Quatre ans après le magnifique Transparent Waters qui nous avait donné la chance de les voir en tournée québécoise, le pianiste cubain et le griot sénégalais ont décidé de « faire un deuxième bébé », comme l’explique candidement le joueur de kora virtuose. Ils sont donc retournés à Osnabrück, en Allemagne, dans le même superbe studio, histoire de voir comment leur amitié avait évolué pendant la pandémie. Tout ça sans oublier de ramener avec eux un troisième larron, l’excellent percussionniste Gustavo Ovelles, du Vénézuela, un décorateur nuancé et discret. Basé sur le principe « qui peut plus peut moins », les trois hommes s’appliquent donc à rester sobres et sincères, en jouant comme si tout ce qui est superflu est inutile. Il y a une telle connivence, une telle qualité d’écoute dans ce trio magique qu’on entend même les silences entre eux, la retenue, la tendresse, l’humanité… Suba, le titre de l’ouvrage, est bel et bien une ode à l’aube dans la langue maternelle de Keita. On imagine donc volontiers que la posture idéale pour écouter les onze plages de ce disque inspiré est la position du lotus, les yeux fermés, face au lever du soleil. Mais si elle est, par moments, propice à la méditation et au yoga, une musique pour l’âme, en quête de béatitude, elle se révèle aussi plus enjouée, sur un tempo plus rapide, et plus optimiste aussi comme dans Allah Leno, 2020 Visions et Korason (quels beaux jeux de mots!).
Toutefois, on s’en voudrait de terminer ce topo sans mentionner la présence d’un invité de marque, le merveilleux violoncelliste brésilien Jaques Morelenbaum, qui vient notamment clore cet opus avec le lyrisme qu’on lui connaît, en exprimant l’incertitude du temps présent dans No One Knows.
Hautement recommandé.