À l’évidence, Marie Davidson & L’ Œil nu ont fort à faire pour reconstituer à leur guise une image de marque préalablement construite dans les clubs et les festivals de la planète électro où ils triomphent depuis quelques années. D’aucuns semblent déroutés ou carrément démobilisés par Renegade Breakdown, éclatement conceptuel de la Montréalaise et de ses complices vers la pop française, la disco-funk afro-américaine, l’électro-pop anglaise, le krautrock allemand, le space-rock de la Canterbury school, le jazz et plus encore. Aurait-on du mal à piger pourquoi la chanteuse et ses collègues y évacuent sciemment la plupart des fondements technoïdes et housy issus de leurs propositions antérieures ? Chez les uns, cela semble évident à admettre (et à apprécier), alors que chez les autres, perplexité ou même réprobation sont observables. Pourtant, la pop, même la plus audacieuse, n’est-elle pas une grappe stylistique dont le ciment est nul autre que l’auteur-compositeur-interprète au centre du projet ? Dans le cas qui nous occupe, il y aussi ce second degré sous-tendu à l’ensemble de Renegade Breakdown, qui n’est peut-être pas perceptible pour les esprits, disons, plus monolithiques. Encore faut-il rappeler que plusieurs éléments stylistiques de cet album art-pop étaient des matériaux parfaitement identifiables dans les œuvres antérieures de Marie Davidson ou du tandem Essaie Pas qu’elle forme avec Pierre Guerineau, également impliqué dans ce projet à l’instar du multi-instrumentiste Asaël R. Robitaille. Qui plus est, l’exploitation poétique des thèmes de la vulnérabilité, du désenchantement et de la souffrance intérieure crée un contraste intéressant avec cette méta-pop jamais parfaitement bricolée dans les règles qu’on leur connaît. Difficile de prédire le destin de cet enregistrement fort intéressant mais dont le message ne passe pas partout où il devrait normalement passer. Joli brouillage de cartes !
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