Širom – The Liquified Throne of Simplicity

· par Luc Marchessault

Pour la petite histoire, Širom est né d’une triangulation : Ana Kravanja et Samo Kutin formaient déjà un duo de kalimba lorsque Iztok Koren, ne sachant pas encore qu’il incarnerait l’angle manquant du trio, s’est pointé à un atelier de confection de balafons. Ils ont improvisé des airs et se sont proposé de jouer ensemble de nouveau. C’était en 2015 et ces trois multi-instrumentistes slovènes, qui planchent concurremment sur une trâlée d’autres projets, ont par la suite créé quatre albums : d’abord I, en 2016, puis trois autres aux titres anglais et biscornus, soit I Can Be a Clay Snapper (2017), A Universe That Roasts Blossoms for a Horse (2019) et, tout récemment, The Liquified Throne of Simplicity (Utekočinjeni prestol preprostih, en slovène).

La musique de Širom a ceci de particulier qu’elle semble issue d’une tradition immémoriale, alors qu’elle regroupe plutôt un tas d’influences et émane, surtout, de l’imagination d’Ana, d’Iztok et de Samo. Ils ont tous trois vu le jour en Slovénie, république indépendante depuis 1991 après avoir été sous domination romaine, byzantine, carolingienne, romaine-germanique, hongroise, vénitienne, illyrienne-française, autrichienne, austro-hongroise et yougoslave. Les trois âmes libres de Širom ne cessent de s’épanouir dans ce petit pays montagneux, car leur curiosité instrumentale est insatiable : à trois, ils jouent notamment de la viole, de la vielle à roue, de l’ocarina, du tempura brač (une sorte de guitare-mandoline tronquée des Balkans), du banjo, de la lyre, du luth, du guembri (luth à trois cordes caractéristique de la musique gnaoua du Maroc), du mizmar (hautbois à anche double du Proche-Orient), ainsi que d’une pléthore de percussions et d’instruments faits main ou d’objets dont ils exploitent le potentiel musical.

On ne s’étonnera guère que les cinq pièces d’Utekočinjeni prestol preprostih soient puissamment évocatrices, dépaysantes et ensorcelantes. Ni que Širom donne des concerts dans des villages, des pâturages ou même une vieille étable. La post-rock médiévale Wilted Superstition Engaged in Copulation défile, pendant vingt minutes, comme une course sur le bord d’un ravin. Grazes, Wrinkles, Drifts into Sleep est un voyage de 16 minutes on ne sait trop où, peut-être dans une contrée vaguement orientale. La dissonante A Bluish Flickering pourrait être la trame sonore d’un séjour dans une grotte. Durant les 18 minutes et 43 secondes de Prods the Fire with a Bone, Rolls over with a Snake, les voix d’Ana et de Samo nous rappellent ce que devaient ressentir nos lointains aïeux il y a quelques millénaires, lors de leurs bivouacs nocturnes en terres inconnues. Puis, Širom nous dit « À une prochaine fois » au moyen de la brève I Unveil a Peppercorn to See It Vanish, une mélopée bluegrass balkanique qui hantera l’humble voyageur-musicophile.

Tout le contenu 360

Avant de s’asseoir seule au piano, Ingrid St-Pierre répond

Avant de s’asseoir seule au piano, Ingrid St-Pierre répond

Virginia MacDonald, étoile montante de la clarinette avec l’ONJM

Virginia MacDonald, étoile montante de la clarinette avec l’ONJM

Lionel Belmondo , Yannick Rieu et l’OSL: jazz symphonique autour de Brahms, Ravel et Boulanger

Lionel Belmondo , Yannick Rieu et l’OSL: jazz symphonique autour de Brahms, Ravel et Boulanger

Louise Forestier et Louis Dufort dans le nid de la Vieille corneille

Louise Forestier et Louis Dufort dans le nid de la Vieille corneille

Université de Montréal : une relève placée sous de bonnes étoiles

Université de Montréal : une relève placée sous de bonnes étoiles

Bon Iver – SABLE, fABLE

Bon Iver – SABLE, fABLE

Stéphanie Boulay – Est-ce que quelqu’un me voit? 

Stéphanie Boulay – Est-ce que quelqu’un me voit? 

Magnifiques Héritières

Magnifiques Héritières

Stéphanie Boulay: album guérison, album reconstruction

Stéphanie Boulay: album guérison, album reconstruction

Joni Void veut que vous « regardiez des films expérimentaux dans le club » ou à La Lumière

Joni Void veut que vous « regardiez des films expérimentaux dans le club » ou à La Lumière

Marcus Printup à l’UdeM : sagesse, générosité, musicalité

Marcus Printup à l’UdeM : sagesse, générosité, musicalité

Pascale Picard replonge dans la création

Pascale Picard replonge dans la création

Dean Wareham – That’s The Price of Loving Me

Dean Wareham – That’s The Price of Loving Me

Pro Musica | Lucas Debargue, libre penseur pianistique

Pro Musica | Lucas Debargue, libre penseur pianistique

Éléonore Lagacé – Brûlez-moi vive

Éléonore Lagacé – Brûlez-moi vive

Pascale Picard – Bigger Kids, Bigger Problems

Pascale Picard – Bigger Kids, Bigger Problems

Laurence Hélie a retrouvé son nom

Laurence Hélie a retrouvé son nom

Le Quatuor Molinari et Berio, ce qu’en dit Olga Ranzenhofer

Le Quatuor Molinari et Berio, ce qu’en dit Olga Ranzenhofer

La déesse tunisienne Emel nous présente MRA

La déesse tunisienne Emel nous présente MRA

« I Feel Pretty, Oh So Pretty » avec Thomas Dunford et Arion Orchestre Baroque

« I Feel Pretty, Oh So Pretty » avec Thomas Dunford et Arion Orchestre Baroque

Shreez – ON FRAP II

Shreez – ON FRAP II

clipping. – Dead Channel Sky

clipping. – Dead Channel Sky

Sacré Gilles Vigneault | Entre Natashquan et Buenos Aires

Sacré Gilles Vigneault | Entre Natashquan et Buenos Aires

Luan Larobina – Casa

Luan Larobina – Casa

Inscrivez-vous à l'infolettre