Rich in Symbols II est l’équivalent canadien et jazz des Tableaux d’une exposition de Moussorgski. Alors que le premier album visait large, ce deuxième opus synesthésique (Doxas associe spontanément des images avec de la musique dans sa tête) se concentre sur son pays natal. En vedette ici, le Groupe des Sept, ce collectif canadien de peintres du début du 20e siècle qui a fait entrer le pays dans la modernité picturale et est peut-être aujourd’hui l’ambassadeur principal du Canada dans le monde des arts visuels (avec Riopelle et Borduas).
Les paysages sobres et dénudés des sept tableaux choisis se transforment en espaces sonores intimistes et mélancoliques, parfois même menaçants, même si la lumière réussit toujours à se faufiler entre les interstices des pires ténèbres. On y sent la froidure inhérente à ces canevas nordiques à la fois lisses et minéraux, contemplatifs et imposants, solitaires et universels.
Des picotements atonaux côtoient habilement des moments lyriques sinueux pour créer une atmosphère de modernité sensorielle prégnante. Doxas réalise ici un hommage senti et durable à sa terre natale, lui qui s’est exilé à Brooklyn depuis quelques années.
Il faut absolument admirer les oeuvres de A.Y Jackson, de Frank Carmichael, de Lawren Harris, ainsi que de Tom Thomson et d’Emily Carr (deux artistes qui ne faisaient pas officiellement partie du groupe mais qui y sont fréquemment associés) pour pleinement ressentir le frisson du givre, la béatitude des grands espaces et l’infini solitaire auxquels nous appellent ces chef-d’oeuvres. Magistral.
Doxas (saxo, clarinette et bande sonore) est brillamment accompagné de Jacob Sacks (piano et mellotron), Joe Grass (pedal steel, guitare et banjo), Zack Lober (contrebasse) et Eric Doob (batterie and programmation sonore.) Sam Roberts vient faire un tour en narrant un texte de Doxas lui-même, inspiré du tableau The Front of Winter, de J-E-H MacDonald.