MUTEK, Nocturne 1 – Nicola Cruz : au diable l’exotisme!

Entrevue réalisée par Alain Brunet

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L’Équatorien Nicola Cruz a construit sa réputation en s’imposant parmi les pionniers de la musique électronique de pointe en Amérique latine, notamment en intégrant à ses créations  des fragments de musiques populaires locales, andines, autochtones, afro-latines, tropicalistes, à une esthétique électronique des plus raffinées. 

On lui connaît plusieurs enregistrements, dont Sentimientos Encotrados (automne 2021) et le tout frais EP Self Oscillation (été 2022). Habitué de MUTEK, Nicola Cruz revient y proposer du nouveau matériel au lendemain d’un DJ set partiellement sous la pluie  à l’Esplanade tranquille. Ce moment trop humide de la série Expérience fait désormais partie du passé, place au plat de résistance ! Nicola Cruz se produit ce mercredi à la SAT, il est l’artiste central de ce premier programme de la série Nocturne.

PAN M 360 : Nous savons que Nicola Cruz est proche de ses racines latino-américaines et a le regard rivé vers l’avenir. Bien sûr, cette description est réductrice et ne nous indique pas où vous en êtes. Où en êtes-vous depuis votre passage à MUTEK à l’été 2019?

NICOLA CRUZ : Je suis toujours en train d’essayer de nouveaux concepts, d’essayer de faire évoluer mon son et mes curiosités, et ne pas toujours m’en tenir à une seule chose. Donc l’exploration de l’instrumentation traditionnelle et autres aspects de la culture équatorienne représentent une phase antérieure de mon travail. Aujourd’hui, je pense aller vers une synthèse de mes connaissances acquises, vers l’exploration du son à un niveau plus profond, tout en gardant cette idée de ritualiser mon travail en studio et, par conséquent, de ritualiser ma composition.  

PAN M 360 : Et comment s’incarne cette ritualisation?

NICOLA CRUZ :  J’essaie de chercher un exemple précis, mais le set de mercredi sera un peu plus explicatif que les mots qui sortent de ma bouche en ce moment. Il y a des strucutures composées et il y a aussi de l’improvisation comme il y en a toujours dans mes set live.

PAN M 360 : Si on essaie de comprendre, vous puisez dans votre entière banque de sons et vous en proposez de nouveaux parmi cette cueillette, pour ainsi suggérer de  nouvelles façons d’exprimer votre art.

NICOLA CRUZ :  Exactement. Quand tu fais de la musique électronique, ce n’est pas comme prendre une guitare, tu dois puiser dans un ensemble de trucs. C’est vrai. C’est la partie créative et intéressante de la présentation de la musique électronique, non? Alors bien sûr, je laisse toujours un espace pour l’improvisation, que ce soit avec le modulaire, avec une boîte à rythmes, avec un synthétiseur ou autre instrument. Mais il y a aussi cette part de la musique qui résulte du travail en studio et de la programmation, question de choisir la direction d’une pièce. 

En ce moment, par exemple, j’envisage de commencer un nouvel album qui sortira l’année prochaine. Donc je ne présente pas un certain concept et je ne tourne pas la musique de l’album. En fait, je ne fais jamais de tournée pour présenter la matière d’un album, car je suis toujours  en train de transformer mon spectacle en temps réel.

PAN M 360 : Oui effectivement, vous changez souvent de son et c’est ce qui rend votre musique intéressante et créative. On a entendu vos intégrations de musiques indigènes d’Amérique centrale ou d’Amérique du Sud, surtout mais, comme vous le suggérez, cela ne représente pas un objectif en soi. Parfois cette composante est présente, parfois elle ne l’est pas.  

NICOLA CRUZ : Effectivement. Éviter les clichés sur les éléments culturels/stylistiques de ma musique en tant qu’objectif ou concept, c’est très important pour moi. Il ne faut pas abuser des concepts, il faut que rien ne soit évident ou redondant. 

PAN M 360 : Oui, seul compte le résultat. Le définir sur la base des origines culturelles et trop intellectualiser peut être un piège. On peut y chercher des racines là où elles ne sont pas…

NICOLA CRUZ : Exactement. Vous savez, je pense que c’est aussi la faute des médias occidentaux en quête d’exotisme, qui cherchent trop souvent à illustrer ce cliché des racines latines dans mon travail. Voilà une approche colonialiste en ce qui me concerne. Même si j’ai inclus beaucoup de musiques et instruments traditionnels dans ma musique, je ne me suis jamais senti identifié à cette idée d’étaler consciemment mes racines.

PAN M 360 : Ça vient naturellement, ça vient souvent de l’inconscient et on ne doit pas en beurrer davantage, échafauder de fausses théories.  

NICOLA CRUZ : Je suis totalement d’accord. Personnellement, j’ai toujours fait de la techno et de la house avant même de composer et de m’intéresser aux breakbeats et d’exploiter vraiment la musique électronique dans ses subtilités technologiques. J’ai donc l’impression que la vie me mène quelque part par là, pendant que j’explore ma musique et ses ses racines tout en tirant parti de la puissance de la technologie. Aussi, je n’ai jamais eu peur d’utiliser des mélodies, mes dernières compositions sont très mélodiques et je m’intéresse aussi au psychédélisme pour ajouter une nouvelle saveur et ainsi aller plus loin.

PAN M 360 : Et ce mercredi? 

NICOLA CRUZ :  Je me produis avec un artiste vidéo de New York. Il n’y a pas de concept spécifique, je suis là pour présenter mon nouveau flux créatif, je ne peux en dire davantage. Bien sûr, il y aura plein de nouveaux sons, dont certains seront créés en direct. Je pense qu’en termes de sons, mon travail est devenu très détaillé et très expressif. En fait, j’aime bien ce que je suis musicalement aujourd’hui. J’ai l’impression de transmettre beaucoup de choses, c’est assez émotionnel et aussi très dansant.

PAN M 360 : Le devoir de faire danser les gens peut-il constituer un problème?

NICOLA CRUZ : C’est variable mais ça demeure volontaire lorsque je le fais. Je veux encore faire de la musique de danse, j’ai été DJ et je le demeure. Donc, ce que je présente actuellement est propice à la danse. C’est aussi une sorte de reconnexion avec ce que j’ai commencé avec la musique électronique qui était la techno et la house, ce qui demeure un territoire très intéressant. 

NICOLA CRUZ SE PRODUIT CE MERCREDI À LA SAT, SÉRIE NOCTURNE 1 DANS LE CONTEXTE DE MUTEK MONTRÉAL. POUR VOS PLACES, C’EST ICI.

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