Kenny Warren est un trompettiste qui a grandi à Denver mais qui fait maintenant partie de la scène jazz new-yorkaise. Comme il n’est pas homme à fréquenter une seule chapelle, il joue également dans Laila and Smitty avec qui il verse dans la chanson americana, dans Nashaz qui fusionne jazz et musique arabes, et le Slavic Soul Party, un ensemble de cuivres dédié à la musique des Balkans. In the Heat est son deuxième disque en tant que leader après un Thank You for Coming to Life sur lequel il était aux commandes d’un quatuor qui jetait un regard neuf sur un jazz d’allégeance post-bop.
La lave solidifiée qu’on voit sur la pochette de l’album nous prévient : cette fois-ci, on s’embarque pour une expédition sur les terres du free jazz incandescent. Le trio que Warren forme avec le contrebassiste Matthias Pichler et le batteur Nathan Ellman-Bell a sûrement pris le temps de bien se préparer avant cette excursion puisque la chimie opère à merveille entre ces trois volcanologues, que ce soit dans les passages d’improvisation pure ou dans les moments plus écrits. La tension qui anime la sombre Brain Phone Wired laissera les amateurs du genre pantois.
Les premiers moments du trajet m’ont rappelé le groupe d’Ornette Coleman, Warren étant un trompettiste dont la sensibilité s’approche de celle de Don Cherry. Puis, pendant le diptyque House Plants/Finally a Breeze, influencé par le travail de Roscoe Mitchell et de l’AACM, Lester Bowie m’est venu à l’esprit. Des comparaisons très flatteuses pour un musicien qui, bien qu’il ne repousse pas encore les limites du genre dans lequel il évolue, brûle d’un feu qui n’est pas près de s’éteindre.