baroque / classique / musique sacrée

L’OM et YNS choisissent l’immersion du Messie à la Basilique Notre-Dame

par Alain Brunet

La Basilique Notre-Dame accueillait lundi le premier de deux concerts de l’incontournable Messie de Händel par l’Orchestre Métropolitain (OM), son Chœur ​​​ et son chef Yannick Nézet-Séguin, de retour chez lui au temps des Fêtes.

Assister au Messie de Händel dans un tel temple catholique est en soi une expérience d’immersion caractérisée par une acoustique particulière : plus de réverbération que dans une salle conçue pour la musique, moins d’intelligibilité avec l’augmentation de la distance entre la scène et le banc d’église; lorsqu’on dépasse la moitié du parquet vers le fond, la limpidité décline. La perception du son est donc différente selon la position du siège nais bon, c’est aussi l’idée de se recueillir au temps des Fêtes et profiter aussi de l’ambiance inhérente à la Basilique Notre-Dame de Montréal.

Yannick Nézet-Séguin a parfaitement saisi cet enjeu acoustique et mis en œuvre pour ces lieux un Messie interprété avec douceur, sobriété, recueillement et précision. La courbe de l’intensité dramatique a aussi bien été planifiée par le chef québécois, une première partie pastorale et réconfortante (prophéties et Nativité) la deuxième partie (passion, résurrection et ascension du Christ) culminant à la 39e station avec le fameux Alléluia de la résurrection chanté par le chœur, suivi d’une troisième partie plus courte et plus abstraite, méditation compositionnelle de Händel sur la rédemption chrétienne.

Du casting des solistes, on aura retenu d’abord l’apport circonspect de la mezzo Emily D’Angelo, ayant plusieurs fois atteint l’équilibre idéal entre l’expressivité fervente du texte religieux et cet état mystique perceptible dans la rondeur de sa voix, état intrinsèque à l’interprétation du chant sacré.

Le ténor Frédéric Antoun a aussi été éloquent et solide dans le contexte, il serait toutefois intéressant d’en savoir plus long de sa part sur son assomption de légères aspérités dans le timbre de certains passages.

La soprano Anna- Sophie Neher aura aussi brillé avec sobriété, pureté et puissance, le casting de l’OM s’est aussi avéré très pertinent en ce sens, soit dans ses 9 interventions au cours des 47 stations du Messie.

Notons également que le baryton Geoffroy Salvas a brillamment remplacé son collègue Jonathon Adams.

La neige et le froid de cette soirée de lundi constituaient un contexte parfait pour marcher dans les rues et se réfugier au chaud d’un tel programme dans le plus considérable des temples chrétiens du centre-ville de Montréal. Expérience de tradition et de spiritualité au solstice d’hiver, quelle que soit la nature de notre croyance ou de notre scepticisme quant à l’au-delà.

crédit photo: François Goupil

LE MESSIE EST JOUÉ DE NOUVEAU PAR L’OM À LA BASILIQUE NOTRE-DAME DE MONTRÉL, MERCREDI 11 DÉCEMBRE. BILLETS ICI

baroque / classique occidental

Un Noël baroque avec Arion | Quand la vielle à roue réveille l’esprit des fêtes

par Judith Hamel

Dimanche après-midi, l’orchestre baroque Arion se produisait devant une salle bien remplie à la salle Bourgie, proposant un programme consacré aux Noëls français, suisses et allemands. Dans une instrumentation mêlant cordes, clavecin, théorbe et basson, trois solistes — à la flûte, au hautbois et à la vielle à roue — sont venus enrichir ce concert où se succédaient des airs de Noëls baroques, tantôt bien connus, tantôt obscurs.

Le concert s’est ouvert avec l’extrait « Où s’en vont ces gais bergers » de la Simphonie des Noëls de Michel-Richard Delalande, un choix d’air familier qui a donné un ton enjoué au concert. 

Mathieu Lussier a ensuite présenté la première soliste, Tobie Miller, une joueuse de vielle à roue virtuose réputée. Alors qu’il l’annonçait, c’est plutôt le flûtiste Vincent Lauzer qui est entré en scène, déclenchant un rire franc du public. Ce moment léger a été suivi par le Concerto n4 « Noëls suisses » de Michel Corrette, une pièce pour flûte à bec et ensemble qui, dans un mélange d’espièglerie et de virtuosité, a permis à Vincent Lauzer de briller par son expressivité. 

« C’est marrant, ça sonne comme la flûte à bec, la vielle à roue », annonce Mathieu Lussier en référence à sa coquille. Cette fois, Tobie Miller entre véritablement en scène pour interpréter une œuvre de Nicolas Chédeville, le Concerto « Les Plaisirs de la Saint-Martin ». Cette pièce célèbre la Saint-Martin qui autrefois apportait des célébrations presque aussi importantes que la fête du Saint-Nicolas. Bien que l’œuvre soit de Chédeville, celui-ci aurait probablement eu des problèmes de droits d’auteur aujourd’hui puisqu’il emprunte largement ses matériaux de Vivaldi. 

Puis, le troisième soliste, Daniel Lanthier au hautbois, a offert une interprétation du Concerto a 5 con oboe obligato de Bonaventure Gilles. Son jeu habité et expressif donnait envie de se retrouver sur scène à leurs côtés. La musique semblait palpable tant l’énergie du soliste et des musicien·nes était communicative.

Avant l’entracte, l’ensemble a interprété sept airs de Noël de Charpentier, clôturant ainsi la première partie du concert. Mathieu Lussier en a profité pour inviter le public à glisser un disque d’Arion dans leurs bas de Noël cette année. Une suggestion qui donne envie d’opter pour une bande-son baroque pour les festivités de cette année !

