Dans son Escale à Curaçao, la pianiste Louise Bessette nous fait découvrir la musique de Wim Statius Muller (1930-2019), dit ‘’le Chopin de Curaçao’’, compositeur originaire de l’île de Curaçao dans les Antilles néerlandaises. Il est souvent réducteur d’utiliser les épithètes du genre »le Chopin de ci » ou »le Beethoven de cela », mais la dette stylistique de Muller envers Chopin est d’une évidence absolue. Il faut dire que Chopin est une sorte d’idole dans l’île depuis qu’au 19e siècle, un jeune artiste autochtone en ramena les partitions et que les insulaires dans leur ensemble en firent presque une sorte de musique nationale. Vous aurez deviné que l’esprit chopinien des pièces de Muller est adroitement mâtiné de rythmes chaloupés typiques des Caraïbes, dans des structures qui font parfois appel aux valses ou aux mazurkas chères au Polonais, mais aussi à quelques canevas plus originaux enracinés dans la musique populaire de l’endroit. Muller a créé une synthèse adroite, d’un créolisme qui rappelle celui d’un certain Louis Moreau Gottschalk aux États-Unis du 19e siècle. C’est agréable, fort bien tourné et excellemment interprété (le contraire eut été surprenant) par Louise Bessette. La pianiste québécoise prend de toute évidence grand plaisir à partager avec nous l’amour qu’elle porte à ce genre de dialogue culturel métropole/colonie qui peut paraître suranné de nos jours, mais qui sait tout de même dévoiler de bien beaux espaces d’émotions et d’atmosphères.
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