Kelly-Marie Murphy et le sens de la perte dans la musique

Entrevue réalisée par Alexandre Villemaire

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« À couper le souffle », « imaginative et expressive », « Bartók sur stéroïdes ». C’est en ces mots que la critique qualifie la musique de la compositrice canadienne Kelly-Marie Murphy. Récipiendaire de plusieurs prix et distinctions, ces œuvres ont été jouées par d’importants ensembles au Canada, tels les orchestres de Toronto, Vancouver et Winnipeg, ainsi que par des interprètes comme The Gryphon Trio, James Campbell, Shauna Rolston, le Cecilia and Afiara String Quartets et Judy Loman. Ne lui manquait plus comme corde à son arc que Les Violons du Roy, avec qui elle signe sa première collaboration avec la pièce pour violon et orchestre Found in Lostness qui sera interprétée par Kerson Leong. L’occasion était donc parfaite pour en apprendre sur son parcours de compositrice et sur une de ses plus récentes créations.

PAN M 360 : Parlez-nous un peu de votre parcours musical. Qu’est-ce qui a motivé votre décision de devenir compositrice ? 

Kelly-Marie Murphy: Je pense qu’il était évident dès mon plus jeune âge que j’aimais la musique !  Enfin, à l’âge de 8 ans, nous avons acheté un piano et j’ai commencé à prendre des leçons.  J’ai chanté dans des chorales pendant toute ma scolarité et j’ai commencé à suivre des cours de chant à l’âge de 16 ans.  Au secondaire, j’ai commencé à m’intéresser au jazz, j’ai donc joué du piano dans l’orchestre de jazz et j’ai chanté un peu en parallèle.  J’ai commencé mes études de musique le jour de mes 18 ans, en pensant plutôt à l’interprétation ou même à l’enseignement.  Il est devenu évident que je n’étais pas à l’aise devant un public, et que je devais donc trouver autre chose à faire avec mes capacités musicales.  On m’a encouragé à suivre des cours de composition.  C’est donc ainsi que, par hasard, j’ai trouvé ma vocation !

PAN M 360 : Quels sont les compositeurs ou les personnes qui vous ont influencé ou qui ont joué un rôle important dans votre parcours de musicien et de compositrice ?

Kelly-Marie Murphy: D’un point de vue personnel, mon professeur de composition, Allan Gordon Bell.  Il a été un merveilleux mentor et a toujours cru en moi, même quand je n’y croyais pas.  En ce qui concerne les compositeurs qui m’ont littéralement éveillée, je dirais Stravinsky et Bartok pour commencer.  J’ai assisté à un cours d’histoire de la musique et je me suis accroché au classicisme et au romantisme, mais j’ai vraiment eu un coup de foudre pour les ballets de Stravinsky et les quatuors à cordes de Bartok.  Je dirais également que mon goût pour le jazz et le bebop a influencé ma façon de penser la musique.  La musique contemporaine continue de m’inspirer.  Les compositeurs vivants font partie du tissu artistique, et nous observons et commentons ce qui nous entoure.   

PAN M 360 : Comment le thème de la perte est-il ressorti comme cadre narratif dans Found in Lostness, l’œuvre que vous avez composée pour Kerson Leong ?

Kelly-Marie Murphy: Kerson et moi avons eu une belle rencontre il y a environ un an.  Je lui ai demandé quel genre de choses l’intéressaient, quelle imagerie, ce qu’il aimerait avoir dans un concerto, etc.  Il m’a demandé si je pouvais écrire quelque chose sur le fait d’être « perdu dans les bois » et sur le sentiment d’en émerger. J’ai vraiment aimé ce concept, car il présentait plusieurs avenues différentes.  

Le fait d’être perdu présente de multiples facettes : on peut être perdu physiquement, émotionnellement, spirituellement, etc.  Cela m’a donné matière à travailler.  Le philosophe Soren Kierkegaard considère la « perte » comme une opportunité de découverte et de croissance.  Tout au long de la pièce, j’explore les idées de la quête et de l’inconfort de la perte – l’idée de se connecter aux choses dans l’espoir qu’elles vous amènent là où vous avez besoin d’être.  La fin est un peu irrésolue : avons-nous trouvé ce dont nous avions besoin ?

PAN M 360 : Ce n’est que le deuxième concerto pour violon que vous écrivez ! Comment avez-vous abordé l’écriture pour cet instrument ? Vous êtes-vous lancé des défis en expérimentant avec l’écriture et les techniques instrumentales ?

Kelly-Marie Murphy: Le premier concerto pour violon était assez volumineux : 4 mouvements, orchestre complet, durée d’environ 20 minutes, et très dramatique.  Cette nouvelle pièce n’est écrite que pour un orchestre à cordes, mais elle doit néanmoins répondre aux besoins dramatiques du concept.  Mon défi consistait à garder la couleur et la texture fraîches avec seulement des cordes.  J’aime les sons percussifs, et j’ai donc voulu créer une petite section d’accompagnement où le soliste est soutenu par des tapes et des cris.  J’ai également écrit un solo assez long pour la contrebasse !   

PAN M 360 : Comment l’œuvre est-elle structurée ? Avez-vous conservé la forme classique du concerto ou était-elle plus libre ?

Kelly-Marie Murphy: Il s’agit d’une œuvre en un seul mouvement, avec des sections lentes et rapides.  Les cadences sont intégrées tout au long de l’œuvre.  Il y a certainement une certaine liberté rythmique dans la pièce.  Il y a des éléments thématiques qui reviennent et sont développés, mais c’est aussi proche que possible d’un concerto classique.

PAN M 360 : Quelle est votre démarche en matière de composition ? Qu’est-ce qui vous inspire lorsque vous composez ?

Kelly-Marie Murphy: Je suis compositrice tous les jours.  Pour moi, l’écriture est une pratique quotidienne. J’ai besoin de planifier et d’expérimenter.  Je dois faire des choix entre les idées pour m’assurer que j’utilise les plus fortes.  J’essaie d’écrire et de « dessiner » le contenu d’un morceau – comment je veux qu’il bouge ; ce que je veux dire…. Ensuite, il s’agit de trouver le bon matériau.  J’aime qu’il y ait un poème ou une œuvre d’art pour ancrer les pensées.

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