L’art de divertir selon Gang of Four

Entrevue réalisée par Patrick Baillargeon
Genres et styles : post-punk

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Groupe phare du mouvement post-punk à la charnière des années 1970 et 1980, Gang of Four a marqué les esprits dès la sortie de son premier album, Entertainment!, salué par la critique et toujours reconnu comme une œuvre majeure du genre. L’album est souvent cité comme une pierre angulaire du post-punk, mais aussi comme une référence du dance-punk, de l’art punk et du funk-punk. Les textes incisifs ou satyriques du chanteur Jon King s’inspirent des théories situationnistes, mais aussi des réflexions de penseurs tels que Michel Foucault, Jacques Lacan, du féminisme et de la théorie de l’aliénation selon Marx.
Parmi les thèmes abordés, on trouve la marchandisation des relations humaines (« Natural’s Not in It », « Return the Gift »), la condition ouvrière (« At Home He’s a Tourist »), la critique de la théorie du Grand Homme (« Not Great Men »), la répression politique pendant les Troubles en Irlande du Nord (« Ether »), les théories sur les médias (notamment celles de Guy Debord et la « Société du spectacle »), ou encore la manière dont les médias relatent le terrorisme et la guérilla maoïste en Amérique latine (« 5.45 »). La formation de Leeds détourne aussi les codes des chansons d’amour traditionnelles pour en dévoiler les ressorts idéologiques, notamment à travers des morceaux comme « Anthrax » et « Contract », qui questionnent l’amour romantique, ou « Damaged Goods » et « I Found That Essence Rare », qui déconstruisent les représentations classiques du désir et du sexe.

La pochette d’Entertainment!, conçue par Jon King, reflète directement l’influence de l’Internationale Situationniste. On y voit un « indien » et un « cow-boy » se serrant la main, déclinés en trois images stylisées, issues d’un film de la série Winnetou, qui, en Allemagne de l’Est à l’époque, étaient interprétés comme des critiques du capitalisme. Le traitement visuel réduit les visages à des aplats rouges et blancs, évoquant des clichés raciaux. Autour de l’image s’inscrit une phrase acerbe :

« L’Indien sourit, il pense que le cow-boy est son ami. Le cow-boy sourit, il est content que l’Indien soit dupe. Il peut maintenant l’exploiter. »

Cette image illustre non seulement le thème de l’exploitation, mais critique aussi la manière simpliste dont les médias et la culture populaire schématisent les conflits ethniques, sociaux ou politiques.

Afin de souligner les 45 ans de cet album emblématique, les Gang of Four viendront nous visiter lors dune ultime tournée, adéquatement intitulée The Long Goodbye Tour. Lors de cette soirée unique, la formation britannique interprétera, dans un premier temps, Entertainment! dans son intégralité, pour ensuite revenir sur scène avec un florilège de titres majoritairement tirés des deux albums qui suivirent, soit Solid Gold et Songs of the Free

Suite au décès du guitariste Andy Gill en 2020 et tout récemment du bassiste Dave Allen, le chanteur Jon King et le batteur Hugo Burnham seront accompagnés du guitariste Ted Leo et de la bassiste Gail Greenwood. 

Quelques jours avant le début de ce long dernier adieu, PAN M 360 s’est entretenu avec Hugo Burnham, qui a troqué momentanément son rôle de professeur au Endicott College, dans le Massachusetts, pour celui de gardien du tempo. Le difficile retour derrière la batterie, les amis disparus, et bien entendu, la création du désormais mythique Entertainment!, Hugo Burnham, affable, généreux, parfois ému, a fouillé dans ses souvenirs, nous livrant au passage quelques anecdotes inédites.

PAN M 360: Tout d’abord, je voulais te présenter mes sincères condoléances pour le récent décès de ton ami et complice, Dave Allen, le bassiste original de Gang of Four. C’est très triste. Je pense qu’il serait intéressant de parler un peu de lui, si tu le souhaites. Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Hugo Burnham:  Lorsque Jon (King, voix), Andrew (Gill, guitare) et moi-même avons créé le groupe, nous avions un bassiste appelé Dave Wolfson, qui était vraiment un jazzman. Mais il était dans le milieu, il avait des amis communs et tout ça. Nous avons joué deux concerts avec lui en avril et mai 77, ou 76. Je ne me souviens plus de l’année, mais quoi qu’il en soit, l’été est arrivée et Jon et Andrew sont partis à New York. À leur retour, nous avons réalisé que Dave Wolfson ne nous convenait pas vraiment. J’ai donc affiché un flyer dans le bar de l’université disant : « cherche un bassiste R-I-V-V-U-M and blues ». C’était une sorte de code. Rien à voir avec ce que l’on appelle aujourd’hui le rhythm and blues, qui est essentiellement de la musique urbaine. Mais cela signifiait Dr. Feelgood, du pub rock, les Coasters, tout ce qui est de cette nature.

