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Ce dimanche à la Sala Rossa, cet habitué des Suoni per il Popolo prévoit explorer tous les recoins de l’instrument nu, sans artifices aucun sauf ses propres interventions sur les cordes de métal. Il explique ici son approche à PAN M 360, question de nous préparer à cette rencontre avec son public dans le contexte d’un programme triple
Transplanté en Hollande depuis plus de trois décennies, le guitariste écossais Andy Moor avait entrepris son parcours musical à Édimbourg, notamment au sein de Dog Faced Hermans, groupe post-punk traversé par la musique traditionnelle et l’improvisation libre. Au tournant des années 90, il fut recruté par le groupe néerlandais The Ex, célèbre pour ses mixtions de punk hardcor, d’improvisation libre et d’expériences sonores inédites.
En 1995, il fonde en parallèle de The Ex la formation Kletka Red, ùu côtés de Tony Buck Joe Williamson et Leonid Soybelman, l’objet étant cette fois d’hybrider des musiques traditionnelles klezmer, grecques et russes. Au fil du temps, il a collaboré avec de nombreux musiciens d’horizons différents.
Improvisateur chevronné, il revient aux Suoni per il Popolo pour y jouer comme un seul homme avec sa guitare, dans un programme partagé avec l’artiste expérimental et multidisciplinaire Damon Locks, de Chicago et l’improvisateur montréalais Markus Floats.
PAN M 360 : De quel type de performance est-il question cette fois à Montréal?
ANDY MOOR : En fait je viens pour jouer en solo, une approche que j’ai développée ces deux ou trois dernières années : improviser à la guitare, juste à la guitare. Il n’y a pas d’effet ou quoi que ce soit d’autre.
PAN M 360 : Aucun filtre électronique? Aucun effet? Seulement une guitare sans pédales? Pouvez-vous nous donner quelques indices ?
ANDY MOOR : Quand j’ai commencé à jouer de la guitare, j’utilisais parfois une boîte à écho. Il pouvait aussi s’agir d’un magnétophone, soit une bande qui tournait en rond et qui créait un décalage et donc un effet d’écho. Mais au bout d’un moment, quand j’ai réécouté les enregistrements, j’ai toujours trouvé que cela avait un bel effet, mais on perdait la présence du son de la guitare, qui devenait un peu flou, un peu mou. Alors cette approche sans effets a grandi au fil du temps.
PAN M 360 : Avez vous déjà utilisé des pédales d’effets ou autres filtres électroacoustiques?
ANDY MOOR : Je n’ai jamais utilisé de pédales d’effets, peut-être un peu de distorsion à l’époque. Mais vint un temps où je me suis dit que je n’avais vraiment pas besoin d’effets supplémentaires. Toutefois, quand j’écoute d’autres guitaristes jouer avec des effets, parfois j’aime bien. Mais la plupart du temps, j’ai l’impression qu’il y a une sorte de filtre ou de mur entre les effets et le son réel de leur instrument.
Très souvent, les guitaristes utilisent 10, 15 , 20 pédales. Oui, bien sûr, une fois que leur son est passé à travers tout ça, je ne sais pas, il finit par perdre de la présence et de la dynamique. Et ça devient un peu une bouillie dans certains cas alors que dans d’autres cas, certaines personnes parviennent à bien utiliser les pédales. Ce n’est pas vraiment mon goût. Pour moi, en tout cas, j’ai l’impression de perdre plus que de gagner. Alors au lieu d’utiliser des pédales, j’utilise des objets afin de créer des sons inhabituels sur les cordes de l’instrument.
PAN M 360 : Y voyez-vous beaucoup de possibilités?
ANDY MOOR : C’est incroyable la quantité de sons que l’on peut produire ainsi. Encore aujourd’hui, je suis encore surpris par certains des sons qui sortent de l’instrument. Pour mettre ces sons en valeur, j’utilise une sorte de préamplificateur qui compresse lentement le son, de sorte que le plus petit changement ou mouvement peut être entendu très, très clairement. Cela fait aussi réagir le corps de la guitare, si vous le touchez à n’importe quel endroit. Oui, je travaille beaucoup avec les basses fréquences, en réaccordant les cordes très bas. Et il se passe des choses vraiment étranges lorsque vous faites cela, car le son reste très présent et très clair. On voit et on entend vraiment ce qui se passe.
PAN M 360 : Quand vous réaccordez l’instrument, s’agit-il d’une exploration microtonale, c’est-à-dire que vous recherchez d’autres types d’intervalles que les gammes « normales »?
ANDY MOOR : C’est effectivement très microtonal. Je ne m’accorde pas de manière précise, j’y vais plutôt à l’oreille, et je travaille avant tout avec le son de l’instrument.
PAN M 360 : Y a-t-il d’autres raisons qui puissent expliquer l’exclusion des effets via pédales ou autres outils électronques?
ANDY MOOR : Cela peut s’expliquer en partie par mon au sein des groupes auxquels j’ai pris part, soit une guitare très rythmique. Il n’y pas de solos de guitare dans The Ex, par exemple, il peut y avoir la mélodie simple d’un thème, sans plus. Le rythme de la guitare y accompagne celui de la batterie, les deux instruments se croisent en quelque sorte. Nous n’avons donc jamais vraiment ressenti le besoin d’en faire davantage. C’est juste une question de simplicité et non de purisme. Chaque personne du groupe a un élément simple à produire. D’une certaine manière, c’est ce qui fait que tout fonctionne.
PAN M 360 : C’est intéressant : une partie de votre personnalité vise à rester simple mais en même temps, vous savez, vous explorez la complexité dans d’autres dimensions musicales de votre expression. Peu d’artistes maintiennent cette tension entre simplicité et exploration.
ANDY MOOR : Oui, c’est vrai mais l’addition de lignes simples peut produire quelque chose de compliqué parce que nous sommes cinq à travailler simultanément. Et la façon dont ça se verrouille à la fin peut parfois générer de très étranges discours polyrythmiques, puisque ce n’est pas composé par une seule personne. Ce sont toutes nos idées dans un même poème. Et c’est, c’est ce qui rend cela si excitant.
PAN M 360 : Le programme de cette soirée de dimanche annonce aussi un duo avec Damon Locks.
ANDY MOOR : En fait, je joue en solo mais nous allons aussi procéder à une sorte de collaboration. Je connais Damon depuis les années 90, nous avons fait ensemble une tournée avec un groupe qui s’appelait Trenchmouth, Damon Locks en était le chanteur.
PAN M 360 : La suite ce soir!