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Pour la Semaine du Neuf, le Quatuor Bozzini célèbre ses 25 ans d’activités professionnelles au service des musiques de création, soit avec des créations de trois compositeurs-trices d’exception: Michael Oesterle, Linda Catlin Smith et Martin Arnold. Pour cette occasion très spéciale, PAN M 360 publie deux interviews avec les membres de cet excellent quatuor montréalais: Alissa Cheung, violon, Clemens Merkel, violon, Stéphanie Bozzini, alto, Isabelle Bozzini, violoncelle, auxquels se joindront la violoncelliste Audréanne Filion et l’altiste Élisa Trudel pour l’exécution de la pièce de Martin Arnold. Parlons d’abord du concert de ce vendredi 14 mars, 19h30, au Music Media Room... et lisez notre interview-bilan des 25 ans de Bozzini !
PAN M 360: Pourquoi ces trois compositeurs.trice dans une telle commémoration?
Isabelle Bozzini: L’Effusione d’amicizia est un des projets phare de notre quart de siècle, des commandes à des compositeurs qui nous accompagnent depuis nos débuts : Michael Oesterle, Martin Arnold et Linda Smith. Ces créateurs exceptionnels nous font l’honneur depuis longtemps de suivre et apprécier notre travail. Full disclosure : tous ces artistes se connaissent et s’apprécient, et ils ont déjà été mentors de notre Composer’s Kitchen ou du BozziniLab, d’où l’effusion!
PAN M 360: Parlez-nous de 3-Way Cotillion, un sextuor de Martin Arnold, où on retrouve la fascination du compositeur pour la musique ancienne, les traditions folk et l’influence des musiques psychédéliques. Peut-on en apprendre davantage sur l’œuvre?
Stéphanie Bozzini: L’œuvre 3-Way Cotillion est basée sur des matériaux et structures simples. Le sextuor s’ouvre sur une longue mélopée des deux altos, soutenue par des accords « coussins » et des ponctuations de pizzicato des autres instruments. Son titre fait référence à une danse, ce qui est assez caractéristique des œuvres de Martin : des mélodies ondoyantes, humbles, jamais dans l’extravagance, parfois lentes mais aussi des motifs pointés qui ponctuent les phrases en guise de cadences. Une réminiscence de motifs mélodiques revient au long de la pièce.
Clemens Merkel: Le compositeur laisse toujours beaucoup de décisions et de liberté aux interprètes en termes d’articulations, nuances et même caractères, ce qui donne à ses œuvres un super terrain de jeu pour nous.
Isabelle Bozzini : Martin est un pur mélomane et possède une collection de disques exceptionnelle et extrêmement éclectique. Il a une vénération pour la musique de la Renaissance, il a grandi avec la tradition folk en Alberta et vécu à fond sa période psychédélique. Pour comprendre pleinement toutes ses influences, je pense qu’il faut aller l’entendre dans un bar avec l’un de ses bands à Toronto
PAN M 360; Comment avez-vous intégré la violoncelliste Audréanne Filion et l’altiste Élisa Trudel?
Isabelle Bozzini: L’altiste Élisa Trudel et la violoncelliste Audréanne Filion sont deux musiciennes de la relève. Il y a des affinités sonores et esthétiques au départ, et aussi une réelle curiosité de leur côté pour la musique nouvelle. C’est pourquoi nous nous sommes tournés vers elles. Audréanne évolue au sein du milieu de musique actuelle entre autres, et a déjà joué avec nous en 2023 à Québec Musiques Parallèles pour le Jürg Frey.
Stéphanie Bozzini: Nous avons croisé régulièrement Élisa dans différents concerts à Montréal et Rimouski, c’est inspirant de voir la jeune génération d’interprètes s’intéresser aux nouvelles musiques. Et c’est super de les avoir avec nous pour ce concert!