Pendant l’entracte, des projections éducatives ont offert des informations sur l’accord des instruments baroques, sur la fabrication des instruments d’époque et sur le répertoire présenté. Un beau moyen pour contextualiser leur démarche artistique et enrichir l’expérience du public.

Au retour, Vincent Lauzer a repris la scène avec le Concerto n° 5 « Noël allemand » de Michel Corrette. Le mouvement lent captait par sa délicatesse, tandis que l’Allegro, avec ses syncopes rythmiques, apportait une touche ludique.

C’est ensuite au tour de Tobie Miller de revenir sur scène. Après nous avoir parlé un peu de l’histoire de la vielle à roue, elle interprète le Concerto « L’Hiver » de Nicolas Chédeville, une œuvre magnifique, notamment pour son Largo, qui place l’instrument soliste à découvert et qui permet d’entendre toutes les subtilités du jeu de la vielle à roue. 

Finalement, l’orchestre a interprété Les Saturnales de François Colin de Blamont, un compositeur peu joué, mais apprécié de l’ensemble. Ce morceau, tiré des Symphonies des Fêtes grecques et romaines, recréait parfaitement l’atmosphère festive de ces célébrations antiques, menant le concert vers sa conclusion. 

Avec un chapeau de Noël sur la volute de la contrebasse et sur la tête de Mathieu Lussier, le concert s’est achevé sur un rappel surprenant : Minuit Chrétien. Ce n’est pas tous les jours qu’un public chante « Peuple debout » accompagné d’une vielle à roue!

alt-folk / électro-minimal / indie pop

Dear Criminals au théâtre Outremont | Rallumer la flamme

par Sami Rixhon

Ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas vu! Comment allez-vous, chers criminels? Le trio électro-minimal Dear Criminals donnait sa première performance d’envergure à Montréal, sa ville d’origine, en cinq ans cette fin de semaine au théâtre Outremont.

C’était au Gesù, en 2019, que Dear Criminals s’était produit pour la dernière fois dans la métropole dans une formule régulière. Il s’est passé beaucoup de choses depuis. On dirait que le monde est devenu un peu plus violent, un peu plus anxiogène. Heureusement qu’il nous reste encore la musique.

Le groupe amorce sa performance avec Visions, Starless et Waste Land, trois morceaux tirés de son album Fatale. Pratiquement tout le projet de 2017 sera interprété ce soir, et ce n’est pas un hasard : les compositions requièrent l’apport d’un quatuor à cordes qui répond présent ce soir (comme un bassiste et un batteur), chose plutôt rare dans les spectacles de Dear Criminals. Pour sa seule performance de l’année à Montréal, autant y aller all in, donc, me disait Frannie en entrevue il y a quelques jours.

Ce qui frappe dans les performances scéniques de Dear Criminals, c’est la capacité du groupe à installer rapidement des ambiances vaporeuses et tendres. Il y a quasiment une tension sensuelle qui flotte dans l’air tant les notes chantées et jouées sont choisies avec soin et parcimonie.

Ce qui frappe également aux oreilles de l’auditeur, encore plus sur scène qu’en studio, c’est à quel point les trois membres de la formation se complètement à merveille. Frannie Holder a une voix cristalline et fragile, Charles Lavoie tricote plutôt dans une sorte de romantisme arrogant alors que Vincent Legault fait vivre le son Dear Criminals de plus belle entouré de ses claviers. Rien ne ressemble à Dear Criminals à Montréal, et c’est tout à leur avantage.

Si la prestation dans son ensemble était fort agréable, on sent tout de même que le groupe se retrouve ce soir plus près du rodage que de la proposition grandiose à laquelle il habitue son public depuis 10 ans déjà. Dear Criminals s’était, au cours de précédents spectacles, notamment attaché les services d’une chorale d’élèves du secondaire (à l’église Saint-Jean-Baptiste, qui plus est), d’effets 3D ou de danseurs contemporains.

La proposition du jour est plus convenue… et ce n’est pas plus mal comme ça. Le trio a besoin de se retrouver avec ses anciennes chansons, il a besoin de rallumer la flamme avant de revenir sur les planches avec un concept encore plus fou. L’année 2025 signera probablement d’ailleurs une nouvelle production scénique ou studio pour le groupe, encore une fois, de source sûre (l’information vient de Frannie Holder, en fait. Il n’y a pas plus fiable).

Dear Criminals clôture le segment régulier de son spectacle avec Stay Tonight, probablement la plus belle chanson que le groupe ait jamais écrite. J’entretiens un rapport un peu particulier avec ce morceau. Je l’avais entendu en mai 2020, alors que la Covid faisait rage, au cabaret Lion d’Or. Le projet s’appelait Lone Ride. J’étais cloîtré derrière trois murs de plexiglas. J’étais seul sur scène, eux, de l’autre côté, étaient trois à jouer et à me regarder. Drôle d’époque, hein. Ça a l’air loin tout d’un coup. Je n’avais eu droit qu’à une chanson, il fallait que je laisse ma place à une autre personne seule ensuite. Tout ça n’a duré que trois, quatre minutes, et pourtant, c’est resté. Je considère encore cet instant comme étant l’une des expériences musicales les plus fortes vécue ces dernières années.

Je réentendais pour la première fois cette chanson en live. C’était 800 fois moins intime (800 étant le nombre de personnes présentes ce soir), et pourtant, ça m’a fait réaliser le chemin qu’on a tous parcouru depuis.

Ça fait du bien de se retrouver.

