skrillex circa 2011, il y a des moments de vulnérabilité brute frôlant les sensibilités emo vers la fin de l’album. Le titre « Don’t Get Too Close » (ft. Bibi Bourelly) est chanté avec désespoir par Sonny lui-même, qui rejoint Bourelly dans un duo émotionnel sur la solitude, l’isolement et le fait de faire de la musique dans le garage, ce qui résonne avec l’adolescent de 14 ans qui sommeille en chacun de nous.
Que vous aimiez ou détestiez le travail de Skrillex, Don’t Get Too Close vous surprendra à coup sûr. Les performances et les sons de cet album nous guident à travers la psyché de Moore lui-même, un jeune intello qui a réussi, a grandi et s’est retrouvé à se demander ce qu’il devait faire ensuite. Mais avec la sortie de Don’t Get Too Close (et de son pendant de dance jams, Quest For Fire), Skrillex a appuyé sur le bouton « comeback », et je pense que ça marche.