The Orb : Famille spatiale

Entrevue réalisée par Patrick Baillargeon

Abolition of the Royal Familia propose un condensé de tout ce que The Orb a touché en quelque trente années de service. Nous sommes allés à la rencontre d’Alex Paterson, grand manitou de l’entité électro britannique.

Genres et styles : électronique

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The Orb lançait récemment Abolition of the Royal Familia, son 16e album. Connu pour ses envolées spatiales qui ont souvent meublé les salles chill-out des raves d’hier – qui ne se souvient pas de l’hymne ambient Little Fluffy Clouds? –, The Orb a aussi touché à la house et pas mal au dub électronique, notamment en compagnie du mythique Lee Scratch Perry. Sur son nouvel effort, conçu en compagnie du jeune producteur britannique Michael Rendall et d’une poignée de collaborateurs, The Orb propose un amalgame de tous les styles qu’il a abordé en une trentaine d’années de carrière, avec comme toile de fond une dénonciation de l’impérialisme et de la famille royale britannique. PAN M 360 est allé à la rencontre du légendaire et quelque peu excentrique Dr Alex Paterson, qui dirige – plus ou moins seul – les destinées de l’O.V.N.I. Orb depuis ses débuts en 1988.

PAN M 360 : Il semble que l’album vise en partie à protester contre l’approbation historique par la famille royale britannique du rôle de la Compagnie des Indes orientales dans le commerce de l’opium. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

Alex Paterson : Oui, en effet, mais bien modestement. L’histoire se répète parce que les lignées royales d’Europe veulent qu’elle se répète. La Compagnie des Indes orientales a été créée sous le couvert d’un commerce comme celui du thé et du sucre. Mais à bien des égards, elle était comme une opération secrète de la monarchie britannique, dirigée par des francs-maçons. Et en plus il y a cette histoire voulant que Jésus s’était installé dans le sud de la France pour y fonder une famille. Était-ce le fameux secret des Templiers? Mais revenons à la révolte des Boxeurs, c’est-à-dire aux guerres de l’opium. Le plan, c’était d’envoyer de l’opium aux Chinois pour rendre la population dépendante et de leur voler ensuite Hong-Kong. Écoutez la chanson Empire Song de Killing Joke, ils ont compris, eux. L’histoire est toujours écrite par le vainqueur. La Nouvelle-France en est l’exemple parfait, c’est maintenant le Canada. Quel âge a la reine sur vos billets de banque ? Et que pensez-vous du fait qu’un couple royal s’installe en Colombie-Britannique ? Le 1 % qui possède le monde. Pensez-vous que la reine puisse céder l’un de ses nombreux domaines à la population pour l’aider à combattre le coronavirus? Jamais de la vie!

PAN M 360 : Que pensez-vous de la famille royale ?

AP : Pas grand-chose, la Révolution anglaise a été truquée. Ici, on l’appelle « the Firm ». Ça dit tout. 

PAN M 360 : Comment l’album a-t-il été conçu ?

AP : En tournée l’année dernière, Michael Rendall et moi étions d’accord sur beaucoup de choses. Ensemble, les choses vont rondement en studio. Nous faisons confiance à nos oreilles, à notre cœur et à notre plaisir spontané, quand on se trompe, ce n’est rien, juste une petite onde accidentelle. Nous avons planté le décor et les artistes les graines dans le jardin. Six mois plus tard l’album était né ! En gros, nous avons commencé en août et tout était terminé pour l’Halloween.

PAN M 360 : Quelle a été la contribution de Youth, Roger Eno, Steve Hillage, Jah Wobble et des autres invités à la création ou à l’enregistrement ?

AP : Ah! tous ces amis ! Gaudi au synthé et Violeta aux cordes ainsi que les habitués. Wobble n’a pas pu se libérer pour cet album, mais il sera du prochain (que nous planifions en ce moment).

PAN M 360 : Diriez-vous que cet album présente un survol cohérent de ce que The Orb a fait au cours des 30 dernières années ?

AP : MOINS D’ALCOOL, PLUS DE FUMÉE ! C’est la première fois depuis The Orb’s Adventures Beyond The Ultraworld que je produis un album et que j’aie autant d’aide de quelqu’un, et c’était Michael [Rendall]. 

