Marco Ema : du teenage blues de Thetford Mines à l’indie pop de Montréal

Entrevue réalisée par Maude Bélair
Genres et styles : indie pop

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Où nos corps s’en vont mourir,  album signé Marco Ema, jeune homme d’à peine vingt ans en provenance de Thetford Mines, a fait l’objet d’un événement remarqué il y a quelques semaines. Déjà ébahi avant le début de ce spectacle- lancement (fin octobre), son public était émerveillé par un décor enchanteur évoquant la plate symétrie et la tranquillité des banlieues.

De petites maisons faisaient office de chaises et de tables, un gazon synthétique servait de carpette, l’éclairage était tamisé aux teintes pastel… Conte de fée ou appréhension de l’avenir ? 

Sans vouloir comparer Thetford Mines à une banlieue à proprement parler,  le chanteur désirait apporter une touche visuelle à son concert et ainsi motiver davantage ses fans,  déjà prêts à chanter ses paroles avec ardeur. 

Que Marc-Antoine Beaudoin se produise en tant qu’auteur-compositeur-interprète, ou comme membre de Vendôme ou encore sous le pseudo Marco Ema, il a  remporté le pari de gagner notre attention, même en plein  trafic revenu après 20 mois de pandémie.

PAN M 360 l’a rencontré afin d’en parler davantage et  aussi afin de savoir… que faire à Thetford Mines ?

PAN M 360 : Tu as grandi dans la ville de Thetford Mines. C’était comment, de grandir là-bas ? Aurais-tu plutôt préféré être né dans une grande ville comme Montréal ?

MARCO EMA : J’ai été chanceux, car c’est là-bas que j’ai rencontré de super bons amis qui sont encore dans ma vie aujourd’hui. Je me suis fait moi-même un très bon cercle. Je dis ça parce que Thetford, c’est pas une ville si facile que ça, surtout socialement ; il n’y a pas vraiment de bars et la culture n’est pas vraiment présente. Thetford m’a donc appris qu’au lieu de tout avoir déjà tout cuit dans le bec, j’ai dû travailler un peu plus fort pour avoir ce que je veux. Sinon je trouve ça cool de grandir dans une plus petite ville où il n’y a pas trop d’action, mais je suis content d’avoir pu vivre les deux, maintenant que j’habite à Montréal.

PAN M 360 : Es-tu souvent de passage à Thetford Mines ? 

MARCO EMA : Mes parents sont souvent à Thetford et je n’y vais plus si souvent… Mais c’est drôle parce que j’y étais avant-hier pour le lancement de l’album, mais sinon je n’y retourne pas plus qu’il faut. Mes ami.e.s sont pas mal soit à Québec, soit à Montréal, les bars que je fréquentais ont fermé… Donc quand j’y vais, c’est pour voir mes parents et être nostalgique. 

PAN M 360 : Te rappelles-tu à partir de quel moment tu as compris que tu aimais chanter, jouer, composer de la musique ?

MARCO EMA : Ma famille est très musicale : mon père a fait du piano classique lors de sa jeunesse et ma mère joue de l’orgue pour les cérémonies de mariage. Et pendant nos gros partys de famille, tout le monde se réunissait pour jammer, c’était cool, ça. Avec tout ce bagage, j’ai commencé à jouer du piano à l’âge de six ans. Je jouais des pièces plutôt classiques et à moment donné, j’ai compris que je ne voulais plus faire ça : je voulais faire du rock. Mais une petite fille au primaire m’a dit que je chantais mal et ça m’a vraiment bouleversé! À partir de là, je ne jouais que de l’instrumental parce qu’elle m’avait trop fait douter de moi et un jour, quelqu’un m’a dit le contraire et j’ai commencé à écrire des chansons pour de vrai. 

PAN M 360 : Ton parcours scolaire était-il en lien avec la musique ou faisais-tu complètement autre chose ? 

MARCO EMA : Au cégep, j’ai fait la journée d’intégration dans le programme de musique à Drummondville et au CMDS à Québec ; tout était indiqué que je fasse ça mais j’ai fait la journée d’intégration au cégep de Thetford en arts et lettres, j’ai compris que d’étudier la littérature allait m’apporter davantage que d’étudier la musique. Je faisais de la musique depuis longtemps et je me suis dit que faire autre chose pendant un moment allait me faire du bien. 

PAN M 360 : Outre Marco Ema, tu joues également dans un groupe : Vendôme! Il se passe quoi avec ça ? 

