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Jean-Guihen Queyras est le premier nom qui vient à l’esprit lorsqu’on parle de violoncelle top niveau en France. Né au Québec, il est parti en France en très bas âge, mais a toujours nourri un lien privilégié avec la communauté de la musique classique québécoise, en témoignent ses fréquents passages et affinités avec plusieurs artistes d’ici, à commencer par Yannick Nézet-Séguin et son collègue Stéphane Tétreault avec qui il partage ce programme à la Salle Bourgie, deux soirs d’affilée cette semaine.
D’abord connu pour son rôle de soliste au sein de l’Ensemble Intercontemporain, Jean-Guihen Queyras a été marqué par l’approche de feu Pierre Boulez, une des figures marquantes de la musique contemporaine au siècle précédent. Jean-Guihen Queyras n’est pas un pur et dur de la musique contemporaine pour autant, ce virtuose éclectique aime approfondir tout le répertoire écrit pour son instrument, du baroque à aujourd’hui. Il compte une quarantaine d’enregistrements depuis 1994, c’est dire l’envergure de sa carrière.
Son profil biographique nous indique qu’il a créé des œuvres d’Ivan Fedele, Gilbert Amy et Tristan Murail, qu’il a enregistré le Concerto pour violoncelle de Peter Eötvös à l’occasion du 70e anniversaire du compositeur. Qu’il joue de nombreuses œuvres pour musique de chambre. Qu’il a formé un trio de haute volée avec la violoniste Isabelle Faust et le pianiste Alexander Melnikov. Qu’il a fondé le quatuor à cordes Arcanto avec Tabea Zimmermann, Antje Weithaas et Daniel Sepec. Qu’il est régulièrement accompagné en récital par le pianiste Alexandre Tharaud.
Et l’on ne compte pas ses nombreuses invitations chez les orchestres symphoniques, dont l’Orchestre de Philadelphie, l’Orchestre de la Radio de Bavière, l’Orchestre de chambre Mahler, l’Orchestre de Paris, et l’Orchestre symphonique de Tokyo, Orchestre Philharmonia, l’Orchestre symphonique de Londres, et des chefs aussi en vue qu’Iván Fischer, Philippe Herreweghe et, bien sûr, Yannick Nézet-Séguin.
Jean-Guihen Queyras enseigne à la Hochschüle für Musik de Fribourg et il est directeur musical des Rencontres musicales de Haute-Provence à Folcalquier. Depuis 2005, il joue sur un violoncelle fabriqué en 1696 par Gioff redo Cappa, aimablement mis à sa disposition par le Mécénat musical de la Société Générale.
Tout aussi aimablement, Jean-Guihen Queyras répond aux questions de PAN M 360 dans le contexte de son passage sur scène à Montréal.
PAN M 360 : Parlons d’abord des œuvres dont vous serez le soliste à la Salle Bourgie :
Ahmet ADNAN SAYGUN Partita pour violoncelle seul, op. 31
BRITTEN Suite no 1 en sol majeur pour violoncelle, op. 72
J. S. BACH Suite no 1 en sol majeur pour violoncelle seul, BWV 1007
Programme très varié ! Pourriez-vous, SVP commenter ces choix et votre approche en ce sens ? Comment mettre ces œuvres en relation ?
Jean-Guihen Queyras : La Partita de Saygun est une oeuvre splendide qui mérite d’être connue mondialement! Elle seule vaut déjà le déplacement! Elle allie avec fougue et profondeur le folklore turc et des couleurs françaises qui témoignent des études de Saygun à Paris.
La première Suite de Britten est un chef-d’œuvre écrit pour Rostropovitch, inspiré directement de la Première Suite de Bach que je jouerai dans la foulée.
PAN M 360 : À ce stade de votre brillante carrière, quels sont les enjeux principaux de votre jeu ? Aujourd’hui, que cherchez-vous à développer en tant qu’instrumentiste, artiste, soliste ? Autres intérêts marqués ?
Jean-Guihen Queyras : Je continue à laisser les rencontres artistiques me guider, et c’est de plus en plus passionnant! Travailler intensément avec A.T. de Keersmaeker fut tellement inspirant! Et puis j’aime choyer et développer les collaborations avec de grands artistes, amis de toujours, Isabelle Faust, Tabea Zimmermann, Raphaël Imbert (avec qui nous avons dans les tuyaux un projet d’enregistrement Jazz), Sokratis Sinopoulos et les frères Chemirani (nouvel épisode “Beyond Thrace”)…
PAN M 360 : Quels ont été les plus beaux défis artistiques de la période pandémie et ce qui suit ? Rencontres ? Enregistrements ? By the way, j’écris ces questions tout en écoutant le Don Quixote. Till Eulenspiegel de Richard Strauss. Super.
Jean-Guihen Queyras : Ravi que Don Quichotte vous plaise! Quelle chance d’enregistrer ce chef-d’œuvre avec ma chère Tabea Zimmermann et l’extraordinaire François-Xavier Roth!!!
J’ai profité de la pandémie pour créer une série d’ateliers en ligne autour des Suites de Bach. Je compte lui donner une suite dans les mois qui viennent, la transmission me passionnant de plus en plus.
PAN M 360 : Votre lien avec Montréal se poursuit donc de plus belle! Que peut-on savoir de votre relation musicale et professionnelle avec votre collègue québécois Stéphane Tétreault ? Quelles sont les circonstances ayant mené à cette collaboration ?
Jean-Guihen Queyras : Il y a déjà de nombreuses années que j’admire le parcours artistique de Stéphane. J’ai voulu en lui proposant de me rejoindre ajouter un lien supplémentaire intergénérationnel d’une part, et affectif et quasi-familial aussi, vu l’importance émotionnelle qu’ont pour moi mes racines Québécoises.
PAN M 360 : Puisque nous y sommes, quels seront vos commentaires sur le choix des deux œuvres où vous serez tous deux impliqués, ainsi que l’approche souhaitée dans ce contexte ?
BARRIÈRE Sonate à deux violoncelles en sol majeur, op. 4 nº 4
OFFENBACH Duo pour deux violoncelles en si bémol majeur, op. 53 nº 1
Jean-Guihen Queyras : Deux oeuvres pleines de fraîcheur et de joie qu’ont les violoncellistes de jouer ensemble, le partage étant la raison-d’être même de la musique !
PAN M 360 : Que représente l’expérience d’une supplémentaire d’un même programme ? Occasion de renouvellement ? Relecture différente ? Meilleure compréhension de l’œuvre ?
Jean-Guihen Queyras : Chaque concert supplémentaire nous permet d’approfondir le lien avec une oeuvre, profitons-en!
PAN M 360 : Après l’escale montréalaise, quels sont vos prochains projets ?
Jean-Guihen Queyras : Orchestre Residentie de La Haye (Variations Rococo de Tchaïkovski), puis le concerto de Dutilleux “Tout un Monde Lointain…” avec l’Orchestre de Paris et leur tout jeune formidable chef Klaus Maekele…Je m’arrête là, mais les prochains mois sont intenses et passionnants!