Le très actif musicien qu’est le claveciniste et organiste Luc Beauséjour met l’authenticité et l’élégance à l’honneur, sur son nouvel album. L’auditeur est en terrain connu rayon répertoire, alors que l’interprète propose des pages parmi les plus emblématiques et appréciées de l’œuvre pour clavier de Mozart. L’intérêt de cet album réside dans l’approche « historiquement informée » de Beauséjour, qui joue sur un pianoforte fabriqué en 2019 par Rodney Regier et basé sur un modèle du facteur viennois Anton Walter (1752-1826). Instrument préféré de Mozart, il s’est rapidement imposé au XVIIIe siècle comme solution de rechange au clavecin, en permettant notamment des nuances plus dynamiques, une richesse harmonique et l’expression d’un jeu net et précis, notamment dans le registre grave.
Les qualités sonores s’en ressentent favorablement, avec un son moins métallique et légèrement plus cristallin, et les œuvres choisies, interprétées avec l’agilité et la sensibilité artistique de Beauséjour, expriment clairement les possibilités du timbre et la virtuosité des lignes musicales mozartiennes. Particulièrement bien illustrées, de cette manière, sont la Sonate en la majeur K. 331, caractéristique par son Rondo alla turca à l’esprit français, et la Sonate en ut majeur K. 545 qui, malgré son sous-titre de « Sonate facile », contient des passages périlleux comme les gammes rapides et arpèges brisés de l’Allegro ou la basse d’Alberti du mouvement Andante. La Fantaisie en ré mineur vient contrebalancer l’énergie fringante des sonates, avec un lyrisme opératique parsemé d’effets chromatiques sombres.