Il arrive que des créateurs avérés et reconnus n’aient plus grand-chose à dire après que leur « heure de pointe » soit passée. Dans plusieurs cas, c’est vrai et dans d’autres, c’est faux. Dans le cas de POLE, c’est faux. Voilà un artiste encore fervent, ayant atteint son maximum de coolitude au tournant des années 2000, et qui n’a pas cessé de chercher depuis lors.
Invité à se produire dans le contexte de Nocturne 6, soit le dernier programme au menu de MUTEK Montréal 2024, l’artiste allemand est parmi les concepteurs du glitch, une alternative germanique au dub, un sous-genre électro alors plongé dans une perspective électroacoustique et une inclination pour le minimalisme dans l’expression. Comme POLE le souligne en interview, le glitch fut une influence importante des artistes fondateurs du dubstep, tel l’Écossais Kode 9 qui succédait à POLE à la SAT, dans la nuit de dimanche à lundi.
Pour faire une histoire courte, il n’y avait rien de nostalgique au programme de POLE , le matériel récent l’emportait largement sur les sons anciens et la redite formelle n’était pas au rendez-vous. Les basses fréquences étaient volontairement exacerbées, au point de générer des vibrations sur tous les plexus rapprochés de la scène. Des problèmes techniques ont un peu cassé le rythme de la prestation mais POLE a repris les choses en mains et conduit son set à bon port. Hormis l’exploitation spéciale des infragraves, on aura aussi décelé plein de menus détails dans sa quête sonore et une réelle expertise du rythme et de la percussion synthétique qui l’engendre – notamment ces effets de cymbales plutôt jazz.
En somme? Les phénomènes de mode et les crispations générationnelles sont les ennemis de la création, en voilà le contre-exemple. Après la pole position, il y a une vie et il fait bon la vivre.
Crédit photo: Bruno Aiello Destombes