Dave venait de quitter le Nord-Ouest pour s’installer à Leeds, littéralement à la recherche d’un groupe. Il avait passé des années dans des groupes de reprises et de jazz. Il est donc venu nous voir. Cela nous a semblé facile, naturel, dès le début. D’un point de vue social, il s’intégrait bien à nous, mais c’était surtout un vrai musicien, contrairement à nous tous. Lorsque nous avons commencé à répéter et à écrire ensemble, il y avait des « Hé, Dave, tu joues trop de notes », ou « Super quatre notes, maintenant fais en deux ». C’était ce genre de choses, mais nous nous sommes tellement bien entendus. Et chacun d’entre nous a trouvé son rôle. Comme Jon, Andrew et moi étions de jeunes étudiants qui allaient en cours de temps en temps, et que Dave ne l’était pas, il a endossé le rôle de booker. Parce que nous n’avions pas de manager, pas d’agent, nous étions des idiots qui faisaient n’importe quoi. Et en plus chez lui, il y avait un téléphone, ce qui n’était pas la norme. Je veux dire, essaie d’expliquer cela aux gens de nos jours… C’est ce qu’il faisait, entre autres choses. La transition s’est faite très facilement vers un partenariat non seulement créatif, mais aussi amical avec Dave.

PAN M 360 : Quelle a été sa contribution à Gang of Four ? Il avait un style de jeu de basse tout à fait unique, et ce son impressionnant qu’il était capable de créer…


Hugo Burnham : Au début, nous répétions et écrivions tous ensemble ; nous nous disputions sans cesse, nous nous testions mutuellement, nous nous poussions les uns les autres. Sa contribution était donc celle d’un partenaire à part entière. C’est un peu comme les quatre éléments que sont la terre, le vent, le feu et l’eau, ils sont complètement différents, mais ils se fondent ensemble pour créer cette planète sur laquelle nous vivons. C’est un peu exagéré, mais tu vois ce que je veux dire. Quatre éléments totalement différents qui ont travaillé ensemble pour créer quelque chose de féroce et de merveilleux. C’est ce que nous voulions faire et c’est ce que nous avons fait.

PAN M 360 : Était-il question qu’il participe à cette tournée, ou était-il trop malade ?


Hugo Burnham : Nous savions que Dave n’était pas très bien depuis quelques années. En 2020, avant que la Covid ne mette le monde à l’envers, et quand Andrew est mort (de la Covid), nous avions espéré faire une vraie réunion, et cette réunion impliquait Dave. Mais une fois que nous sommes sortis de là et que nous sommes arrivés à la fin de l’année 2021, il est devenu clair que Dave n’était pas vraiment en mesure de venir jouer avec nous. C’est alors que nous avons retrouvé Sara Lee, notre Sara Lee, qui avait également pris sa retraite après une carrière époustouflante avec tant de gens brillants, que ce soit les B-52 ou Ryuichi Sakamoto. Sara Lee est vraiment une superstar. Mais Sara a de nouveau pris sa retraite l’année dernière. Nous avons maintenant Gail Greenwood, de Belly et de L7, qui apporte une toute autre ambiance et rafraîchit vraiment les choses, et qui donne un coup de fouet. Je dois dire que j’ai eu une chance extraordinaire, en tant que batteur, de jouer avec ces bassistes. Je ne pense pas être un batteur brillant, mais je le suis devenu en jouant avec Dave. Nous formions quelque chose, nous nous comprenions, nous travaillions si bien ensemble, et c’était terrifiant quand il a quitté le groupe (en 1981, pour former Shriekback avec l’ancien XTC Barry Andrews). Je ne savais pas ce que j’allais faire, mais Sara est arrivée, c’était génial. Bien qu’avant Sara, pendant quelques semaines après le départ de Dave, nous avions Busta « Cherry » Jones, qui avait joué avec Talking Heads, Eno, Chris Spedding, Sharks, Parliament et bien d’autres (dont Pagliaro !). Il nous a rejoints pour terminer une tournée et c’était extraordinaire. Il était brillant, fou… encore un qui s’intégrait parfaitement à l’équipe. Pas seulement sur le plan musical, mais aussi sur le plan social et tout le reste. Mais en fin de compte, cela n’a pas fonctionné. Il vivait à New York, il avait d’autres choses à faire, alors Sara est arrivée.

