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Alors que la durée des jours recommencent à peine à augmenter graduellement, le Taverne Tour revient du 8 au 10 février 2024 avec une nouvelle édition qui s’annonce haute en couleur pour célébrer la vie nocturne du Plateau Mont Royal. Pour illuminer le cœur de notre hiver et satisfaire les oreilles curieuses, le festival présente plus de 70 artistes locaux et internationaux, allant du rock, à l’électro, en passant par le hip-hop, le country, la folk, le punk ou le post-punk. En partenariat avec PAN M 360, l’artiste montréalaise Laurence-Anne se produira à L’Esco le 8 février, avant de s’envoler vers le Mexique pour une tournée de cinq dates à la fin du mois.
Prenant la forme d’un alliage dream/art/synthpop laissant déborder au passage des influences coldwave et expérimentales, son dernier album Oniromancie, sortie sur Bonsound à l’automne dernier, retrace le cheminement d’une artiste qui a longuement contemplé les mirages de la nuit. Grande fan de David Lynch et des Cocteau Twins, sa musique crée des nappes sonores oniriques et généreuses afin de guider ses auditeurs à travers des passages étroits et ainsi protéger leur cœurs des apparitions qui les hantent. La nuit étant loin d’être toujours clémente, Laurence-Anne s’inspire aussi bien de la douceur de ses rêveries que du côté plus dense et obscur des frayeurs de ses cauchemars paralysants. Dans les profondeurs, la présence angoissante d’une entité fantasmagorique qui essayait de lui parler, s’est finalement avérée bienfaisante.
PAN M 360 s’est entretenu avec Laurence-Anne pour retracer son parcours artistique qui oscille constamment entre le réel et la fiction.
PAN M 360 : Je voudrais d’abord revenir sur les premiers pas de ton cheminement artistique. On connaît tes débuts en tant que finaliste des Francouvertes de 2017 ou à travers ton parcours en tant que choriste pour Klô Pelgag, aux côtés de N NAO et de Lysandre. Ton premier album Première Apparition a atterri en 2019 sur la longue liste du prix Polaris. Quand as-tu commencé à faire de la musique exactement?
Laurence-Anne : J’ai commencé à chanter quand j’étais enfant. J’ai fait mes premiers spectacles de chant aux primaires par passion, sans prendre de cours ou de formation. Durant mon secondaire, j’ai commencé à jouer de la guitare et à composer des chansons. L’affaire est devenue plus sérieuse à Montréal en rencontrant d’autres musiciens. De fil en aiguille, j’ai commencé à faire des arrangements avec mes chansons et à être accompagnée par un groupe. Mais la musique a finalement été toujours présente.
PAN M 360 : Quand as-tu déménagé à Montréal?
Laurence-Anne : Je suis arrivée en 2012. Après mon secondaire, je suis partie faire une année sabbatique au Mexique et je suis ensuite venue étudier au CÉGEP en sciences humaines à Montréal. C’était aussi pour moi l’occasion de rencontrer d’autres personnes qui jouaient de la musique. En déménageant sur le Plateau, j’ai commencé à me tenir au Quai des Brumes et à l’Esco, où j’ai pu rencontrer d’autres musiciens.
PAN M 360 : Tu joues d’ailleurs le 8 février prochain à l’Esco dans le cadre du Taverne Tour. J’imagine que pour toi, c’est comme un peu jouer à la maison
Laurence-Anne : Oui, ça fait longtemps que je n’ai pas joué à l’Esco. C’est un peu là où tout commence. J’ai fait un de mes premiers spectacles à l’ancien Esco, à l’époque où le bar était encore tout petit. J’ai hâte de jouer à la maison. Je vous réserve des surprises.
PAN M 360 : Tes albums Musivision et Oniromancie ont été composés loin de la ville, à la campagne, durant des escapades en chalet. Est ce important pour toi de sortir de la ville pour écrire de la musique?
Laurence-Anne : Oui, ça permet de créer une bulle créative. J’ai besoin de me déconnecter pour pouvoir me concentrer sur la création. Il y a trop de distractions dans la vie quotidienne. Durant l’année, il n’y a pas énormément de moments où je vais me sentir créative. Mais à partir du moment où je vais décider de m’isoler toute seule quelque part avec mes instruments, je peux perdre la notion du temps sans que rien ne puisse me faire sortir de cette bulle créatrice. C’est vraiment dans ces moments là que j’arrive à composer sans limite et à créer un album au complet en une semaine!
PAN M 360 : Tu es originaire de Kamouraska, une petite municipalité de 700 habitants, située sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent. Peux-tu nous parler de l’environnement dans lequel tu as grandi
Laurence-Anne : C’est un coin assez campagnard dans la région du Bas-Saint-Laurent basé sur l’agriculture. Il n’y a pas de grande ville aux alentours, j’ai grandi entouré de champs, à Saint-Pascal de Kamouraska plus précisément. C’est un coin rural qui est un peu plus dans les terres. De chez mes parents, on avait une vue sur le fleuve et sur la Côte-Nord.