LISTE DES CHANSONS AU PROGRAMME

1. Visions
2. Starless
3. Waste Land
4. Little Thief
5. Yet Not the End
6. Mark my Words
7. Nelly
8. Coldwave
9. Gravedigger
10. Song for Elisabeth
11. Lover’s Suicide
12. At Bay
13. Lies in Blue
14. Lala
15. Coco
16. Rose
17. Slowdisco
18. Stay Tonight

Rappel

1. 7
2. Petite mort
3. Where We Started

Crédits photo : @yagubphotography

chanson keb franco / Neo-soul / R&B

Rau_Ze au Club Soda | La voix d’une jeunesse montréalaise

par Sami Rixhon

Braver le froid pour une dose de R&B, une autre de soul. Rau_Ze, projet gravitant autour d’un jeune duo formé par Rose Perron et Félix Paul, s’offrait une supplémentaire du lancement de Virer nos vies au Club Soda, son premier en carrière. En fait, pas vraiment.

Pas vraiment, car la salle de la rue Saint-Laurent avait, il y a un peu plus de deux ans, vu Rau_Ze remporter la 26e édition des Francouvertes. Il y avait en quelque sorte une boucle à boucler là-bas, sur ces planches, avant d’aller atteindre encore de plus hauts sommets.

Talkin’ ’bout my generation

La file devant le Club Soda s’étend sur la moitié du bloc plusieurs dizaines de minutes après l’ouverture des portes. Le vestiaire est plein (littéralement) et on peine à se trouver une place au balcon. La ferveur est bien là, réelle.

Rau_Ze et une demi-douzaine de musiciens accèdent à la scène et ouvrent leur prestation sur la chanson-titre de leur album, Virer nos vies. Tout le monde le répète, tout le monde sait déjà, mais qu’est-ce que Rose Perron a un don pour chanter. Sa personnalité est unique, elle respire l’assurance plus elle se laisse emporter par ses envolées vocales. Perron semble pourtant tout de suite plus timide quand les mots qu’elle prononce ne sont pas agrémentés de notes de musique, quand elle s’adresse d’une manière impromptue à une foule si fidèle entre deux chansons. La musique transforme l’être.

Sumerset, Pas la peine, L’Habitude (surtout L’Habitude) : Rau_Ze peut, à peine six mois après le lancement de son album, déjà s’appuyer sur de vrais hits se trouvant probablement sur nombre de playlists de Montréalais dans le vent. J’ai d’ailleurs vu passer le nom du duo plusieurs fois ces derniers jours dans les rétrospectives Spotify et Apple Music de mes amis. C’est simple : Rau_Ze est le plus grand phénomène musical de la génération Z au Québec depuis Hubert Lenoir, en 2018. Ce n’est pas rien, de remplir complètement le Club Soda après un premier lancement réussi, qui avait eu lieu dans une salle deux fois plus petite, et sans avoir sorti du nouveau matériel depuis.

Rau_Ze joue toutes les pièces de Virer nos vies, s’offre une reprise de Claude Dubois, Femmes de rêve, et clôture le tout avec deux jams déments de free-punk-jazz-psychédélique-expérimental qui laissent place à des pogos au pied du parterre.

Au début de leur vingtaine, les membres de Rau_Ze sont un vrai exemple de réussite et de rigueur pour quiconque de leur âge qui aspire à se surpasser. L’offre est professionnelle et particulièrement mature, et le plafond, déjà très haut, s’élèvera plus le groupe prendra de l’expérience.

Un MTELUS en leur compagnie dans un an ou deux, ce sera diablement plaisant.

Crédits photo : Camille Gladu-Drouin

afrobeat / konpa

Joé Dwèt Filé a enflammé l’Olympia

par Sandra Gasana

C’est une foule immense qui faisait la file sous les températures hivernales pour venir voir à l’Olympia LA star du konpa de l’heure: Joé Dwèt Filé. Les caméras étaient toutes braquées sur la scène, avant même qu’il fasse son apparition. Casquette noire, lunettes fumées, muscles bien en évidence, et muni d’un micro rouge vif, c’est ainsi qu’il apparaît, accompagné de ses cinq musiciens.

« Montréal, comment ça va ce soir ? » répète-t-il à plusieurs reprises durant le concert. D’ailleurs, il a déjà une date de prévue pour le 12 décembre 2025 au Centre Bell, rien de moins. Avec un public majoritairement féminin et jeune, on pouvait tout de même remarquer plusieurs générations dans la salle, avec une prédominance de la communauté haïtienne. « Y a-t-il des femmes célibataires dans la salle ? », demande-t-il. « Beaucoup de femmes souffrent en ce moment et cette chanson est pour elles », annonce-t-il avant les morceaux tirés de ses albums Goumin Terminé, Calypso : Winter Edition ou encore Daddy9. Plusieurs fois durant le concert, la foule, qui connaissait les paroles par cœur, chantait à sa place. Avec ses musiciens, ils alternaient entre afrobeat à la manière de Tayc, et konpa, ce qui plaisait énormément aux amateurs de ce style de musique. Il rajoutait sa fameuse signature « zigizigizigazi » qui venait ponctuer ses chansons, annonçant l’entrée des claviers synthétiques.

« Y a-t-il des gens mariés dans la salle ? », demande-t-il avant de chanter Oui. Bref, les histoires d’amour sont au cœur des chansons de ce crooner des temps modernes. Certains morceaux étaient plus courts, permettant un enchaînement plus fluide entre eux.

JDF interagissait souvent avec la foule, notamment lorsqu’il a fait monter deux jeunes femmes sur scène pour chanter le morceau Confiance avec lui. « Attention, vous allez représenter Montréal ce soir », leur dit-il, histoire de leur mettre la pression mais elles ont tout de même relevé le défi, alors qu’une d’entre elles a fondu en larmes après l’exercice. Un moment qu’elles chériront longtemps.

Il termine avec un enchainement de tous ses tubes à succès, Kitem Ale, Abimé, ou encore Merci à mon ex et Jolie madame, sur lequel il fait un featuring avec Ronisia. Pour certaines de ses chansons, il suffisait d’entendre la première note pour que le public se mette à hurler. C’était le cas pour Pozysion, un autre de ses hits. Il prend même le temps de faire un petit concours avec quatre personnes du public qui devaient reconnaître les morceaux le plus rapidement possible. 