PAN M 360 : Parlez-nous un peu de l’agencement de l’album.

AP : Il a été conçu comme un double vinyle. Côtés 1 et 3 danse / reggae, côtés 2 et 4 ambient. Pour les DJ, c’est bon… Ah! les disc-jockeys, une relique du passé! On les trouvera bientôt dans les musées… En tout cas, c’est un agencement pas compliqué, facile à suivre et un brin poétique sur le dernier morceau.

PAN M 360 : J’ai lu quelque part que Stephen Hawking appréciait votre musique, le morceau Hawk Kings est-il un hommage au regretté physicien ?

AP : Je suis devenu ami avec Tim, le fils de Stephen Hawking, et Tim nous a permis d’assister, un collègue et moi, à une conférence de Stephen dans les années 2000, à Londres. Nous avons même été invités à le rencontrer, lui et le reste de sa famille, après sa conférence. Cet épisode, et le fait d’avoir été à Berlin quand le mur est tombé, sont probablement les deux moments les plus formidables de ma vie. J’ai appris que Stephen avait écouté les deux premiers albums durant les tournées qu’il a faites en Europe au milieu des années 90. Il m’a semblé naturel de tirer mon chapeau à un homme aussi brillant. 

PAN M 360 : Slave Till U Die No Matter What U Buy (L’Anse Aux Meadows Mix) est-il un remake ou un clin d’œil au Message From Our Sponsors de Jello Biafra ? Jusqu’à quel point êtes-vous punk ou anti-establishment ?

AP : Un des punks originaux ! C’est une version de Bodies, un morceau des Sex Pistols, avec moi au chant ! A quel point suis-je punk! Je déteste le capitalisme en tout cas.

[NDLR : Alex Paterson a longtemps été roadie pour Killing Joke et continue de travailler avec le bassiste Youth.]

https://www.youtube.com/watch?time_continue=25&v=iFJoqKo08Q8&feature=emb_logo.

PAN M 360 : L’album déborde de chansons aux titres absurdes. Quelle place occupe l’humour dans votre musique ?

AP : Dans notre tête à chacun, il y a toujours quelqu’un qui rit. Est-ce qu’il rit de nous ou avec nous ? L’humour absurde, c’est une porte magique qui ouvre sur autre chose.

PAN M 360 : Abolition Of The Royal Familia a été réalisé plusieurs mois avant la pandémie actuelle, mais il se termine tout de même par ceci : « Stay in your homes… no more than two people may gather anywhere without permission » (« Restez chez vous… pas plus de deux personnes ne peuvent se rassembler où que ce soit sans autorisation »). Qu’en pensez-vous ? Vous avez dû être stupéfait quand vous vous en êtes rendu compte ?

AP : La justice poétique. En effet, l’avenir est aujourd’hui. Avez-vous vu Years And Years ? Ça se passe dans un avenir rapproché et David Icke [considéré comme un partisan influent de la théorie du complot], y est enfermé pour avoir dit la vérité. Bienvenue sur Terre dans la grande prison où sommes tous enfermés. 

PAN M 360 : Cette pandémie et ce confinement vous inspirent-ils ? 

AP : Non, pas vraiment. C’est une époque anxiogène et il se passe un tas de choses dont nous ne savons rien, à part que nous ne sommes pas tellement libres en ce moment.

PAN M 360 : Quel genre de musique aimez-vous écouter dans ces moments-là ?

AP : De l’ambient et du reggae. Essayez de syntoniser WNBC.london, c’est notre propre station de radio, sans bulletin de nouvelles ni météo ni publicité, 24 heures sur 24. En attendant, lavez-vous les mains, ne vous touchez pas le visage et écoutez l’album avant le couvre-feu !

PAN M 360 : Pour terminer, comment le récent décès d’Andy Weatherall [musicien, DJ et producteur] vous a-t-il affecté ? Étiez-vous proches ?

AP : Ç’a été un véritable choc pour nous tous qui faisions partie de son cercle d’amis. J’étais assez proche de lui. J’ai beaucoup de peine pour sa petite amie et ses partenaires de musique, Nina et l’équipe des Sabres of Paradise. Repose en paix Andrew.

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