C’est l’histoire d’un quintette de Chicoutimi qui s’appelait Sweet Grass à cause de velléités de chansons en anglais et qui, après une paire d’années, s’est rebaptisé Chassepareil. Il est donc passé de l’hiérochloé odorante – qu’on appelle aussi « foin d’odeur », entre autres – à l’aralie chassepareille, cousine du tonifiant ginseng. Fort de cette dénomination plus en phase avec sa langue et son territoire d’origine, l’ensemble Chassepareil a fait paraître en octobre 2016 Les oiseaux d’hiver, premier album folk-trad de chambre très réussi.
Maintenant quatuor, Chassepareil vient de lancer Chicout, dont les dix pièces constituent un hommage quadripartite à l’ancienne ville désormais arrondissement de Saguenay, à la vastitude du Plateau laurentien, à Montréal et au fleuve Saint-Laurent. Johannie Tremblay a tout écrit et tout composé, en plus de chanter et de jouer de la flûte traversière et à bec, de l’harmonica et de l’orgue. Pierre-Antoine Tanguay (contrebasse et chant), Pascal Gagnon-Gilbert (batterie et autres percussions) et Alexandrine Rodrigue (guitares, glockenspiel et chant) sont les trois autres colonnes du dolmen keb Chassepareil.
À l’écoute de ces chansons, le musicophile perçoit davantage les effluves des tourbières britanniques que ceux des tourtières du Lac ou d’autres ragoûts nord-américains, à l’exception de Loups, avec son folk-rock stimulant à la Neil Young période Harvest Moon. Bref, la balance folk penche plus du côté de vénérables ensembles comme Pentangle et Fairport Convention que de celui de Canailles ou The Microphones. Certaines pièces sont rehaussées d’ornements de clarinette et de pedal steel, ainsi que des touches synthétiques de Guillaume Guilbault (Constance, Mélanie Venditti, KROY), réalisateur de Chicout. Puis, la poésie fleur bleue contemporaine de Johannie Tremblay est assez relevée pour émouvoir dignement le musicophile déjà rasséréné par cette musique.