Per Nørgård est LE compositeur contemporain du Danemark. Sa plume unique et superbement foisonnante, particulièrement pour l’orchestre symphonique, a contribué à remplir le répertoire d’aujourd’hui d’un ensemble de chefs-d’œuvre fascinants. Son approche des techniques contemporaines est innovatrice. Il est le créateur de deux systèmes d’écriture contemporain innovateurs : l’accélération infinie et la série infinie.
Le premier accélère le tempo jusqu’à doubler de vitesse avant de retomber soudainement à la moitié de cette vitesse. L’effet est répété afin de créer l’illusion d’une accélération
continue. Le deuxième est issu de la superposition des couches musicales ayant une capacité de développement systématique et potentiellement éternel et qui contiennent des propriétés sérielles aussi bien qu’organiques. Bref, il a adapté la structure sérielle et atonale stricte pour en faire le reposoir d’une expression complexe mais non hermétique.
Les trois œuvres au programme ici n’utilisent que partiellement le principe de la série infinie, et pas celui de l’accélération, mais à leur écoute, on ressent la préoccupation de Nørgård pour une communication sensible et efficace avec les mélomanes.
Ses Three Nocturnal Movements pour violon, violoncelle et orchestre sont tissés de textures frémissantes, parcourues de fines ciselures lumineuses qui traversent l’espace sonore. Les deux premiers mouvements, imprégnés de zénitude laissent place à un mouvement final secoué de spasmes dynamiques qui viennent menacer plus ou moins régulièrement la plénitude contemplative instaurée depuis le début du triptyque.
La Symphonie no 8 est plus agitée en général, mais Nørgård, cohérent avec sa démarche habituelle, a constamment le souci de baigner ses thèmes, ses lignes discursives, dans une enveloppe sonore vibratoire, un peu à la manière de la musique spectrale. Cela dit, le Danois y insuffle des courants d’airs presque romantiques, à l’occasion, ce que les spectraux ne font pas. C’est de la magistrale musique symphonique, habilement écrite et surtout superbement rendue par les solistes (Peter Herrensthal au violon et Jakob Kullberg au violoncelle) et l’Orchestre philharmonique de Bergen sous la direction de John Storgårds.
Ce parcours nordique contemporain se termine avec Lysning, pour cordes. Nørgård y juxtapose quelques idées musicales en deux versions, l’une sombre et l’autre plus éclairée, sorte de miroir en noir et blanc du matériau de base. Ce jeu d’ombres et de lumière dégage une impression de romantisme et plaira aux amoureux de l’Adagio de Barber.