Il finit par faire un bain de foule en traversant le parterre de l’Olympia, les cellulaires le suivant à chaque pas, accompagné de son garde du corps, avant de terminer la soirée avec les deux plus gros titres de sa carrière Fem Voyé et bien entendu 4 Kampé, qui en est à 15 millions d’écoute sur Spotify et autant de vues sur YouTube depuis sa sortie il y a quelques semaines.
Seul hic de la soirée, le temps que ça a pris pour sortir de l’Olympia à cause de la longue file pour récupérer les manteaux. Après un show de 90 minutes, il nous a pris presque une heure pour sortir des lieux. Une organisation qui aurait pu être mieux gérée à mon avis.

Crédit Photo: Shadia Uwanje


Bond symphonique, d’abord un festival des chansons-thèmes

par Alain Brunet

Les fans québécois de l’agent 007 sont servis ce week-end avec un programme de 18 exécutions symphoniques et un rappel. Ils remplissent 3 salles Wilfrid-Pelletier pour y apprécier un programme largement dominé par les chansons thèmes/ bandes annonces d’autant de films de James Bond, fameux agent fictif de Her Majesty’s Secret Services. Sous la baguette de Francis Choinière, l’Orchestre FilmHarmonique présente précisément 6 extraits instrumentaux et 13 bandes annonces sonores par Véronique Dicaire et Benoît McGinnis.

Ces 19 exécutions mettent en relief le travail archi-connu des compositeurs et paroliers Monty Norman (fameux thème de James Bond), John Barry (Thunderball, Goldfinger, We Have All the Time in the World, Moonraker, A View to a Kill, You Only Live Twice, Diamonds Are Forever), Lionel Bart (From Russia with Love), Pål Waaktaar du groupe A-Ha (The Living Daylights), Marvin Hamlich & Carole Bayer (Nobody Does It Better), Jimmy Napes & Sam Smith (Writing’s on the Wall), Bono & The Edge (Goldeneye), Duran Duran (A View to a Kill), Leslie Bricusse (You Only Live Twice), Michel Colombier & Madonna & Mirwais Ahmadza (Die Another Day), David Arnold (You Know my Name, Night at the Opera, The World Is Not Enough), Paul & Linda McCartney (Live and Let Die), Adele & Paul Epworth (Skyfall).

Fait à noter, la direction artistique de ce marathon Bond exclut des projections d’extraits de films et mise plutôt sur l’animation divertissante des chanteurs et leur interprétation de tous ces mégatubes gravés dans l’imaginaire collectif planétaire.

Ainsi, sur les 19 exécutions, seules 6 sont strictement instrumentales. On en déduit qu’on a estimé que le grand public retient essentiellement la chanson thème de ces fameux blockbusters, ces chants qu’on sert en guise de bande-annonce et qu’on fait jouer pendant le générique.

À n’en point douter, Véronique Dicaire et Benoît McGinnis ont une solide expérience en théâtre ou en humour, et c’est un plus pour la bonne marche de cette production. Ils expriment à qui mieux mieux leur attachement à ces blockbusters mettant en vedette l’agent dévoué à la couronne britannique, personnage de fiction imaginé dans les années 50 par le romancier anglais Ian Fleming (1908-1964). On aura retenu entre autres que Véronique a un faible pour Sean Connery et Daniel Craig!

On sait aussi l’indéniable talent d’acteur de Benoît McGinnis, on reconnaît sa présence sur scène, et on peut aussi apprécier ses réelles aptitudes de ténor/contre-ténor… néanmoins inférieures à celle de Véronique Dicaire (mezzo et contralto), plus puissante, plus texturée, meilleure technicienne en tous points et, comme chacun sait, capable d’imiter moult chanteuses à voix. Cela dit, la différence de niveau des interprètes importe peu car les interventions théâtralisées entre chaque pièce sont aussi des facteurs propices à la réussite de l’entreprise.

Quant à l’orchestre FilmHarmonique, on observe que la direction de Francis Choinière se rapproche davantage d’un orchestre symphonique que de cette forme hybride entre symphonie moderne et big band de jazz que souhaitaient certains compositeurs cruciaux de ces bandes originales, surtout ceux des années 60 et 70. On n’a pas toujours cet éclat souhaité des instruments à vent, notamment les cors et les trombones qu’aimait tant John Barry, pour ne citer que lui. Mais bon, on imagine que chaque soirée à venir verra l’orchestre prendre du muscle et se bonifier.

Et on vous assure que les fans passent une belle soirée, que le plaisir soit coupable ou pleinement assumé.

Crédit photo: Karl André

Bond Symphonique est présenté les 6 et 7 décembre à la Salle Wilfrid-Pelletier, aussi le 8 mars prochain

Le 27 mars au Grand Théâtre de Québec

classique / jazz / pop / pop orchestrale / trad québécois

Scintillante magie de Noël, de l’OM… et d’Antoine Gratton!

par Frédéric Cardin

Loin de moi l’idée, par ce titre, de diminuer la qualité des prestations offertes hier par les artistes invités lors du (désormais) classique concert de Noël éclectique de l’Orchestre métropolitain et Yannick Nézet-Séguin. Mélissa Bédard en impose dans Glory Alleluia et le Minuit, chrétiens. Sa voix de contralto ample et très juste, sans fioritures inutiles, s’est agréablement démarquée. Kim Richardson fait de même avec d’autres classiques comme Noël blanc ou I’ll be Home for Christmas. Et puis la sensation lyrique de l’heure, Élizabeth St-Gelais nous a offert les Anges dans nos campagnes et un Sainte Nuit (en innu) plutôt réussis. Un très beau duo avec Michel Rivard aussi, avec un Gens du pays bien senti. Ce dernier a également offert C’est dans la famille, initialement un peu fragile, mais authentique. 

