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Parents mélomanes, un frère chanteur en pleine ascension sous le nom de Clerel : pour Ellxandra, la musique, c’est une affaire de famille. Après l’apprentissage du piano et un peu de théorie musicale, la Camerounaise explore avec sa voix les sonorités jazz, funk et rock fusion dans son adolescence. C’est en 2015, lors d’une sortie au Stereo – le dernier afterhour montréalais – qu’elle découvre les musiques électroniques. Bouleversée par cette rencontre, il ne lui aura fallu que peu de temps pour s’approprier les codes de la house, commencer à mixer, produire et faire du live d’excellente facture, comme le prouvent son premier EP sorti en 2021 chez Hushlamb (Alicia Hush) et sa participation à MUTEK 22. Rencontre avec le futur de la scène house montréalaise.
PAN M 360 : Ton dernier morceau, Life Direction, sorti sur le label de Kizi Garden, rappelle la house originelle de Chicago, celle des artistes comme Frankie Knuckles et Jamie Principle. Ces sonorités tiennent-elles de réminiscences inconscientes ou d’une direction assumée?
Ellxandra : Oh, mais c’est sûr, je suis une house girl, très old-school, tout ce qui est 90’s, c’est vraiment des références pour moi, donc je suis contente que tu aies pu reconnaître ça. Je ne dirais pas que c’est nécessairement intentionnel, de faire la house comme ça, qui ressemble à ça, c’est quelque chose qui coule, juste de moi. C’est naturel ce son-là pour moi.
PAN M 360 : J’ai aussi remarqué que tu utilisais ta voix de façon très différente selon les morceaux, tantôt comme un élément rythmique qui disparaît presque dans l’instrumental, tantôt comme des lignes mélodiques mises en avant. Comment approches-tu cette partie de la création?
Ellxandra : C’est 100 % intuitif!
PAN M 360 : À l’écoute d’un morceau comme For What It Is Worth, on remarque qu’il y a un gros travail de spatialisation du son. Est-ce que c’est quelque chose qu’on va pouvoir retrouver lors de ta performance à MUTEK?
Ellxandra : J’ai intégré cet aspect-là à mon travail lors de ma rencontre avec la musique minimale, en particulier. C’est quelque chose qui m’a beaucoup marqué quand j’ai commencé à écouter ce type de musique, la façon dont tous les éléments étaient bien balancés. Comme une soupe parfaite, une soupe au loop. Qu’est-ce qui rend un loop intéressant? Un élément qui stimule, mais aussi des choses qui se baladent; c’est d’ailleurs pour ça que j’ai commencé à intégrer le modulaire dans mes productions et dans mes prestations. Pour MUTEK je n’apporte pas les modulaires, mais j’ai fait des enregistrements que je viens jouer, pour justement conserver cet aspect spatialisé.
PAN M 360 : Justement, au sujet de tes prestations, peux-tu nous parler un peu plus de ta configuration à la maison? Quelles sont tes machines favorites?
Ellxandra : J’ai un modulaire, un mixeur, quelques effets peddle. En fait, la base mélodique de cette prestation reprend des éléments mélodiques de la précédente. C’est une machine qui s’appelle RS7000, de Yamaha. Je l’adore, c’est un peu la réplique de la Akai MPC, je me retrouve beaucoup dedans. Pour le live, je sais que je vais avoir la TR8 parce qu’elle est très « jammable ». Et mon module d’échantillonnage, ça c’est un produit très important dans mon matériel parce que c’est comme un couteau suisse. Un échantillonneur me permet de passer de certaines pistes à d’autres, mais bon je n’exploite pas vraiment le concept de pistes dans ma prestation. C’est juste plusieurs boucles à travers lesquelles je vais itérer.
PAN M 360 : Tu parles d’une utilisation plus intuitive de ta voix et d’aimer les imperfections. Est-ce une approche que tu conserves sur scène, tu y vas avec le flow ou au contraire c’est très cadré, millimétré?
Ellxandra : Oui au deux, en fait, parce que pour moi, l’improvisation a besoin d’une structure, sinon c’est juste à tout va. Je suis aussi pas mal structurée mentalement, dans certaines affaires, notamment les éléments instrumentaux. Je vais faire une structure souple et flexible pour les voix, que je vais utiliser lorsque je vais chanter. Mais ça, ça dérape, tu sais! C’est vraiment pour m’aider sur scène, pour avoir une direction. Ma prestation à MUTEK l’année passée sonnait vraiment différemment des répétitions. Chaque fois c’est différent. C’est un autre aspect qui est très intéressant et que j’aime bien, une forme d’instabilité.
PAN M 360 : As-tu eu l’occasion d’aller visiter des scènes house à l’extérieur du Canada? Qu’en as-tu retenu?
Ellxandra : Je suis allée au festival Mouvement à Détroit, oh my God! C’était tellement chargé d’énergie et d’histoire, j’ai vraiment beaucoup adoré cette ville. Je suis déjà allée à Chicago, j’ai beaucoup aussi aimé. J’étais à Berlin cet été, un peu dangereux comme ville, parce que wow, ça ne s’arrête jamais! Mention spéciale au Mexique, surtout Guadalajara. J’ai passé cinq mois récemment là-bas, les scènes sont grandissantes, c’est un pays d’abondance.
PAN M 360 : Pour conclure, quelques mots sur la scène électronique locale?
Ellxandra : Je dirais qu’elle est changeante et très diversifiée. Il y a tellement de choses à dire dessus. Je trouve que le bonheur de cette ville, ce sont les allers et sorties en fait, c’est une ville d’immigrants, ça bouge et ça se sent. On a une scène très particulière ici, où on va être un peu des précurseurs de scènes qui vont marcher plus tard ailleurs. Je trouve qu’on est très innovateurs.