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De Vivaldi à Piazzolla en passant par Boccherini et Durante, grands succès et découvertes peupleront la soirée du 24 juillet à l’amphithéâtre Fernand-Lindsay, près de Joliette. Le concert Destination Buenos Aires est en vérité un voyage sonore et affectif qui nous fera voyager de l’Italie à l’Argentine, avec une escale nocturne envoûtante à Madrid. Nous avons parlé avec le chef virtuose et talentueux de ce concert parfaitement ‘’festival’’!
Pan M 360: Bonjour Nicolas. J’aimerais que tu nous parles de ce voyage que tu proposeras au public du Festival de Lanaudière le 24 juillet, avec les Violons du Roy et le violoniste Kerson Leong en tant que soliste.
Nicolas Ellis: Ah, ce sera un voyage palpitant! Ça commence en beauté, façon feux d’artifice avec une ouverture de Vivaldi, l’Olimpiade, écrite pour son opéra du même nom. C’est très caractéristique de Vivaldi, avec beaucoup d’énergie et de vivacité.
Ça se poursuit avec une très belle découverte qui nous vient de Naples, peu connue du public, le concerto grosso La pazzia (La folie) de Francisco Durante. C’est une oeuvre un peu folle en effet car très contrastée et mettant en scène deux altos solos en dialogue énergique avec l’orchestre. Cette pièce a été écrite entre la fin du baroque et le début de la période classique, ce qui lui donne un tempérament original, ni tout à fait l’un, ni tout à fait l’autre. Le thème de la folie était d’ailleurs populaire chez les musiciens de l’époque car cela offrait pleins de possibilités musicales inhabituelles, donc plus de liberté formelle. C’est un peu comme si à travers la musique on pouvait se permettre toutes sortes de choses qu’on ne pouvait imaginer dans la vraie vie. C’est même un peu bipolaire, car ça change parfois brusquement entre des lignes très sensuelles des deux altos qui s’entrelacent pour passer tout à coup à des attaques surprenantes de l’orchestre! La pazzia, en bon Québécois, ça se traduirait par ‘’Es-tu fou?’’ ou ‘’Es-tu malade?’’.
Ensuite on va à Madrid pour une pièce exceptionnelle, un arrangement pour orchestre du quintette Une nuit à Madrid de Boccherini. Ce dernier était Italien, mais il a beaucoup voyagé, particulièrement en Espagne. Cette Nuit à Madrid est une pièce très libre, sans aucune forme typique de l’époque (forme sonate par exemple). C’est en vérité une musique à programme. On y raconte une histoire, toute simple, celle d’un voyageur qui passe une nuit à Madrid, et y est témoin des merveilles envoûtantes que cela implique. On y perçoit les cloches de la cathédrale, des danseurs, des jongleurs et autres amuseurs publics, on y vit d’autres aventures pittoresque jusqu’au petit matin où les gardes viennent annoncer le ‘’last call’’ et mettre un terme aux festivités. C’est une musique super flyée, et je suis certain que le public va l’adorer!
Finalement, on traverse l’Atlantique pour aller à Buenos Aires et entendre Piazzolla, le plus emblématique des compositeurs argentins. Kerson Leong se joindra à nous pour interpréter les Quatre saisons de Buenos Aires de Piazzolla. Une version tangueiria du thème des saisons. C’est spectaculaire, c’est beau, c’est excitant. Il ne faut pas manquer ça!
Pan M 360: Quelle appréciation as-tu du jeu avec Kerson Leong?
Nicolas Ellis: Oh là là! Quel plaisir! Kerson est assurément l’un des plus grands talents actuels au violon. Ce n’est pas la première fois que je joue avec lui et chaque fois que je l’entend, je ne peux m’empêcher d’avoir la bouche à terre devant son extraordinaire fougue, sa musicalité hors norme et son incroyable aisance technique. Un talent comme ça, d’ici en plus, ça n’arrive pas souvent. Il a la jeune vingtaine, il étudie à La Chapelle, à Bruxelles, et il est déjà en demande un peu partout dans le monde. Il faut venir l’entendre en personne pour apprécier pleinement la magie et la force qui se dégagent de cet artiste!
Pan M 360: Il y a des pièces que tu diriges pour la première fois dans le programme? Qu’as-tu le plus apprécié dans les découvertes que tu as faites?
Nicolas Ellis: En vérité, toutes sauf les Saisons de Piazzolla constituent une première pour moi. J’ai été séduit par la liberté qui se dégage de La pazzia, ainsi que ses contrastes entre un orchestre fou et deux altos rarement utilisés de cette manière à l’époque. Et La nuit à Madrid est merveilleusement imagée! On navigue dans un monde très sensoriel, avec des textures habilement dessinées, des couleurs invitantes et très variées. C’est une œuvre originale et surtout parfaite dans les circonstances d’un festival d’été comme celui de Lanaudière. C’est une pièce idéale pour se retrouver entre amis qui aiment la musique.
Pan M 360: Dans une entrevue récente, tu parlais des captations vidéo qui s’imposent désormais et qui demeureront essentielles, pour la plupart des orchestres. Ce sera le cas de ce concert, que les mélomanes pourront voir ou revoir après le 24 s’ils ont leur billet. Quel type de développement et de bonification crois-tu seront nécessaires pour ce médium afin qu’il se démarque d’une simple retransmission de concert que l’on pourrait voir en salle?
Nicolas Ellis: Oui, je pense que les captations vont rester. Je pense qu’à mesure que l’expertise se développera, les possibilités créatives apparaîtront plus nettement aussi. Tu sais, dans le monde, on consomme de plus en plus la musique avec les yeux autant qu’avec les oreilles. Je crois que ce médium va contribuer à cette évolution.
Cela dit, je ne pense pas que la créativité passera nécessairement par des ajouts de décors ou d’éclairage. Je pense plutôt à un nouveau dynamisme dans la visualisation des musiciens. En concert traditionnel, l’attention est inévitablement centrée sur le chef ou le/la soliste. Avec les captations et l’épanouissement de l’expertise des techniciens, des musiciens moins ‘’remarqués’’ s’imposeront au public. Je pense à des musiciens de secondes sections de cordes, ou des vents dont on entend ici et là des lignes, mais qui demeurent camouflés par le devant de l’orchestre. Le public percevra un peu mieux ce que sait et perçoit lui-même le chef d’orchestre!