MARCO EMA : Avant d’être Marco Ema, je faisais de la musique comme auteur-compositeur-interprète et c’est au Festival de la Chanson de Granby que j’ai rencontré les trois autres membres de Vendôme. On s’entendait  bien et on a compris qu’on aimerait certainement faire de la musique ensemble. Vendôme, c’est plutôt récréatif, nous avons quand même  enregistré un album au mois d’octobre dernier. Nous adorons le projet et je crois que c’est bien pour tous les quatre que nous ayons tous d’autres projets musicaux simultanément. Nous ne sommes pas dissous, nous sommes en pleine forme! 

PAN M 360 : Avant de te produire sous le nom de Marco Ema, tu utilisais ton vrai nom, soit Marc-Antoine Beaudoin. Depuis la sortie de ton premier album, Déséquilibre en 2019 et la sortie de ton tout nouvel album Où nos corps s’en vont mourir, quelle évolution peut-on observer dans tes projets ? 

MARCO EMA : Ironiquement, je crois que de m’être éloigné de mon vrai nom. Le pseudonyme de Marco Ema a fait en sorte que ma musique soit perçue comme authentique et vraie. Et je pense que je me cache moins derrière des métaphores qui ne veulent pas dire grand-chose. Finalement, je suis très fier de Déséquilibre mais je n’avais que 18, 19 ans, je ne savais pas trop ce que je voulais. Avec Marco Ema, je sais où je m’en vais et je sais ce que je veux. Tassez-vous les chums!

PAN M 360 : Ton nouvel album s’appelle Où nos corps s’en vont mourir. Tu y parles des méandres de la vingtaine : la joie et le bonheur sont à portée de main avec nos ami.e.s et nos amours de jeunesse, mais la tristesse et la nostalgie peuvent nous happer à tout moment. Un thème assez récurrent est ta crainte face à l’arrivée de décembre, mois où le temps se fait plus gris et plus lourd. Pourquoi décembre te fait-il un tel effet ? 

MARCO EMA : Avec l’arrivée de décembre, les jours se font plus courts, le soleil se fait plus timide, c’est plus dur pour le moral. Aussi, les dernières années ont été plutôt tragiques pour ma famille et moi dans la mesure où nous avons vécu le décès de proches, cela n’a pas été facile. Et alors que l’année se termine avec le mois de décembre, elle recommence toujours de plus belle en janvier et ce, qu’on le souhaite ou non. Et dans la chanson Janvier vient te reprendre, je dis : « Mais pour l’instant mon cœur/ Décembre nous fait pas peur/ Janvier vient te reprendre » … plus on vieillit, moins on va voir de décembre… tu comprends ? En tout cas, j’ai aimé jouer avec les concepts de fin et de commencement. 

PAN M 360 : Et comme tu viens de le mentionner, le décès, la mort est un second thème omniprésent du titre de l’album aux paroles… Es-tu à l’aise d’en parler davantage ?

MARCO EMA : Le but premier de cet album est de réaliser que la mort est la destinée qui nous attend tous.tes. Mais en attendant… que peut-on faire pour ne pas trop y penser et rester heureux.ses ? L’album présente des thèmes tristes, des thèmes dont personne ne souhaite vraiment parler, et avec raison, j’ai même écrit la chanson Funambule une nuit où je n’arrivais pas à trouver le sommeil tant je ne faisais que penser à ça. Mais je souhaitais vraiment m’exprimer là-dessus , et j’espère que c’est ce que les gens ont retenu, soit  de réaliser qu’entre le début et la fin, il faut accepter cette fatalité afin de pouvoir vivre dans le bonheur. 

PAN M 360 : Pour le lancement de l’album, vous avez décidé d’opter pour un concert immersif : de petites maisons toutes identiques (ode à la banlieue) servaient de banquettes pour l’audience, du faux gazon faisait office de plancher… L’équipe de Pestacle a vraiment fait un beau travail! D’où est venue l’idée ? 
MARCO EMA : C’est un beau travail de moi, mon gérant et mon label. Nous voulions frapper fort, nous ne  voulions pas faire quelque chose qui laisse indifférent. Nous avions un très cool budget et je me suis dit que tant qu’à faire un lancement au Club Soda, on le fait bien. Toutes les chansons du projet ont été écrites à Thetford, dans la mesure où je suis retourné chez mes parents à la première vague de la pandémie. Bon, Thetford, c’est pas une banlieue en tant que telle mais ça peut être vu comme une grosse banlieue et je voulais que ça se voie dans le show… À une époque où on scrolll sur les réseaux sociaux sans vraiment regarder, ce show nous a donné l’occasion d’attirer l’attention des gens sur le projet. Et je crois que c’est réussi. 

Crédit photo : Patrick Beaudry

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