PAN M 360 : Tu te considères comme une multi-instrumentiste autodidacte (guitare, percussion, basse, synthétiseur). Tu dis avoir trouvé plus de liberté avec le synthétiseur. Qu’est ce que tu as découvert avec le synthétiseur que tu ne trouvais pas avec les autres instruments?
Laurence-Anne : J’aime la panoplie de sons, de tons et de textures que tu peux aller chercher avec un synthétiseur. Il n’y a pas de limite finalement. Avec une guitare, tu peux ajouter des pédales d’effets bien sûr, mais ce travail là est plus facile à faire sur un synthétiseur. Quand tu n’as pas de connaissance musicale, c’est peut être plus facile de trouver des accords ou des sons qu’avec une guitare. Le monde des synthétiseurs m’a vraiment aidée à pousser ma créativité plus loin, je sens que je peux plus me laisser aller.
PAN M 360 : Ton processus artistique est basé sur l’écriture automatique. Peux-tu nous expliquer comment tu utilises cette technique un peu particulière
Laurence-Anne : Beaucoup d’artistes appellent ça leur “yogourt” (rire). Dans le sens où, lorsque tu composes une mélodie, il y a des mots qui apparaissent spontanément. Si tu laisses aller ces bribes d’idées en boucle, quelque chose peut commencer à surgir de soi-même. Quand j’écris une chanson, je ne pense pas à un sujet en particulier. C’est en créant ce “yogourt” que je peux comprendre ce dont j’ai envie de parler. Je laisse apparaître le sujet au lieu de le réfléchir.
PAN M 360 : Dans ton processus créatif, tu accordes beaucoup d’importance aux rêves, que tu considères comme une porte d’accès à ton subconscient, tes angoisses, tes désirs ou tes idéaux. L’oniromancie est d’ailleurs un art divinatoire qui consiste à noter ses rêves dans un carnet. Comment as tu commencé cette pratique?
Laurence-Anne : Les rêves ont toujours été une source d’inspiration pour ma musique. Au départ, j’utilisais ces thématiques là de façon inconsciente. J’ai toujours eu tendance à créer une poésie tournée vers un imaginaire abstrait plutôt qu’une réalité tangible. J’ai toujours aimé cette liberté de créer des paysages qui n’existent pas ou de créer des images qui te sortent de la réalité. A travers mon travail, j’ai remarqué qu’il y avait des thèmes récurrents qui revenaient, comme la nuit, l’espace, le sentiment de quelque chose de plus grand que nous qu’on ne peut pas comprendre. Dans Oniromancie, je me suis beaucoup plus concentrée sur ce que les rêves m’apportaient. C’est un univers indéfinissable où les possibilités sont sans limite. J’aime puiser dans cette source infinie d’inspiration.
PAN M 360 : Au-delà de ton activité artistique, est ce que c’est quelque chose qui te sert dans ta vie privée?
Laurence-Anne : Oui, notamment lorsque j’ai des rêves récurrents. A force de revivre les mêmes situations, j’ai commencé à me poser des questions. Ça m’a amenée à réaliser certaines choses qui se reflétaient dans ma vie et à faire des changements. C’est comme une sorte de grande connexion que tu peux avoir avec toi-même, lorsque tu arrives à avoir cette ouverture d’esprit là. Ça se présente souvent comme des messages sur des choses que tu ne réalises pas. C’est juste devant toi, mais tu n’arrives pas à les assimiler. Avec les rêves, les choses deviennent soudainement plus claires. Je crois que c’est important de les écouter.
PAN M 360 : Tes vidéos permettent de mieux comprendre ton univers onirique. Elles sont absolument merveilleuses et soignées, on te retrouve toujours dans de beaux costumes, dans une ambiance cocoon, un peu comme si on entrait dans ta bulle. Tes pochettes d’albums sont également très soignées. La pochette de Musivision, créée par l’artiste montréalais Aeforia (Alexy Préfontaine), donne l’impression de tomber dans un labyrinthe sans fin. Celle d’Oniromancie, tirée d’une série de l’artiste bulgare Mia Novakova, me rappelle l’atmosphère onirique du film La Belle et le bête de Jean Cocteau. Est ce que c’est important pour toi de développer cet univers visuel là?
Laurence-Anne : Je pense que c’est important d’avoir des visuels qui aillent avec la musique pour la partager sur les réseaux ou sur Youtube. Quand tu fais de la musique dream-pop éthérée, je crois que c’est d’autant plus important. Ça donne une autre dimension à la musique pour permettre au public de s’absorber dans cet univers-là.
PAN M 360 : Dans ta chanson Indigo de l’album Musivision, tu dis qu’il s’agit de ta couleur préférée de l’arc en ciel. Pourquoi
Laurence-Anne : J’adore les palettes de couleurs mauves foncées! Je suis quelqu’un de très nocturne. La couleur indigo me fait penser à la couleur d’un ciel étoilé, quand tu te promènes loin dans la forêt et qu’il n’y a aucune pollution lumineuse. C’est pour moi la couleur de la nuit par excellence.
Laurence-Anne se produira le 8 février prochain à l’Esco dans le cadre du festival Taverne Tour avec Sun Entire.