PAN M 360 : Michael Oesterle, avec qui vous avez fait connaissance au Forum du Nouvel Ensemble Moderne en 1996, est à l’origine d’une longue collaboration avec l’ensemble, qui présentera son Quatuor no 4, cinquième œuvre écrite pour le Bozzini. Y a-t-il un lien avec les œuvres précédentes, jouées au fil du temps avec le quatuor? Comment l’œuvre est-elle construite et quels sont les enjeux de l’exécution?
Stéphanie Bozzini: C’est une longue pièce en un mouvement, divisé en quelques sections, donc en contraste avec le Quatuor No.3 « Alan Turing » qui est en 4 mouvements distincts, ou d’autres de ses quatuors qui sont de forme courte. Le Quatuor no.4 commence et termine avec un choral réminiscent de la grande tradition classique, et dont on entend l’écho en harmoniques au centre de la pièce. Michael construit ses œuvres en alternant des matériaux musicaux géométriques expressifs. Avec des moyens très simples, il crée toute une fresque de sons originaux, ludiques et aussi très expressifs.
Isabelle Bozzini: Malgré les difficultés techniques de la pièce, sa connaissance intime du langage pour cordes en rend l’exécution accessible : par exemple des traits rapides en harmoniques qui sont idiomatiques pour les cordes. On aime bien sûr les défis d’œuvres techniquement touffues, pour le défi, le plaisir d’apprendre, le désir de se pousser et de faire avancer la fluidité du jeu.
Stéphanie Bozzini: Mais en même temps ça reste un aspect satisfaisant pour nous de ne pas avoir à « s’enfarger dans les fleurs du tapis » comme on se dit parfois en répétition, pour pouvoir se consacrer à d’autres aspects de la musique plus importants à nos yeux : l’expression, les dynamiques, le flot et la balance.
PAN M 360: La Torontoise Linda Catlin Smith a créé la pièce Rêverie spécialement pour l’occasion. Quelles sont les caractéristiques de cette œuvre? Quels sont les enjeux de l’exécution?
Alissa Cheung: Nous avons joué presque tous les quatuors à cordes de Linda, et nous sommes ravis d’avoir enfin une commande spécialement écrite pour nous. On peut reconnaître des éléments de ses précédents quatuors, des phrases et une orchestration qui nous rappellent Gondola ou Folkestone, mais cette pièce s’inscrit de manière unique dans l’évolution de l’écriture des quatuors à cordes de Linda. L’œuvre est composée de nombreuses sections homogènes qui passent de l’une à l’autre, et l’on y retrouve les contrastes caractéristiques de Linda entre la lumière et l’obscurité, en termes de contenu harmonique, orchestral et émotionnel. Comme dans beaucoup de ses autres pièces, il faut que l’ensemble ait un sens aigu de la pulsation, sans pour autant perdre la nature organique de l’apesanteur et de la fluidité pour l’auditeur.
PAN M 360: Pourquoi ce programme est-il présenté au Music Multimedia Room (MMR), réputé pour ses vertus acousmatiques et multimédias?
Isabelle Bozzini: On associe beaucoup le MMR à l’électro avec les événements live@CIRMMT entre autres, mais il ne faut pas oublier qu’à l’origine c’est un studio d’enregistrement aux qualités acoustiques extraordinaires. C’est la première fois que nous y jouerons en concert et j’ai bien hâte! Bien sûr, le choix des salles de concerts dépend aussi des disponibilités au calendrier et de l’agenda des artistes.
Programme
Linda Catlin Smith: Reverie (2025) – 20’ (création)
Martin Arnold: 3-Way Cotillion (2021) – 20’ (création)
Michael Oesterle: String Quartet No. 4 (2019) – 26’ (création montréalaise)
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Rencontre avec les compositeurs | Modératrice: Alissa Cheung
Artistes
Quatuor BozziniIsabelle Bozzini (Violoncelle)Stéphanie Bozzini (Alto)Alissa Cheung (Violon)Clemens Merkel (Violon)
Audréanne Filion (violoncelle)
Elisa Trudel (alto)
crédit photo: Kristian Trana