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Après mon départ (1983), Jon et Andrew ont continué avec d’autres personnes, puis nous nous sommes tous retrouvés brièvement de 2005 à 2006, et en 2012, Andrew a continué avec trois jeunes musiciens. Donc c’est une grande joie que de se retrouver pour une dernière tournée, mais cela aurait été merveilleux si Dave avait pu se joindre à nous… Lorsque nous avons joué au Cruel World Festival en Californie en 2023, nous avons également fait quelques concerts à San Francisco. Tout le monde est ensuite rentré chez soi, mais Jon et moi avons pris l’avion jusqu’à Portland pour aller passer une journée avec Dave et sa famille. Tout le monde savait qu’il n’allait pas très bien, mais il était en pleine forme ce jour-là et nous avons passé un agréable moment ensemble. C’était vraiment bien. Il nous manque terriblement. C’est vraiment… (étouffe un sanglot)… Même si nous savions qu’il n’allait probablement pas durer très longtemps, c’est toujours un coup de poing dans le cœur. 

PAN M 360 : Tu mentionnais Andy Gill, dont la disparition en 2020 est également très triste. Lui aussi avait un son tout à fait unique. Avez-vous eu du mal à lui trouver un remplaçant ?


Hugo Burnham : C’était vraiment un dilemme pour nous. Comment remplacer un son, une ambiance et une attitude comme celles d’Andy ? Beaucoup de gens ont dit, oh, vous savez, n’importe qui ayant déjà joué de la guitare pour les Red Hot Chili Peppers ferait l’affaire, ce genre de choses. Un de mes amis m’a suggéré David Pajo (Slint). Ne connaissant rien de l’histoire de David, j’ai commencé à enquêter sur Slint et sur tout ce que David avait fait. Je me suis rendu compte qu’il avait l’air d’être quelqu’un de brillant. Je l’ai donc contacté et lui ai demandé s’il était intéressé. Nous ne voulions pas de quelqu’un qui se contente de copier tout ce qu’Andy avait fait… Nous avons passé de bons moments avec David. Et puis, à la fin de l’année dernière, il a voulu se concentrer sur d’autres choses. Je pense qu’il avait vraiment besoin d’un peu de stabilité. Nous avons donc maintenant Ted Leo, qui est… je veux dire, les gens devraient connaître Ted, il existe depuis 100 ans. Il est arrivé sur la scène hardcore de New York et D.C. il y a des années. Il est plus jeune que nous. Mais tout le monde l’est, sauf Bill Wyman (rires).

PAN M 360 : Pour cette tournée spéciale, allez-vous vous concentrer uniquement sur Entertainment! ?


Hugo Burnham: Cette fois-ci, nous focalisons vraiment sur Entertainment!. Nous sommes donc quatre sur scène et nous faisons deux sets. Nous voulions vraiment que ce soit comme, et je sais que ça peut paraître loufoque, « une soirée avec les Gang of Four ». En d’autres termes, dès que tu mettras les pieds dans la salle, les chansons que tu entendras avant le spectacle seront celles que nous aurons choisies. Les visuels seront ceux que nous aurons choisis. Nous jouerons Entertainment! morceau par morceau, jusqu’au bout, pour honorer le 45e anniversaire de sa parution au Royaume-Uni. C’était en 1979 en Amérique du Nord et partout ailleurs, mais au Royaume-Uni, c’était au début de l’année 1980, cela fait donc 45 ans. Et il est intéressant de noter que pour ce show à Montréal, cela fera presque exactement 45 ans que nous y avons joué pour la première fois, c’était le 9 mai 1980, au Broadway Live!

PAN M 360 : Et pour le deuxième set ?

Hugo Burnham : Après le set Entertainment!, nous ferons une petite pause et nous reviendrons pour faire ce que nous appelons un best of the rest. Nous jouerons des chansons d’autres albums, principalement de Solid Gold et Songs of the Free. C’est beaucoup de travail pour une bande de vieux, deux sets entiers. Il n’y a pas de première partie, tout le monde doit arriver assez vite après l’ouverture des portes, parce que ce n’est plus comme à l’époque où nous montions sur scène à 23 heures (rires). J’ajouterais que des exemplaires des récentes mémoires de Jon, To Hell with Poverty! seront disponibles sur place et que Jon procèdera à une séance de signature après le concert.

PAN M 360 : Il n’y a donc pas de nouvelles chansons dans ce spectacle ?


