Décidément, M. Sorey n’est pas très porté sur les titres, à part ceux qu’il donne à ses albums. Après Pillars et Invisible Ritual, Unfiltered est en effet le troisième d’affilée dont les pièces ne portent pour tout titre que le chiffre de leur ordre d’apparition. Mais bon, il s’agit d’un détail, l’important, c’est la musique. Et quelle musique!
Si l’on prend les enregistrements jazz à son nom, Unfiltered est son premier en sextet, faisant suite à quelques albums en trio. Il y est entouré de cinq jeunes musiciens triés sur le volet. Sorey privilégie les morceaux au long cours, et c’est à nouveau le cas ici. Trois pièces qui s’enchaînent de façon ininterrompue et font plus de deux heures, ce qui permet de maintenir la tension tout du long, un peu comme si c’était un long métrage, et tout du long la cohésion de l’ensemble est épatante.
Bien qu’il s’agisse de jazz contemporain relativement classique, où les thèmes et les solos se suivent, il y a sans cesse des « événements » compositionnels qui surviennent et des idées créatives qui sont amenées et maintiennent l’intérêt de l’auditeur au fil des deux heures. Si le band est souvent en feu – avec l’urgence qui monte au fur et à mesure qu’on avance, le niveau d’intensité est parfois stupéfiant, dans la troisième partie particulièrement, et maintenu de longs moments – c’est aussi que Sorey tisonne ferme à la batterie, gardant ses musiciens constamment sur le qui-vive.
Tout comme ces vins que leurs producteurs prennent bien garde de filtrer afin de leur conserver leurs qualités organoleptiques au maximum, cet Unfiltered a beaucoup de corps, d’éclat et de tanins, et il nous en met plein la gueule. Santé!
N. B. : Sur le plan de la diffusion, Sorey fait encore moins de compromis que son collègue Peter Evans. Sur la page Bandcamp de l’album, il n’y a pas même un extrait en écoute libre, et on ne retrouve l’enregistrement sur aucune plateforme d’écoute en continu. Pour plus d’infos sur l’album, on clique ICI.