Taurey Butler, M. Charlie Brown Christmas à Bourgie, avec les excellents Wali Muhammad à la batterie et Morgan Moore à la contrebasse, y est allé de jolies envolées jazz au piano (pas de Charlie Brown, cela dit. C’est réservé pour l’autre salle) dans quelques titres traditionnels du répertoire, et le violoniste trad David Boulanger nous a lancé un très agréable Petit concerto pour Carignan et orchestre d’André Gagnon, avec Oleg Larshin, premier violon de l’OM. Contrastes bien maîtrisés entre les solos ‘’classiques’’ de Larshin et trad de Boulanger, échos modernes de Yehudi Menuhin et de Jean Carignan, pour qui l’œuvre a été composée. Un vrai chef-d’œuvre miniature, qui était accompagné par un autre incontournable de Dédé : un extrait de son album Noël de 1992, la chaleureuse et doucement mélancolique Ronde des bergers. Je n’avais jamais porté attention à ce détail auparavant, mais les solos de cor y sont redoutables! Même le toujours parfait Louis-Philippe Marsolais l’a appris à ses dépens (Oh, à peine un accroc. Mais dans son cas, c’est rarissime). Bien entendu, la finale a été assurée par tout le monde en même temps, communion indispensable qui s’est incarnée par le classique de Beau Dommages/Michel Rivard : 23 décembre. Grande réussite rassembleuse écuménique à l’image du Québec à la fois ‘’de souche’’ et coloré par sa diversité moderne. Bravo. 

Bref, tout le monde était à la hauteur, et plus encore. La bonne humeur régnait, Yannick dirigeait avec son habituel pep, les musiciens de l’OM souriaient amplement, la scène et la Maison symphonique dans son ensemble brillaient de mille couleurs, dans une ambiance molletonnée et invitante. Chapeau bas, donc. Mais, la raison pour laquelle je tenais à inscrire le nom d’Antoine Gratton dans mon titre, c’est que le lien suprême entre tous les morceaux, toutes les prestations, tous les styles musicaux évoqués dans cette messe laïque et musicale, l’unifiant qui a permis de passer presque deux heures, sans entractes et sans véritables longueurs, bien accrochés au déroulement, cet indispensable secret de la réussite, ce sont les arrangements d’Antoine Gratton.

L’auteur-compositeur-interprète qui s’est un temps fait appeler A Star, est également depuis quelques années un très habile arrangeur pour des concerts pop symphoniques. Hier, il a fait flèche de tout bois grâce à l’originalité des partitions qu’il a réalisées pour l’orchestre et le chœur qui accompagnaient ainsi avec brio les prestations ci-haut mentionnées. Peu importe que les airs soient archi connus, Gratton sait parsemer ses arrangements de multiples surprises pour les oreilles, qu’elles soient harmoniques, coloristiques ou rythmiques. Je prends un exemple parmi d’autres : ce contrepoint entre les clochettes de l’orchestre et les clappements de mains des choristes dans un passage de My Favourite Things. Réjouissant. 

L’arrangeur est trop souvent oublié dans ce genre d’événement, mais il ne le faut pas, et surtout pas dans le cas de ce concert qui aurait pu virer à la litanie de mélodies sirupeuses enchaînées interminablement, s’il eut été d’autres plumes moins créatives. Des milliers de soupers de dinde, de tourtière et d’atocas se ressemblent un peu partout au Québec pendant les fêtes. Mais il y a parfois un.e chef.fe en cuisine, caché.e derrière ses chaudrons, qui réussit à réinventer la sauce et unifier le tout de façon assez originale pour qu’on la remarque. Et cela sans tomber dans une témérité exagérée qui laisserait un goût amer à l’expérience. Dans des cas comme celui-là, invitons cette personne à la table et honorons-la (ce qui a d’ailleurs été fait sur scène hier). 

Ne doutons pas un seul instant qu’il y aura une édition 2025.

classique occidental

Schulich | Horatio Quartet remporte le Concours de musique de chambre 2024-2025

par Judith Hamel

Après quatre vibrantes performances des ensembles finalistes, le Horatio Quartet a remporté le grand prix du concours annuel de musique de chambre d’École de musique Schulich. Les musiciens remportent donc une résidence à l’Université Mozarteum à Salzbourg ainsi qu’une performance au Centre canadien d’architecture dans le cadre de la série Bon-Pasteur de Schulich. 

La finale a eu lieu au Tanna Schulich Hall ainsi qu’en diffusion en direct. Le jury de cette étape était constitué de Catherine Cosbey, Sara Laimon, Jacqueline Leclair et David Stewart. 

C’est l’ensemble Trio At Work, composé d’Abigail Sunde au violon, Conrad Sobieraj au violoncelle et Jisu Yeum au piano, qui a ouvert la soirée avec l’Allegro du Trio pour violon, violoncelle et piano no 3 de Mozart. Leur interprétation, d’une belle légèreté, nous a plongée dans l’élégance et la clarté de Mozart. Dans le Trio pour violon, violoncelle et piano no 1 de Mendelssohn qui a suivi, une certaine rigidité se faisait sentir par moments, privant parfois l’interprétation d’une vulnérabilité, mais les points culminants étaient bien maîtrisés musicalement. Les articulations nettes et les nuances justes ont démontré leur grande maîtrise technique. 

