Réalisatrice et musicienne du groupe de Santiago Föllakzoid, Domingæ se lance sur ce premier projet solo dans une démarche de transmutation intérieure futuriste réalisée lors d’une série d’explorations électroniques entre le drone, la techno et la trance. Dérivé du mot allemand Feuerzeug, Föllakzoid donnait à travers ses quatre albums une sorte de réponse à l’écho kosmische des groupes krautrock des années 70 (CAN, Tangerine Dream, Kraftwerk, Manuel Göttsching et son album proto-techno E2-E4) et des artistes de la scène trance des raves berlinoises des années 90 (The Visions of Shiva, Dance 2 Trance, Cosmic Baby, L.S.G.). En traversant l’océan Atlantique, les ondes gravitationnelles de ces cohortes d’artistes allemands semblent avoir éveillé les esprits ancestraux de la cordillère des Andes en Domingæ, résidante de Mexico. Paru en 2019 sur Sacred Bones, leur dernier album I, produit par ATOM ™, offrait un voyage énigmatique et vertigineux à travers l’Ungrund pour “retrouver son maître intérieur et son intuition”. Partant de ce même postulat, Æ décrit en détails ce processus ascétique sans fin de déconstruction, de désapprentissage et de dissolution des illusions. L’EP, également accompagné d’une vidéo en trois parties réalisée par Domingæ, développe en profondeur l’aspect poétique et scientifique de ses réflexions métaphysiques sur le cycle de la conscience, de sa mortification à son ascension digitale. Inspirée par l’atmosphère spirituelle rétro-futuriste d’une minka (maison traditionnelle japonaise qui signifie “maison du peuple”), l’artiste conçoit des tempos trance issus d’un passé sur le point de disparaître, créant un rythme sinusal qui semble invoquer les battements d’un cœur d’une machine de l’avenir.“Ce ne sont pas les lieux, c’est son cœur qu’on habite” écrivait en 1667 le poète anglais John Milton dans sa fameuse œuvre Le Paradis perdu. Alors que nous nous trouvons aux portes d’un nouveau monde illusoire, si le paradis n’est pas un lieu mais plutôt un état de conscience comme nous le suggère Æ, ce ne sera pas la réalité numérique mais bien le cœur de nos futurs avatars biotechnologiques qu’il faudra continuer d’habiter.
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