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Alors résidant de Calgary où il a grandi, Jean-Sébastien Audet s’est fait connaître sous le pseudo Un Blonde avant de migrer au Québec et s’y faire connaître pour son approche atypique sur le territoire de l’avant-pop. En 2018, il abandonnait Un Blonde et choisissait Yves Jarvis. Il en est à son deuxième album sous ce nom d’artiste (et sous étiquettes Anti_ et Flemish Eye), la matière de Sundry Rock Sound Stock fait l’objet d’une performance audiovisuelle diffusée à Pop Montréal.
« Yves Jarvis, explique-t-il, c’est plus court et facile à prononcer dans les deux langues que Jean-Sébastien Audet, mon vrai nom… qui n’a jamais été une option pour ma carrière. Lorsque j’ai commencé le projet à Calgary en 2014, le nom Un Blonde était apparu dans un contexte de groupe. Yves Jarvis décrit donc mieux l’approche solo de ma carrière. Inscrit dans mon acte de naissance, Yves est le nom de mon grand-père et Jarvis est le nom de famille de ma mère… c’est donc aussi mon vrai nom. »
Les albums et performances qu’on lui connaît sont iconoclastes. Les chorus de ses chansons sont reliés par de longues séquences (ponts), dont plusieurs débordent sciemment les conventions harmoniques et mélodiques admises par la pop, devenue redondante à ce titre depuis belle lurette. Sur scène, l’artiste déclenche des changements structurels en temps réel et ne cesse de transmuter son répertoire. Aucun changement de cap n’est prévu au programme :
« J’aime encore expérimenter, même si la forme chanson est traditionnelle, reconfirme-t-il. J’aime ce un peu décalé avec des parties abstraites, je souhaite toujours changer le contexte. J’aime aussi l’impulsion du moment, je veux que la musique bouge. En spectacle, ça a toujours été important pour moi de rester à l’écoute de mon côté impulsif et d’initier des changements en temps réel. J’adore travailler ainsi. »
Pour mieux nous faire piger sa facture, Yves Jarvis n’hésite pas à citer ses influences pop, indie pop, électroniques, brésiliennes ou expérimentales, mélange archi-éclectique aux sources d’une approche si spéciale . Voici une sélection sommaire :
« J’ai été influencé par plusieurs artistes et styles : le Brésilien Walter Franco, l’Italien Franco Battiato, les Jamaïcains The Upsetters (Lee « Scratch » Perry) et the Kingstonians, Robert Fripp et King Crimson, la chanteuse country et guitariste américaine Kacey Musgraves, l’auteur-compositeur américain Bonnie « Prince » Billy, le groupe rock Guided by Voices, les premiers albums de Kanye West, David Byrne, Brian Eno… »
Après de longs épisodes de liberté expérimentale, la concision était de mise pour la confection de Sundry Rock Sound Stock :
« Auparavant, ce fut très important pour moi de créer des chansons longues et expansives, avec des ponts propices à l’expérimentation. Cette fois, je voulais dix chansons très originales, avec plein de fragments intéressants mais je voulais qu’elles soient plus fluides, plus concises. Au final, il y a moins de séquences expérimentales afin que les gens saisissent mieux le propos. Mes albums précédents étaient plus faciles à digérer avec un casque d’écoute mais avec celui-ci, je crois que ça marche aussi dans les voitures, les cuisines, les salons… dans n’importe quel contexte. »
Yves Jarvis a lui-même fait ce choix de la concision : « Je n’ai reçu aucune pression des compagnies de disque (Anti- et Flemish Eye) pour ça , il y a beaucoup de liberté dans cet album », tient-il à préciser.
Les séances d’enregistrement ont été menées dans l’environnement du Tree Museum, situé dans le district de Musoka en Ontario.
« J’ai passé la période de confinement chez mes parents à Montréal, et je réside actuellement au Tree Museum depuis juillet, je compte y rester jusqu’au début de l’hiver. Le gros du matériel a été enregistré là-bas (où je suis actuellement), la plupart de mes vidéos y ont été tournés. Pourquoi le Tree Museum ? Parce la tante de mon amoureuse en est la gestionnaire et nous y accorde une résidence d’artistes. C’est vraiment idéal, il y a beaucoup d’espace. L’an passé, ma blonde et moi y avons fait ensemble une installation, nous avons présenté des performances sur le terrain autour du musée – ma blonde est aussi une artiste; Romy Lightman forme avec sa sœur Sari le groupe folk expérimental Tasseomancy, elle et moi avons un nouveau projet très excitant que nous amorcerons bientôt. »
Sundry Rock Sound Stock est un album mieux ramassé, la liberté totale a été néanmoins été au coeur du processus de création :
« Je voulais vivre une expérience de production sans murs, j’ai souvent installé mon studio dehors, autour du Tree Museum. J’y enregistrais et filmais ce que je jouais, c’est devenu le fondement de cette production. J’ai développé d’autres chansons en tournée, les paroles sortaient de moi devant le public. J’ai travaillé seul comme dans mes albums précédents, j’ai joué tous les instruments, j’ai tout produit. Cette fois, cependant, il y a moins de surimpressions (overdubs), le focus est plus précis. Les accroches, mélodies et progressions d’accord étaient mieux circonscrites, j’improvisais autour pendant l’enregistrement. J’adore l’expérience du studio et de l’enregistrement, c’est une pratique extatique pour moi, un grand plaisir que je renouvelle quotidiennement.»
Quant aux textes, Yves Jarvis en aime la brièveté et la posture anti-conformiste.
« De manière générale, les thèmes de cet album s’inscrivent contre l’autoritarisme et l’establishment, c’était déjà prévalent dans mes textes antérieurs. J’exprime cette position dans des termes généraux et abstraits, je les présente sous formes de réflexions poétiques. Ma réalité immédiate et quotidienne est ma principale source d’inspiration, il y a aussi beaucoup d’autocritique là-dedans. D’un point de vue formel, j’adore écrire en aphorismes, de manière brève. »
Quant aux concerts… il faudra attendre la fin de la pandémie , sauf exceptions.
« Je voudrais vraiment collaborer avec des musiciens, j’ai des gens en tête mais je ne sais pas ce qu’il adviendra de l’avenir… Pour l’instant, je préfère créer en studio, je le ferai jusqu’à la fin de la crise. Pour Pop Montréal, j’ai enregistré une performance audiovisuelle sur un bateau. Je joue sur l’eau, c’est pas mal cool. »