Le deuxième ensemble à se produire, le Lyra Quartet, regroupait Lucy Nemeth et Jessica Tovey aux violons, Hudson Maness à l’alto, et Ellamay Mantie au violoncelle. Dès les premières mesures de l’Allegro du Quatuor à cordes n2 en fa majeur, op. 77 de Haydn, leur cohésion s’est présentée avec évidence. Le placement en demi-cercle propre aux quatuors à cordes certes, favorise une communication visuelle et gestuelle fluide. Tout de même, malgré ce certain avantage, chaque mouvement semblait naturellement amplifié par l’autre, nous donnant l’impression qu’iels respiraient d’un même souffle. Puis, leur performance a culminé avec le Quatuor à cordes no 3 en fa majeur, op. 73 de Chostakovitch. Tour à tour porteurs d’innocence et de gravité, iels ont su exploiter tout le potentiel dynamique de cette œuvre. Leurs phrasés impeccables et leur justesse, tant sur le plan de l’intonation que de l’émotion, ont offert un moment d’une intensité rare, à la fois rigoureux et profondément humain.

Après l’entracte, le Horatio Quartet, composé de Justin Saulnier et Joey Machin aux violons, Alex Beggs à l’alto et Gabriel Vincent au violoncelle, a choisi d’interpréter le Quatuor à cordes en ré majeur no 4, op. 20 de Haydn. Dès les premiers traits, leur précision exemplaire et leur solidité se sont imposées. Le premier violon, porté par Justin Saulnier, a brillamment soutenu son rôle prédominant tout au long de l’œuvre, insufflant un dynamisme constant à l’ensemble. Leur interprétation s’est poursuivie avec le premier mouvement du Quatuor à cordes en sol mineur, op. 10 de Debussy où ils ont fait preuve de sensibilité et de contrastes expressifs. 

La soirée s’est conclue avec le Trio Alexa, composé de Joseph Tsao au violon, Alexander Lewis au violoncelle et Chris Peng au piano. Leur prestation a débuté avec le premier mouvement du Trio pour violon, violoncelle et piano no 1 en ré majeur, op. 70 de Beethoven où le piano a su suggérer une douceur à l’ensemble. Ils ont ensuite interprété le Trio pour violon, violoncelle et piano en sol mineur, op.15 de Smetana, qui s’ouvre avec un solo de violon poignant suivi de l’entrée du piano qui apporte profondeur et nuances. Cette œuvre est remarquablement équilibrée : elle offre à chacun·e une voix individuelle permettant de faire briller son instrument et sa musicalité propre. Leur interprétation respirait, exaltant les émotions intenses et vibrantes de cette œuvre.

classique / jazz / jazz vocal

Schulich | Classiques de Noël avec l’Orchestre jazz de McGill

par Vitta Morales

Le fait que l’interprétation de la Nutcracker Suite de Duke Ellington par l’Orchestre de jazz de McGill ait été donnée en même temps que la première véritable soirée enneigée de l’année a été une agréable coïncidence. Ce fait n’a pas échappé à la cheffe d’orchestre Marianne Trudel, qui n’a pas manqué de le souligner à la blague avant que l’orchestre n’entame ses morceaux festifs. « Douillet » n’est pas le premier superlatif que j’emploierais pour qualifier la salle Tanna Schulich , mais dans ces circonstances, on avait l’impression que le public s’était rassemblé dans le but de se réchauffer et de se perdre dans les airs d’un big band classique des années 60. En vérité, il ne nous manquait que des mugs de chocolat chaud.

Le ballet Casse-Noisette de Tchaïkovski est, bien sûr, l’un des favoris du domaine public et a été (ré)interprété d’innombrables façons par un nombre incalculable de musiciens. Ellington et Strayhorn, cependant, ont réussi à créer quelque chose de vraiment spécial en 1960 avec leur arrangement de ce prolifique ballet russe ; et l’exécution de l’Orchestre de jazz de McGill a été plus que solide. Il était impressionnant, comme toujours, de voir de si jeunes musiciens atteindre un tel niveau de jeu. Certains d’entre eux, je dirais, ont déjà le cran d’abandonner leurs études et de jouer professionnellement (je ne dirai pas qui afin d’éviter la colère potentielle des parents). Cela dit, les concerts d’étudiants comportent presque toujours quelques éléments qui ne sont pas parfaits. Ces éléments sont autant de petits rappels que ces jeunes musiciens sont en fait encore en train d’apprendre.

Ce n’est qu’au troisième mouvement, par exemple, que la basse et la batterie ont finalement imposé un rythme plus assuré et ont cessé d’acquiescer à ceux qui les entouraient. Jouer timidement ne sert en rien le groove, et c’est donc avec soulagement qu’ils ont enfin commencé à se faire confiance. En outre, certains solos des cuivres ont semblé s’égarer par moments. Il convient de mentionner les solistes qui, à l’inverse, ont joué de manière très intentionnelle, notamment Rafael Salazar, Shai Geballe, Maude Fortier et Jeremy Sandfelder (bien que Sandelfer soit un jazzman plus établi à Montréal qui s’est retrouvé remplaçant ce soir-là, ce qui est peut-être un peu injuste pour les étudiants).

Dans la seconde partie du concert, Élizabeth Cormier a interprété une sélection de chansons d’Irving Berlin telles qu’elles ont été arrangées pour Ella Fitzgerald. Ayant récemment assisté à un concert de Caity Gyorgy portant sur un répertoire identique, il était difficile de ne pas avoir une impression de déjà-vu. Je dois dire que Cormier, pour sa part, est une belle chanteuse avec un beau timbre et une excellente présence sur scène ; le seul élément que je qualifierais de perfectible est sa diction en anglais. Un mot gênant ici et là trahit son accent québécois, ce qui n’est peut-être pas idéal pour interpréter le répertoire d’Ella, mais c’est une caractéristique assez inoffensive dans son interprétation.

