Voilà bientôt dix ans que Sonic Youth a suspendu ses activités. Depuis – bien qu’il ait été assez actif sur ce plan du temps de SY –, Lee Ranaldo multiplie les collaborations. On le retrouve ici en compagnie du musicien et réalisateur barcelonais Raül Refree (Raül Fernandez Miro de son vrai nom), qui avait déjà réalisé le très pop-rock Acoustic Dust de son band Lee Ranaldo and The Dust, en 2014, puis coréalisé le plus expérimental Electric Trim, auquel participaient une flopée de musiciens, dont Nels Cline, Alan Licht, Kid Millions et Sharon von Etten paru en 2017. (Refree a également, soit dit en passant, fait l’an dernier, dans la veine folk, un superbe disque avec Richard Youngs : All Hands Around The Moment).
Avec Names of North End Women (le titre fait référence au quartier de Winnipeg dont les noms de rues sont des prénoms féminins), on s’éloigne de l’univers indie-rock pour s’aventurer en territoire moins balisé. C’est en effet à partir de séances d’improvisation que les pièces ont été assemblées et construites. Des paysages sonores composites, clairsemés, mettant à contribution un vieux magnétophone à ruban Studer et un cassettophone trafiqué comme échantillonneurs, avec çà et là des ponctuations électroniques ou noise, une rythmique le plus souvent assurée au marimba ou au vibraphone et la présence occasionnelle de chœurs, servent d’arrière-plan à des textes à la fois abstraits et poétiques, tantôt récités, tantôt chantés, sur des mélodies accrocheuses, en particulier sur Humps (Espriu Mix) et la pièce-titre, qui se transforme en véritable sing-along. Inclassable sommes-nous tentés de dire, et bougrement intéressant.