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Après avoir commencé son apprentissage de la guitare sur les chansons de Nirvana, Émilie Proulx a suivi les sentiers de l’alt-folk. La nuit, les échos, son plus récent microalbum paru le 27 août dernier, fait encore la part belle à ce genre.
À la suite des Francouvertes 2007 dont elle a été finaliste, l’auteur-compositrice-interprète a accompagné de nombreux artistes sur scène et en studio, notamment Maude Audet, Catherine Leduc, Willows et Navet Confit.
Sa voix cajoleuse et apaisante nous amène dans un état de bien-être absolu et correspond tout à fait au genre musical qu’elle privilégie, sur ce microalbum.
Elle discute de sa carrière avec PAN M 360.
PAN M 360 : D’où vient ton amour pour la musique?
Émilie Proulx : Oh mon dieu! Ça part du fait que dans mon enfance pré-Internet, je vivais en campagne, dans un rang. Il y avait donc beaucoup de silence, beaucoup d’espace à meubler si l’on veut. Ç’a vraiment créé les conditions parfaites pour que je m’intéresse à la musique. Je ne sais pas si cette interprétation de l’enfance est une fausse piste, mais c’est l’impression que j’ai.
La majorité des gens de ma famille jouaient du piano, d’une manière plus « amatrice », mais ma mère était très mélomane et aimait une grande variété de musiques. J’ai donc été exposée très jeune au monde musical. On avait aussi une très bonne chaîne stéréo à la maison. La sensation de la musique forte et le plaisir qui l’accompagne m’ont marquée, très jeune.
PAN M 360 : Quel est ton processus de création?
Émilie Proulx : Ça m’intéresse toujours d’essayer de nouvelles méthodes. Je n’ai pas vraiment une manière précise de travailler. J’ai toujours besoin de ressentir quelque chose, que ce soit la musique ou les mots. Je dois vraiment avoir une étincelle émotionnelle. À partir de ce moment, je tire sur ce fil conducteur et tout s’emboîte. Je peux construire les chansons sur cet élan. Je souhaite voir où vont les chansons par elles-mêmes. Je suis dans une posture d’écoute et j’essaie de comprendre où les choses veulent aller. Donner une chance aux idées, mais surtout à l’instinct. Bien souvent, j’ai de bien meilleures idées de cette manière. Je fais donc beaucoup confiance à l’écoute et, plus tard, je prends mon temps afin de séparer les meilleures idées des moins bonnes. J’ai étalé tout ça une longue période, par contre. Mon processus de création est constitué d’idées de « tones » et d’ambiances, afin de composer la chanson qui va avec l’ambiance. C’est un peu toutes les étapes en même temps.
PAN M 360 : En quoi, selon toi, ton microalbum La nuit, les échos se distingue-t-il de tes quatre derniers projets?
Émilie Proulx : Je suis dans un long processus qui consiste à m’éloigner de mes perceptions. Dans ma jeune vingtaine, j’étais plus dans l’introspection, dans ce que je ressentais. Je suis encore là-dedans, mais avec beaucoup plus de recul. À chaque album, on dirait que c’est de plus en plus en lien avec des expériences partagées, moins centré sur moi. Cet album s’est construit plus instinctivement que les précédents. Chaque détail a été moins peaufiné. Les gens pensent que je suis très perfectionniste, que chaque détail est songé. Mais ce n’est vraiment pas ça. C’est quand même long pour moi de faire un microalbum ou un album complet, parce que mon processus de création est tout simplement long et que je travaille sur plusieurs choses en même temps. Ça peut parfois créer des contraintes de temps, mais ça vient nourrir le projet. Puis, c’est exaltant de travailler sur toutes sortes de choses en même temps. Mon projet est aussi influencé par des recherches artistiques au sens plus large, qui dépassent la musique. J’ai lu beaucoup, ces dernières années. Je m’intéresse également à ce qui se passe dans les autres disciplines artistiques; j’essaie vraiment d’infuser mon projet de ces dernières, d’une manière assez simple et accessible.
PAN M 360 : Est-ce pour cela qu’il y a un écart de huit ans entre tes plus récents microalbums?
Émilie Proulx : J’ai eu un enfant, donc ça m’a aussi donné le goût de passer plus de temps à la maison et d’être moins axée sur le travail. C’est également à ce moment que j’ai commencé à faire plus de tournées et à travailler plus comme musicienne, ainsi qu’ingénieure de son. Ça faisait longtemps que ça m’intéressait et je trouvais ça moins exigeant, au quotidien, que de diriger mon propre projet. Cette mentalité est restée quelques années, mais j’ai voulu retrouver un équilibre et replacer mon projet au centre, tout en continuant de faire le reste en périphérie.
PAN M 360 : Tu as commencé ta carrière solo il y a plus de dix ans. Quels sont tes meilleurs moments, jusqu’à présent?
