Le Quatuor de guitares du Canada n’a plus besoin de démontrer sa qualité technique, son excellence artistique et son éclectisme convaincant. Empty Houses reflète l’étendue du répertoire visité par l’ensemble : des arrangements de grands classiques (Bach, Mozart), des musiques vernaculaires de qualité (Jobim, Bonfa) et des compositions actuelles (Patrick Roux, Olga Amelkina-Vera, Renaud Côté-Giguère). Le moment le plus fort de l’album : le Prologue, fougue et allegro trépidant, une composition de Patrick Roux (né en 1962), qui est l’une des plus emballantes que j’ai entendues pour ce genre de formation. Remplie de mélodies trépidantes ou touchantes, de rythmes excitants et de prouesses techniques spectaculaires, c’est une succès assuré dans n’importe quel concert! Le reste, sans être aussi mémorable, offre de belles minutes de musique. Je retiens l’arrangement de Louis Trépanier d’airs de Orfeu negro (Jobim/Bonfa), en trois mouvements, hommage à la fois respectueux et libre de cette musique initiatrice de la bossa nova en Occident. Un arrangement de Bach (Sonata sopr’il soggetto reale pour flûte, violon et continuo, ext. de L’offrande musicale, BWV 1079) et de Mozart (premier mouvement de la Sonate pour deux pianos, K. 448) offrent un aperçu de la grande finesse digitale des quatre instrumentistes.
Pulsar, de la compositrice Olga Amelkina-Vera, est un exercice de rythmes hachurés non dénué d’exigences et de qualité expressives, mais ne rend pas pleinement justice à son sujet, une étoile tournant sur elle-même à une vitesse stupéfiante et déchargeant des doses astronomiques (!) d’énergie. En ce sens, le même objet a suggéré un petit bijou électronique à Vangelis il y a bien plus longtemps et aurait eu avantage à être traduit pour ce genre d’ensemble. Les quatre mouvements de Empty Houses de Renaud Côté-Giguère passent du jazz au prog rock et à la musique brésilienne dans une écriture très fluide et organique entre les quatre instruments. Des lignes entrelacées, au contrepoint subtil mais fourni, tracent des paysages teintés d’ambivalence émotionnelle. Le troisième mouvement est étonnant : le quatuor crée des sonorités qui évoquent un clavier synthétique!
Un programme de qualité, à la hauteur de l’immense talent de quatre musiciens au sommet de leur art.