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Mishka Stein est un bassiste montréalais recherché. Alors qu’il accompagnait le créateur de pop de chambre Patrick Watson en Europe, la COVID-19 est venue écourter la tournée. Coincé en quarantaine, Mishka s’est mis à créer de nouvelles pièces.
Il fit parvenir quelques-unes de ses esquisses sonores au producteur montréalais Sam Woywitka, renommé pour son travail auprès de TEKE::TEKE, formation dont fait partie Mishka Stein, ainsi que Half Moon Run et DJ Khalil (qui a notamment collaboré avec Dr. Dre, Anderson .Paak et Kendrick Lamar). Sam et Mishka convinrent ensuite de lancer FHANG, un projet mordant et expérimental, dont la musique comporte des rythmes complexes, des mélodies denses à tendance néo-psychédélique, ainsi que des textures et nappes sonores hallucinogènes.
En résulte un album homonyme dont aucune des pièces n’est semblable. Stanza Fresca, la première, réconforte l’auditeur avec ses synthés, tandis que Vaudevillain et Many Moons (feat. TiRon & Ayomari) sont judicieusement infusées de hip-hop. L’époustouflante King Blame, quant à elle, évoque une version du Lust for Life d’Iggy Pop remixée dans une lugubre discothèque allemande.
Les deux membres de FHANG ont abordé plusieurs sujets avec PAN M 360 : la confection des diverses sonorités de leur premier album; les clips qu’ils ont eux-mêmes réalisés; « Hidden Ship », la nouvelle étiquette de Sam Woywitka; puis la répétition des chansons en vue d’une prestation au Festival de musique émergente, dans quelques jours.
PAN M 360 : Certains critiques vous mettent dans la case « rock psychédélique ». Or, ce n’est qu’une des caractéristiques de votre son, qui comprend une foule d’autres éléments. Un peu de hip-hop, de la new wave, du rock indé, du post-punk…
Sam Woywitka : C’est vrai. On figure aussi dans les palmarès électro, entre autres. « FHANG, ce nouveau groupe électro », ou alors « cette nouvelle formation kraut-rock », ou dark-wave… On nous met dans toutes sortes de catégories.
Mishka Stein : En fait, on veut prendre le contrôle de Spotify! (rires)
PAN M 360 : Saviez-vous, au départ, ce que serait le son de FHANG?
Mishka Stein : Je dirais que la découverte du son revient à Sam. Je tentais de créer des musiques à l’aide du logiciel Ableton, tout en sachant que Sam modifierait mes ébauches merdiques au synthé. Je savais qu’il les améliorerait pas mal, qu’il les étofferait beaucoup. Beaucoup de mes projets étaient très décharnés. J’ai mis l’accent sur la performance, pas tellement sur la production.
PAN M 360 : Donc, c’est Sam qui a conçu la sonorité des chansons, en studio?
Sam Woywitka : Oui, j’ai parfois l’impression de faire des casse-tête, j’assemble les pièces. Lorsque je tiens une mélodie ou un riff qui m’inspirent, je m’en sers pour modeler une expérience. Avoir accès à ça me suffit, sans doute.
PAN M 360: Vous avez réalisé des clips, dont un pour King Blame. On pourrait le décrire comme un trip de drogue en solitaire. Ça ressemble à un film de David Lynch, avec la tête de lapin et tout ça.
Sam Woywitka: Merci! C’est sûr qu’il nous a influencés. Au début de la chanson, je joue de la guitare et il y a une boucle rythmique, puis je chante le refrain « I am the King of Blame » et ça ressemble vraiment à de l’angoisse adolescente, non?
PAN M 360 : Est-ce que l’idée du clip et de la chanson provient d’une expérience personnelle?
Sam Woywitka : En fait, lorsque je prenais beaucoup de drogues, j’avais l’impression que personne ne m’aimait, qu’on me faisait constamment des reproches. Quand on se regarde dans le miroir en pleine séance hallucinatoire, on ne se reconnaît même pas. C’est vraiment terrifiant. Dans ce clip, on devait faire du skateboard et s’éclater. Le jour du tournage, toutefois, je suis entré dans un magasin de costumes et j’ai vu ce masque de lapin complètement fêlé. Nous voulions des séquences de skateboard au lever du soleil, puis j’ai demandé à mon pote Issac de mettre le masque de lapin durant ces scènes. Voilà d’où ça vient.
PAN M 360 : C’est fou, tout ça est devenu le point central du clip.
Sam Woywitka : Tout à fait. Qu’est-ce que Mishka a dit, déjà? Ah oui : « Parfois, notre bête noire est un lapin »!
PAN M 360 : Vous avez créé l’étiquette Hidden Ship, récemment. Est-ce que c’était expressément pour lancer l’album de FHANG?
Sam Woywitka : Ça nous a indubitablement incités à accomplir tout ça, à nous y mettre pour vrai. Je suis très emballé par ce que l’avenir nous réserve. J’ai tellement d’amis et d’artistes talentueux, qui seraient beaucoup mieux représentés par une petite étiquette qui se soucie davantage de leur musique.
PAN M 360 : Donc, ce ne sera pas que pour les parutions de FHANG? Songez-vous à des artistes?
Sam Woywitka : J’aimerais qu’on fasse des séances de création musicale ou d’écriture, où nous ferions de super chansons avec des musiciens pétés! Nous aurions une étiquette pour publier tout ça, au lieu que ça s’égare dans la discographie d’un artiste. Peut-être pourrions-nous faire des productions et des collaborations stimulantes, en studio, puis lancer un album « Hidden Ship ». J’ai travaillé à L.A. avec DJ Khalil, et son studio fonctionnait comme ça. Des musiciens qui jouaient dans tous les sens et Khalil qui dirigeait la circulation. Puis, des extraits étaient ensuite utilisés par Jay Z ou Kanye West, par exemple.
PAN M 360 : Y a-t-il des artistes dont vous vous êtes conjointement inspirés, pour cet album?
Mishka Stein : Je crois que c’est la pandémie qui nous a le plus inspirés. Elle a tellement influé sur toutes les émotions que nous avons vécues. Ce crétin de Trump et la COVID et toutes ces saloperies. Les premiers mois ont déclenché des réactions… primales.
PAN M 360 : Est-ce que le nom du groupe vient de là? (note du traducteur : « FHANG » – normalement épelé « fang » – signifie « croc »)
Mishka Stein : Oui, je crois. FHANG, ce sont les crocs d’un loup, c’est lié à la survie; c’est ce que nous ressentions, au cours des derniers mois.
PAN M 360 : Comment ces chansons seront-elles rendues, en concert? Vous formez un duo, vous devrez donc faire valoir vos talents de multi-instrumentistes?
Mishka Stein : Ce sera fou! Sam’s s’occupe de tous les synthés modulaires, du chant et de la batterie. J’aurai un synthé devant moi, des pédales pour les notes basses, et une guitare-basse à double manche. Il va donc falloir qu’on se prépare bien pour être à l’aise.
Sam Woywitka : On passe constamment d’un instrument à un autre. Ce seront des concerts-pieuvres.