Émilie Proulx : Honnêtement, je me sens privilégiée de pouvoir exercer ce métier. Chaque jour apporte ses bons moments, mais ceux que je préfère sont les séances de création et de partage, en studio, avec les musiciens. J’adore ça! Le partage avec le public est aussi très important, puisque c’est ce qui donne beaucoup de sens à ce que je fais. Concrètement, mes moments préférés sont les périodes passées avec mes musiciens, quand on concrétise des idées qui, parfois, nous dépassent ou nous surprennent. Tout en étant ouvertes à des idées vraiment simples. Je ne suis pas du tout snob, musicalement, et ça me fascine cette recherche avec mes musiciens.
PAN M 360 : Y a-t-il une raison précise pour laquelle tu n’as publié qu’un album complet?Émilie Proulx : J’ai toujours aimé le format microalbum. Je travaille sur beaucoup d’autres choses, c’est plus facile à accomplir et à fermer, cette parenthèse. Cela dit, mes microalbums sont condensés, ce ne sont pas seulement des restants de chansons qui ne se sont pas rendus sur un album. Peut-être que je ferai un album complet, la prochaine fois. Bref, c’est comme en littérature ou dans d’autres disciplines, chaque format amène quelque chose de différent. Une petite bulle pas trop longue à faire et moins chère à produire. Et, puisque je me produis, ça compte dans la balance.
PAN M 360 : Tu es connue du public pour tes talents de guitariste et de bassiste. Sais-tu jouer d’autres instruments?
Émilie Proulx : J’aime beaucoup travailler comme choriste. J’aime utiliser la voix comme texture et il est possible de le constater dans mon dernier microalbum. Je joue également du piano et de la batterie. En fait, je joue de tout sauf des instruments à vent… avec lesquels je suis tellement nulle! J’aime aussi jouer avec des effets sonores. En étant ingénieure de son, ça fait partie de mon métier de trafiquer et de retravailler des sons. Est-ce que le studio est considéré comme un instrument? Je crois bien que oui.
PAN M 360 : Slalom est la première chanson où tu collabores avec nulle autre que Lisa LeBlanc. Comment as-tu eu l’idée de cette collaboration?
Émilie Proulx : Premièrement, c’est une chanson que j’ai écrite pendant la pandémie. Ce n’est pas nécessairement à propos de ça, puisqu’on entend beaucoup d’histoires de ce genre. Mais ça parle quand même de « slalomer » dans un espace confiné, au sens figuré, et de faire de son mieux chaque jour. C’est de trouver un équilibre, de lâcher prise et de tenir bon malgré ce que la vie nous lance comme obstacles, au quotidien. Musicalement, c’est une chanson vraiment simple, de style « feu de camp ». Au début, elle me faisait penser à une chanson d’Alain Souchon, une chanson plus sentimentale, mais elle a un côté plus « classique rock ».
Lisa et moi, ça fait un moment que l’on se connaît. Je l’ai toujours admirée comme chanteuse et je sais qu’on aime toutes les deux Stevie Nicks. Donc, j’avais comme idée que Lisa ait son moment « Stevie Nicks » dans la chanson. C’était une idée secrète, mais c’est quand même ça qu’elle a fait! Je recherchais cette voix marquante à la fin d’une chanson. J’étais très contente qu’elle accepte d’y chanter! Il y a aussi plusieurs autres personnes qui y chantent, ce sont ces chœurs qui font vraiment vivre les textes.
PAN M 360 : À quoi peut-on s’attendre de ton lancement au Verre bouteille, le 19 septembre?
Émilie Proulx : D’abord en première partie, le public pourra découvrir Pataugeoire, le groupe d’Agathe Dupéré, ma bassiste. C’est un petit groupe grunge dans lequel je joue de la basse. Ça me fait bien rire parce que c’est le même style de musique que je jouais à l’âge de douze ans, quand j’ai commencé à jouer de la guitare. La mode a eu le temps de revenir! Je m’amuse vraiment à jouer du grunge et je me sens privilégiée de travailler avec des personnes plus jeunes que moi. C’est vraiment riche comme collaboration. Ensuite, pour mon spectacle, ça va être mes musiciens et l’on ne va pas jouer le microalbum intégralement. On va faire les chansons, mais on laisse de la place à l’improvisation. Généralement, c’est excitant de voir son projet vivre sur scène.
PAN M 360 : Quels sont tes prochains projets?
Émilie Proulx : J’ai des projets de réalisations d’albums. Je travaille ces temps-ci avec Jeanne Côté, qui est vraiment super bonne. On réalise un beau disque ensemble. Cet hiver, je participerai à la pièce Lysis, de Fanny Britt et Alexia Bürger, au Théâtre du Nouveau Monde. Je vais être sur scène pour toutes les représentations comme musicienne. Ça va être une nouvelle expérience pour moi, j’ai vraiment hâte. Ça va occuper une grande partie de mon hiver. Je tourne toujours avec Maude Audet, nous avons des dates par-ci par-là. La nuit, les échos m’a fait partir sur un élan que j’aimerais suivre. Comme je le disais, mon intention est de me mettre plus au centre, c’est ce que je souhaite faire prochainement. Idéalement, il y aurait un autre microalbum ou un album complet dans un avenir assez rapproché, comparativement à mes délais habituels.