Hugo Burnham : Aucune nouvelle chanson. Toutes les chansons que nous allons jouer proviennent des deux, voire des trois premiers albums et nous jouons une chanson, intitulée I Parade Myself, dont je ne suis pas sûr qu’elle ait été enregistrée sur un album, peut-être sur Content, je ne m’en souviens pas. C’était l’une des chansons des années Jon et Andy, un morceau fantastique. Pour certaines des chansons d’Entertainment!, il y en a que nous n’avons pas jouées depuis 1980. Comme pour Guns Before Butter, quand j’ai commencé à réécouter ce morceau pour me rappeler comment le jouer, j’ai pleuré. Je me suis dit que j’étais trop vieux pour ça. Ou Contract c’est une chanson très difficile et rapide. Quand on a 23 ans, qu’on est plein de fougue, on peut faire ce genre de choses. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Nous les avons donc quelque peu adaptées.

PAN M 360 : Jouer l’intégralité d’Entertainment! en ces temps étranges semble tout à fait approprié. Mais à l’époque de la création de l’album, quelles étaient vos sources d’inspiration, tant au niveau des paroles que de la musique ?


Hugo Burnham : Feelgood, Free, Jimi Hendrix, Parliament Funkadelic, Can, Hawkwind… Nous partagions de grandes passions musicales. Et comme tout groupe d’artistes, lorsque vous vous réunissez, vous travaillez à partir de ces éléments communs. Il est possible de dire quelles chansons ont été écrites parce que j’essayais de jouer comme Simon Kirk dans Free, ou parce que j’étais influencé par le reggae. Damaged Goods est très influencée par le reggae et le ska, avec lesquels nous avons tous grandi en Angleterre, bien sûr. Cela faisait partie d’un tout. Il n’y avait pas de stations de radio noires d’un côté et de stations pop de l’autre. Il n’y avait qu’une seule et même chose. Cela faisait donc partie de notre ADN. Et puis, en tâtonnant, on commence à trouver son propre son. Et je pense que du point de vue des paroles, on évitait de tomber dans l’évidence, de chanter sur les voitures et les filles, de se saouler et de mal se comporter… Il y avait quelque chose de plus subtil dans nos paroles, nous étions très attentifs à la façon dont les gens interagissaient entre eux, et avec les choses qui les entouraient, sur le plan émotionnel, social et politique. Tout est politique, non ?

PAN M 360 : Et comment cet album a-t-il été créé ?


Hugo Burnham : Eh bien, nous avons joué pendant au moins 18 mois, deux ans peut-être, en développant et en construisant les chansons. Et nous avions eu beaucoup de succès avec notre premier EP/single indépendant, Damaged Goods, qui contenait Armalite Rifle et Love Like Anthrax. Et cela nous a soudainement permis d’attirer l’attention de la presse musicale. Je veux dire que nous avons apprécié le fait que soudainement, après avoir été ignorés pendant un certain temps par l’ensemble de l’industrie, tout le monde voulait que nous fassions un disque. C’est ce qui se passait à l’époque. Il y avait pas mal de labels qui espéraient nous signer. Ils avaient l’impression d’être passés à côté des Clash. Ils ont donc opté pour quelque chose de similaire, même si nous n’étions pas aussi bien habillés qu’eux (rires). Et pour être honnête, nous avons refusé beaucoup d’argent de la part d’autres grands labels pour signer avec EMI. Parce qu’au lieu d’avances énormes, nous avons obtenu des taux de redevance nettement plus avantageux. Pour l’époque, nous avions un contrôle créatif total. Tant que le label était techniquement capable d’enregistrer un disque à partir de ce que nous avions fourni lors de nos sessions d’enregistrement. Ils ne pouvaient pas le refuser sous prétexte qu’il ne sonnait pas juste ou qu’il n’était pas assez commercial.