Dans l’ensemble, je suis d’avis que les membres de l’orchestre peuvent, et doivent, être fiers d’un travail bien fait alors que leur semestre s’achève. Je ne doute pas que, tant que l’envie est là, ces jeunes interprètes continueront à faire des progrès dans leur musicalité. Pour l’instant, ils devraient probablement rattraper un peu de sommeil avant leur session d’hiver. Et peut-être prendre un chocolat chaud…

crédit photo: Tam Lan Truong

classique occidental / musique contemporaine

Schulich | Jouez dans la neige avec l’Ensemble de musique contemporaine

par Judith Hamel

Nous sommes le 4 décembre, et la première neige de l’année tombe sur la ville. Ce soir, on se retrouve au centre-ville, dans la Salle Multimédia du pavillon Elizabeth Wirth. Pendant que l’Orchestre Jazz de McGill se délie les doigts dans le Tanna Schulich Hall, l’Ensemble de musique contemporaine de McGill, sous la direction de Mélanie Léonard, nous offre un concert de circonstance, placé sous le thème de la neige. 

En guise d’entrée, nous avons assisté à la création de l’œuvre Distant Paths du compositeur Kalen Smith. Composée dans le cadre de sa thèse, cette pièce d’une quinzaine de minutes mobilise une quinzaine de musiciens comprenant bois, cuivres, cordes, harpe, piano, batterie et autres percussions. L’œuvre explore les contrastes : linéarité et non-linéarité, tonalité et atonalité, mouvement et stoïcité, fondus enchaînés et ruptures abruptes. Aux cordes, souvent porteuses de lignes mouvantes, s’ajoutait une batterie résolument carrée insufflant une mouvance stable ou… une stabilité mouvante. 

Tout au long de la pièce, l’opposition entre tonalité et atonalité s’impose comme axe central. Les lignes atonales se multiplient et culminent en climax tonaux, notamment portés par des cuivres aux couleurs de fanfare. Lorsque la batterie se mêle aux clés du saxophone et aux frappés d’archet, se dévoile à nous le riche travail des textures fait par le compositeur. L’œuvre s’achève sur un long coup de tam-tam et de cymbale qui est laissé en résonance jusqu’à la dernière parcelle de son.

La deuxième œuvre de la soirée nous transporte dans l’univers glacé et poétique de Schnee (Neige), du danois Hans Abrahamsen. Cette œuvre d’une heure plonge l’auditoire dans un état méditatif pour nous présenter la neige sous de multiples facettes : de l’air glacial à la glace mordante, de la délicatesse des flocons à la féérie mystérieuse d’un paysage hivernal.

Deux sources d’inspiration ont guidé Abrahamsen dans la création de cette œuvre : la neige, bien sûr, mais aussi les canons de Bach, qu’il avait orchestrés plusieurs années auparavant. Si l’influence bachienne se dissipe dans les sonorités contemporaines de Schnee, l’œuvre reste marquée par la rigueur des structures et par le pouvoir hypnotique qui rappelle le génie de Bach. 

Le compositeur nous entraîne dans un voyage qui transcende notre perception du temps. Les premiers canons, d’une dizaine de minutes chacun, semblent étirer le temps, tandis que le déroulement des canons s’accélère progressivement, culminant avec un dixième d’à peine une minute. Cette progression temporelle reflète la nature changeante de la neige : tantôt apaisante, tantôt tourbillonnante et imprévisible. Au fil de l’œuvre, on ressent, à travers la musique, le froid mordant, l’étouffement sonore propre aux paysages enneigés et la danse des flocons, des plus délicats aux plus déchaînés. 

Les musicien·nes ont brillamment su donner vie à ce concert. Leur jeu technique était plus qu’à point et leur interprétation a rendu justice à la complexité de la partition. Le placement des musicien·nes dans Schnee était aussi très intéressant. En effet, les pianos placés face à face, de chaque côté de la scène, créaient un dialogue stéréophonique, offrant à l’auditoire une largeur de son remarquable. 

Les jazzeux et les fans de musique contemporaine se sont finalement retrouvé·es dehors sous une légère tempête de neige. Peut-être que celle à l’intérieur était plus agréable après tout… 

crédit photo : Tam Lan Truong

Brésil / jazz brésilien / soul/R&B

Festival de Jazz – La Brésilienne Luedji Luna attire la neige à Montréal

par Sandra Gasana

Malgré la première neige de la saison, cela n’a pas empêché les mélomanes à venir passer un agréable moment au Studio TD pour venir voir la Bahianaise Luedji Luna. Ce n’est pas sa première fois dans la métropole, mais une première dans cette salle. « Je me souviens de mon premier séjour à Montréal, c’était pour le Festival de Jazz, en extérieur. », se remémore-t-elle. La plupart des morceaux étaient tirés de son troisième album Bom Mesmo é Estar Debaixo d’Àgua Deluxe, avec un morceau qui porte le même nom. Accompagnée de ses musiciens, batterie, basse, claviers et percussions, elle a débarquée sur scène vêtue d’une robe grise électrique. Avec son mélange unique de jazz, de rythmes afro-brésiliens, de soul et de RnB, elle nous offre une version brésilienne de certains classiques qui ont bercé notre jeunesse. Elle débute d’ailleurs avec Metàfora, qui semble tout droit sorti des années 90, ou encore Pele sur lequel elle a collaboré avec Mereba, une artiste éthiopienne, qui n’était pas là mais dont on a entendu la voix.

Elle reprend deux classiques durant son spectacle, No Ordinary Love, de Sade ainsi qu’un morceau de l’artiste brésilien Djavan, mais en y rajoutant sa propre touche. D’ailleurs, elle a lancé le concept « Luedji Sings Sade » au Brésil. Bien entendu, elle ne pouvait pas partir sans nous interpréter le morceau qui a marqué un tournant dans sa carrière, Banho de Folhas, sur lequel elle invite la foule à danser, à son grand plaisir.

