Lady Blackbird (Marley Munroe au civil), c’est d’abord une voix. Sombre et soyeuse, un rien granuleuse avec ce qu’il faut pour insuffler une vie « qui a vécu » dans des interprétations de chansons viscérales qui vous flattent le sous-cutané efficacement (It’s Not That Easy de Reuben Bell, Blackbird de Nina Simone, Fix It de Bill Evans, Beware of the Stranger de Eugene Dixon, etc.).
Le titre Black Acid Soul laisserait croire à des lectures empruntant au Miles des années 70, ou au courant acid jazz qui a foisonné autour des années 2000. Peut-être même à l’afro-futurisme ou certaines aventures de Nicholas Payton. Mais en vérité, c’est beaucoup plus classique que cela. La voix, fabuleuse, de Lady Blackbird est enveloppée délicatement, mais pas chichement, par les claviers de Deron Johnson et la contrebasse de Johnny Flaugher, c’est à peu près tout. Lady se permet un peu de grandiose vers la fin de l’album, dans Beware The Stranger et Black Acid Soul, qui sont propulsées vers une catharsis édifiante grâce à des chœurs gospelisants pas piqués des vers. L’acide suggéré est dans l’effet de cette musique sur l’auditeur, plutôt que dans des sonorités qui finissent par faire convenu. C’est là la très grande force de cette Lady hors norme et de cet album d’une rare charge émotionnelle.