S’imposant comme l’un des plus brillants pianistes de sa génération et partageant le sommet du piano russe avec ses compatriotes Evgeny Kissin et Denis Matsuev, Daniil Trifonov, 30 ans, signe ici un imposant album double. Centré non seulement autour de l’œuvre tardive de Jean-Sébastien Bach, avec L’Art de la fugue comme pièce maîtresse, l’opus fait place aussi à la famille du cantor de Leipzig, en présentant diverses pièces pour claviers de ses fils Carl Philip Emanuel, Jean-Chrétien et Wilhelm Friedemann Bach de même que des extraits des pages du carnet de sa femme Anna Magdalena.
De sa progéniture, Carl Philipp Emanuel et Jean-Chrétien sont assurément les plus connus. Comme de fait, en plus du paternel, ce sont ceux dont les œuvres sont les plus présentes. De Wilhelm, le pianiste ne retient qu’une charmante polonaise Andante alors qu’il présente des deux autres, respectivement, un rondo et une polonaise, une sonate et une série de variations sur l’air de Ah ! vous dirais-je, maman avec différentes dynamiques rendues de manière convaincante et contrastante. Complétant le portrait, on retrouve le fameux air Bist du Bei Mir de Stötzel, longtemps attribué à Bach ainsi que l’Étude no 5 de Brahms basé sur la chaconne de la Partita pour violon n0 2 en ré mineur, BWV 1004 ; sorte d’anachronisme dans la temporalité de l’album qui peut rappeler la redécouverte de Bach à l’époque romantique.
D’une constance impeccable doublée d’une technique aérienne, Trifonov ajoute sa griffe à la longue liste des interprétations de la musique monumentale du père Bach.