La première partie était assurée par Glowzi, une DJ / chanteuse accompagnée d’une trompettiste et ensemble, elles nous ont mis dans l’ambiance parfaite pour accueillir Luedji, mêlant soul, électro et RnB et jazz. Elles en ont profité pour lancer un message de solidarité envers la Palestine, le Darfour et la région du Tigray.

chanson keb franco / indie rock / pop-rock

Émile Bourgault à la Sala Rossa | Le fêté fait les choses en grand

par Sami Rixhon

Émile Bourgault a eu 21 ans! Ce soir même, le 27 novembre. À la place de se payer une simple sortie au bar entre amis, le jeune musicien, originaire de la Rive-Sud de Montréal, s’est offert pour l’occasion un spectacle à la Sala Rossa. La bande est probablement allée célébrer Bourgault avec quelques coups arrosés par la suite, en fait, mais commençons par l’essentiel, la musique…

Ça fait longtemps que je suis Émile Bourgault. Je l’ai connu il y a plus de trois ans comme cet étudiant indécis du cégep du Vieux Montréal. Puis, j’ai apprécié son parcours aux Francouvertes 2022, et je l’ai vu jouer quelques mois plus tard à Osheaga, sur la scène des Arbres, devant une petite centaine de personnes. Il a même donné une performance dans le jardin de mon père, c’est dire!

Et à chaque fois, c’est de mieux en mieux. On voit qu’il prend de l’expérience et de l’assurance. Ce n’est pas la première fois que je l’écris, mais je suis presque certain qu’il foulera les planches du Club Soda pour son projet solo très bientôt.

Dans deux ans, gros max.

Bourgault ouvre son spectacle avec la pièce-titre de son, pour l’instant, unique album, Tant mieux, puis poursuit sur Nœud coulant. Il a un petit côté Pierre Lapointe sur ce genre de chansons tristes, côté magnifié par la précieuse aide du mélancolique par excellence Félix Dyotte, qui a assuré la réalisation de son projet long. Plus Émile Bourgault aura mûri, plus il aura vécu de peines, et plus il aura de belles choses à dire (que l’on ressentira encore davantage, comme public) dans les titres où le spleen est autant mis de l’avant.

C’est pour l’instant sur les chansons plus pop que Bourgault excelle, d’après moi, comme Juillet ou Les aiguilles, qui donne l’impression d’écouter un Thierry Larose venant de découvrir le saxophone – excellentes lignes de la part de Florence Beauquier-Léger au sax, d’ailleurs, probablement la musicienne accompagnatrice s’étant le mieux démarquée de cette soirée. Monique tricote quant à elle plus dans le rock, et très bien, en plus de ça, ce qui nous fait dire qu’Émile Bourgault devrait peut-être davantage explorer cette avenue pour aller chercher un son d’autant plus éclectique.

« Je sais que j’ai quand même une crowd en fin de session, donc merci à vous d’être là », souffle-t-il avant d’interpréter Ma dépendance.

Tout au long de son spectacle, Émile Bourgault s’offrira des duos avec divers artistes de la scène émergente, notamment Sofia Duhaime (sur Nos amours cimetières), Sam Tanguay, sa copine, (sur L’oreiller) et Otto (sur Si tu pars). C’est pourtant l’interprétation d’Ailleurs, avec Louis-Julien Durso, qui volera la vedette pendant la soirée. Les deux jeunes hommes se côtoient depuis des années, et ça se ressent. On perçoit directement cette alchimie, ce petit plus quand ils prennent le micro ensemble. C’est d’ailleurs Durso qui s’est occupé de la mise en scène du spectacle.

Bourgault n’interprétera aucune chanson tirée de ses deux premiers EP pendant sa prestation. Il va préférer des reprises, du nouveau matériel… Même pas Pauvre & malheureux, qui avait eu franchement eu un petit succès au sein de la communauté étudiante mélomane du Vieux-Montréal (et autres cégeps en ville). On comprend qu’Émile regarde devant, il est déterminé et y arrivera très probablement.

Le projet n’a pas atteint sa phase finale, Émile essaie encore de trouver ses marques, mais quand ce sera fait, il faudra être préparé. Ça va débouler rapidement.

Juste avant le rappel, Bourgault interprète Les aiguilles. La salle chante en chœur le refrain, parfaitement. Il n’y a aucun plus beau cadeau. Surtout pour son anniversaire.

Les dauphins et les licornes céréales

Céréales Dauphin. Drôle de nom. La troupe de Sainte-Thérèse se chargeait d’ouvrir le bal avant qu’Émile ne foule les planches plus tard dans la soirée. Je partais avec un certain à priori, je n’avais pas été charmé par leur unique chanson publiée sur les plateformes, Lucky Charms. Mais en live, c’est autre chose.

Le quintette s’en sort très bien sur scène et le niveau technique, pour l’âge des membres (dans le début de la vingtaine), est excellent. Il y a un petit côté The Strokes dans le son, combiné à un style vestimentaire d’élèves modèles du secondaire. Maintenant, il va falloir faire paraître plus de matériel, mais le potentiel est là.

Un nom qui pourrait, sans m’étonner, se retrouver parmi les 21 des Francouvertes dans quelques années.

LISTE DES CHANSONS AU PROGRAMME (ÉMILE BOURGAULT)

1. Tant mieux
2. Nœud coulant
3. Juillet
4. Ma dépendance
5. Nos amours cimetières (avec Sofia Duhaime)
6. Les souvenirs heureux
7. Ailleurs (avec Louis-Julien Durso)
8. L’oreiller (avec Sam Tanguay)
9. Always on my mind (avec Norah Lapointe)
10. Monique
11. J’imagine
12. Si tu pars (avec Otto)
13. Marcher, passer, partir
14. Les aiguilles

RAPPEL

1. Vivre enfin
2. L’alinéa

Crédits photo : Charles-Antoine Marcotte

Inscrivez-vous à l'infolettre