Après un court hommage à sa maman Natalie Choquette en début de spectacle, Florence K nous plonge directement dans l’univers du grand maître de la bossa nova, Antônio Carlos Jobim, accompagnée par son excellent guitariste et compositeur Carlos Jimenez, récemment Docteur en musique.
Dès le premier morceau, Água de Beber l’atmosphère dans la salle se détend, elle joue quelques notes au piano et fait même chanter le public qui est familier avec ce classique.
« J’ai toujours peur d’être démasquée dans mon complexe en parlant portugais, un peu comme le syndrome de l’imposteur », nous avoue-t-elle entre deux chansons, en citant Freud.
En effet, elle fait plusieurs allusions à la psychologie durant le spectacle, (ses études de doctorat en psychologie y sont sûrement pour quelque chose) mais elle prend également le temps d’expliquer le contexte de chaque chanson, avec une touche d’humour très appréciée du public. C’est ce qu’elle fait avec Vivo sonhando ou encore Desafinado, deux classiques de Jobim. Elle échange également avec son guitariste à plusieurs reprises, l’invitant à se dévoiler à son tour, mais sans succès.
Faisant un effort pour ne pas croiser les jambes durant le show, c’est surtout lorsqu’elle joue du piano qu’elle semble complètement dans son élément. Elle ferme les yeux, chante parfois par-dessus ses notes, et se laisse aller.
Elle échange également avec son mari, qui était dans la salle, dans un anglais impeccable, l’incluant dans le spectacle, toujours avec la même touche d’humour. « Quand tu m’as rencontré, savais-tu que tu allais souffrir toute ta vie ? », lui demande-t-elle, avant d’introduire le morceau Eu sei que vou te Amar.
Dressant un portrait de la bossa nova des années 60, elle semble avoir fait beaucoup de recherche en préparant l’album « Brésil mon amour » paru en 2023, nous apprenant d’ailleurs que Bossa Nova signifie « Nouvelle vague ». Elle poursuit avec Chega de saudade et Só Danço Samba, toujours avec des passages au piano remplis d’émission. « Pendant mes 20 ans de carrière, je n’utilisais jamais de lutrin mais là, ma charge mentale est telle que je n’ai plus d’espace pour retenir toutes les chansons par cœur », nous confie-t-elle. Cela dit, cela n’enlève en rien à la justesse de sa voix soyeuse, ni à l’émotion qu’elle transmet à la salle.
Un moment fort du spectacle était lors de la chanson La quiero a Morir, une demande spéciale faite par un spectateur pour sa femme. La chanson était loin d’être parfaite étant donné les circonstances mais c’est justement cela qui a plu à l’audience. Cette authenticité. Elle a d’ailleurs suggéré à son mari de faire la même chose que ce monsieur lors du prochain concert de Paul McCartney, suivis d’éclats de rire dans la salle.
Ses morceaux en espagnol ont beaucoup plu au public, notamment à mon amie colombienne avec qui j’étais, et qui ne s’attendait pas à entendre des classiques tels que Lagrimas negras, entre autres. On a parfois l’impression qu’elle chuchote dans le micro, donnant l’impression qu’un voile entoure sa voix.
Triste de ne pas avoir de « Charles » dans la salle, avant le morceau Take it easy my brother Charles, elle prend le temps de remercier Nick Petrowski qui a réalisé l’album et qui a eu l’idée d’inclure ce titre « intrus » dans l’album.
Un autre moment phare était sans aucun doute la participation de sa fille de 18 ans Alice Khoriaty sur deux morceaux : Vol de nuit, écrite lors de la naissance de cette dernière et Águas de Março, que Jobim a chanté avec Elis Regina. Cette complicité mère-fille était palpable et de toute beauté, pendant que Carlos faisait quelques percussions sur sa guitare, tout en jouant. C’est donc un spectacle de famille auquel nous avons eu droit en cette soirée d’automne.
Elle ne pouvait pas terminer la soirée sans chanter Garota de Ipanema, que toute la salle connaissait, surtout les Brésiliens qui étaient en face de la scène. J’ai d’ailleurs aperçu la grande chanteuse brésilienne Bïa dans la salle, ainsi que l’équipe derrière l’organisation des Journées brésiliennes.
« Après 20 ans de carrière, ça fait plaisir de savoir qu’on a encore des gens qui se déplacent pour venir me voir sur scène », conclut-elle avec gratitude.