Au fil des ans, nous avons commis des erreurs qui nous ont éloignés du label. Je veux dire, la fameuse histoire de notre refus de jouer à Top of the Pops… qui a vraiment paralysé notre progression (le groupe a quitté l’émission lorsque la BBC leur a demandé de chanter « rubbish » à la place de « rubbers », car le texte original était considéré comme trop risqué). Cette émission permettait d’accéder à un public plus vaste. Tout le pays regardait Top of the Pops. Ce fut donc décevant. Quoi qu’il en soit, nous avons réalisé Entertainment! dans un studio du Sud de Londres appelé The Workhouse, où Ian Dury et les Blockheads avaient enregistré New Boots and Panties, un album que nous adorions. Et nous aimions le fait que ce n’était pas un grand studio du West End ou du centre de Londres. C’était un peu en retrait, mais assez groovy. Et c’était le studio de Manfred Mann. Ce n’était pas la session la plus facile à réaliser par contre. J’ai trouvé cela très difficile. J’ai beaucoup souffert de ce que j’appelle la fièvre de la lumière rouge. Parce que la façon dont nous faisions les chansons était la suivante : nous commencions avec Dave et moi, Andrew se contentant de jouer pour nous aider à poser la basse et la batterie. Et la façon dont le studio était conçu, la salle de contrôle était à l’étage et les gens dans la cabine regardaient en bas à travers la vitre. C’était vraiment oppressant, et je n’étais pas très confiant. C’était tout le temps : « Non ! Refais-le, refais-le ! ». Et l’ingénieur n’était pas assez intelligent pour nous laisser continuer. Si on faisait une erreur, il s’arrêtait. C’était vraiment un peu déstabilisant. C’était aussi assez difficile avec l’ingénieur parce qu’il ne comprenait pas ce que nous essayions de faire. Il s’agissait de faire un disque qui sonnait comme nous l’entendions. Il ne s’agissait pas d’une série de traitements, tu sais, avec de la réverbération et tout le reste. Nous voulions un son sec, sans artifice. Et c’était un anathème pour lui. Ce n’était donc pas facile, mais nous aimions ce que nous avions fait… Dans les semaines qui ont précédé l’enregistrement, nous sommes allés nous isoler dans une ferme au milieu du Pays de Galles, où nous avons répété toute la journée et écrit ces chansons. Je pense que Not Great Men est née de cette session, et c’est l’une des chansons les plus brillantes et durables que nous ayons jamais écrites.

PAN M 360 : Et comment est née la chanson « Love Like Anthrax » ? Parce qu’elle était tout à fait unique avec sa guitare maniaque et ses paroles superposées. 

Hugo Burnham : Nous voulions faire quelque chose qui saute aux oreilles des gens, quelque chose de maladroit, d’étrange et d’extrême. Et il y avait ce truc à la Godard, tu vois? Un écran ici, un écran là. Il y a donc Jon qui chante et Andrew qui marmonne quelque chose de l’autre côté, à contre-courant. Il y a donc deux choses qui se passent en même temps. Et puis, bien sûr, le clin d’œil à Jimi Hendrix dans le feedback extrême. Les gens ont été stupéfaits, soit ils ont détesté, soit ils ont dit « wow » ! Et c’était génial parce que ce n’était jamais tout à fait la même chose chaque fois que nous la jouions en concert, et elle fait toujours autant délirer les gens aujourd’hui. Comme je l’ai dit, nous voulions faire des choses qui n’étaient pas prévisibles et, en même temps, qui étaient intéressantes pour nous. Je veux dire que c’était amusant quand nous avons commencé, en faisant des chansons punk idiotes, ou quand nous jouions une chanson des Ramones et d’autres reprises, c’était amusant. Mais ensuite, nous voulions faire quelque chose qui nous mette au défi les uns les autres, ainsi que notre public.

PAN M 360 : Au fil des ans, Entertainment! a gagné un peu en popularité, mais surtout en respect.

Hugo Burnham : Oui. Comme nous l’avons dit par le passé, nous étions en quelque sorte la version du Velvet Underground de notre génération ; tous ceux qui nous ont vus ou entendus ont monté un groupe et ont eu du succès (Nirvana, Red Hot Chili Peppers, Franz Ferdinand…), mais nous n’avons jamais vendu de disques. Tu sais, pour tous ceux qui ont dit « Oh mon Dieu, sans le Gang of Four, nous n’aurions jamais existé », ou « Oh mon Dieu, ils ont été si influents », si on avait un dollar pour tous ceux qui ont dit ça… Les chansons que nous écrivions et les paroles que Jon créait à la fin des années 70 sont toujours aussi pertinentes. C’est comme si on était toujours d’actualité, encore plus aujourd’hui, je dirais… Et je pense que c’est en grande partie pour cela que nous touchons une corde sensible chez beaucoup de jeunes. Depuis que nous nous sommes réunis en 2022, 30% à 40 % de notre public a moins de 30 ans, ce qui est encourageant. Et il ne s’agit pas seulement de vieux bedonnants comme moi qui amènent leurs enfants adolescents au concert. Les gens… Ils l’entendent, ils y réagissent, ils viennent nous voir. C’est génial, je suis content que notre public ne soit pas uniquement composé de sexagénaires comme nous. Venez donc voir si nous pouvons jouer deux sets entiers sans nous évanouir !

Gang of Four – The Long Goodbye

22 avril 2025
Théâtre Beanfield – 2490 Notre-Dame St W, Montreal Quebec H3J 1N5

Portes: 19h
Spectacle: 20h

Tous ages

Billets: https://www.ticketmaster.ca/event/31006184C9C830E4…

Premiere photo par Jason Grow Photography

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