Rafael Payare et l’OSM : un double triomphe nommé Mahler

Entrevue réalisée par Frédéric Cardin
Genres et styles : classique / période romantique

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Triompher une fois c’est bien, mais répéter l’exploit c’est mieux, et plus rare. C’est ce que vient de faire le chef montréalais d’origine vénézuélienne Rafael Payare avec l’Orchestre symphonique de Montréal. La première fois, c’était le 3 mars dernier grâce à la parution de leur premier enregistrement officiel, sous étiquette Pentatone. Au programme, la Symphonie no 5 de Gustav Mahler, un monument. Un résultat spectaculaire qui a généré de grands moments de bonheur chez le tripeux symphonique que je suis (lisez mon compte-rendu publié ici-même sur PAN M 360).

Le deuxième triomphe est survenu tout récemment, mercredi dernier en fait, le 8 mars, à New York. L’OSM sous la direction de Payare y a joué la même symphonie, obtenant du coup une ovation fébrile du public étasunien. Les critiques dans les médias de la métropole des États-Unis ont toutes été plus que chaleureuses. Il n’y a pas à dire, les deux métropoles s’aiment et s’admirent réciproquement, et ce Mahler montréalais vient d’en rajouter une couche.

J’ai eu le plaisir de discuter quelques minutes avec le jeune maestro, suite à cette très belle semaine. En voici le compte-rendu.

Pan M 360 : Bonjour Rafael! Comment vous sentez-vous après le concert fort bien reçu au Carnegie Hall il y a quelques jours à peine?

Rafael Payare : Oh, c’est fantastique! Le concert a été phénoménal et la réaction incroyable. On ne peut rêver mieux. Nous avons ressenti une puissante énergie de satisfaction après la dernière note, comme un rush d’émotions. Nous sommes très heureux.

Pan M 360 : Qu’est-ce que ça représente pour vous d’y aller pour la première fois avec l’OSM, un habitué de l’endroit?

Rafael Payare : Bien entendu, il y avait une fébrilité toute particulière. Vous savez, Carnegie Hall c’est un endroit mythique, peut-être l’une des salles les plus emblématiques de la musique, avec la Philharmonie de Berlin, le Concertgebouw d’Amsterdam et le Konzerthaus de Vienne. Alors, oui, c’était un moment très très spécial pour moi. Je ne trouve pas les mot ni en français, en anglais ou même en espagnol!

Pan M 360 : Vous venez de faire paraître un enregistrement de cette Symphonie no. 5 de Mahler sous étiquette Pentatone. Comme tout premier album avec l’OSM, pourquoi avez-vous choisi ce compositeur et cette symphonie en particulier?

Rafael Payare : 

Pourquoi pas? (Rires). D’abord, Mahler est très important pour moi, et en parcourant la liste des nombreux enregistrements de l’Orchestre symphonique de Montréal, je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas de Mahler! L’occasion était parfaite. Et pourquoi celle-ci? Cette symphonie est la dernière de sa période ‘’naïve’’. Il regarde encore vers l’avenir et entretient beaucoup d’espoir malgré les ténèbres qui l’entourent. Après, dans les 6e, 7e, 8e et 9e, il fera des symphonies comme pour entrer en lui-même, explorer, voire exorciser ses démons. Ce sera beaucoup plus sombre. La 5e est baignée de lumière, une lumière qui doit lutter férocement pour percer les nuages, mais une lumière affirmée quand même. Il y a une rage de vivre et d’exister. L’orchestre a tout de suite capté cette énergie, et j’ai profité de l’occasion pour la libérer autant que possible.

Pan M 360 : Pourquoi avez-vous une relation si importante avec Mahler?

Rafael Payare : Dans le programme El sistema (un programme musical très développé au Vénézuela, NDLR), nous jouons très souvent quelques compositeurs, et Mahler est l’un deux, avec Beethoven, Tchaïkovsky et Chostakovitch. Chez Mahler il y a un témoignage très personnel et surtout très ressenti du passage dans la vie. La peinture qu’il en fait, tirée de son expérience personnelle, me touche directement.

Pan M 360 : Dans l’enregistrement, il y a beaucoup de fébrilité et d’urgence. C’est donc un choix assumé de votre part de faire ressortir cette énergie?

Rafael Payare : Oui, absolument. Il y a beaucoup d’ambiguïtés, beaucoup de fantômes chez Mahler. On est presque dans la bipolarité avec des contrastes choquants. Et de ces chocs ressort une énergie bien spéciale. L’OSM répond très bien à cela. Je me suis servi de cette énergie pour laisser s’épanouir l’esprit de Mahler, qui oscille constamment entre différents pôles.

Pan M 360 : Vous avez mentionné El sistema, le remarquable programme musical issu du Vénézuela, mais implanté dans plusieurs pays maintenant. Si des gens au Québec souhaitaient faire de même ici, aimeriez-vous les appuyer?

Rafael Payare : Oui, absolument. Je sais qu’il y a déjà un tel système, en partie, au Nouveau-Brunswick. De notre côté, nous sommes en train de réfléchir afin de trouver la bonne façon de faire quelque chose de semblable ici à Montréal et au Québec. Si je suis ici, c’est grâce à El sistema, alors oui, bien sûr, j’appuierai ce genre d’initiatives!

Pan M 360 : Merci et encore bravo!

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