Il y a deux ans, votre humble serviteur s’était pâmé devant Lionheart, premier album en solo de H.C. McEntire, chanteuse des groupes Bellafea et Mount Moriah. Sur ce disque, elle délaissait le son rock boueux de ces deux formations pour se tourner vers une country beaucoup moins sale, ressemblant davantage aux airs qui ont bercé son enfance passée dans la campagne de la Caroline du Nord. Chanter son amour pour une autre femme en ayant recours à cette musique réputée conservatrice ainsi qu’à l’imagerie religieuse qu’on lui avait imposée dans sa jeunesse relevait du tour de force.
Eno Axis tire son titre de la rivière Eno, cours d’eau nord-carolinien au bord duquel Heather McEntire a élu domicile avec sa compagne. C’est d’ailleurs principalement de cela qu’il est question sur ce très beau disque : de la paix retrouvée entre les bras de l’être aimé, dans la beauté tranquille de la nature. Eno Axis est la suite logique de Lionheart dans la mesure où après avoir réglé ses comptes avec les démons de son passé, la chanteuse peut maintenant déposer les armes.
Même si quelques écoutes sont requises pour apprécier cet album à sa juste valeur, la lumière douce qui en émane séduit dès les premières mesures de Hands for the Harvest, superbe premier morceau à l’atmosphère intimiste. Un peu plus tard, un nuage passe, le temps que joue la plus sombre, mais excellente, River’s Jaw, puis on poursuit avec One Eye Open, hymne à saveur gospel condamnant le suprémacisme blanc et ses violences insensées. Ensuite, nous sommes bercés par l’instrumentation roots (guitare, banjo, pedal steel…), la chaleur de la réalisation et le son de cette voix si touchante jusqu’au dernier titre du disque, une relecture épurée et fort réussie du Houses of the Holy de Led Zeppelin. Avec Eno Axis, nous avons enfin droit au grand disque que nous promettait le talent de H.C. McEntire depuis le début de sa carrière.