Jamais là où on l’attend, Quelle Chris est un des acteurs les moins orthodoxes de la scène rap actuelle. Après l’ironie de l’excellentissime Everything’s Fine en duo avec sa compagne Jean Grae, puis la critique sociale de Guns paru l’an dernier, on escomptait une nouvelle galette saupoudrée de soude caustique. D’autant plus que le propos de la première partie du projet parue en 2015 n’était pas particulièrement optimiste. Mais voilà, Innocent Country 2 est ce que le MC originaire de Détroit a fait de plus ensoleillé jusqu’à maintenant.
Le retour de Chris Keys derrière les platines y est pour quelque chose. Ce dernier a imprimé aux nouvelles pièces du rappeur l’atmosphère torride des plages californiennes à proximité desquelles il réside. Toujours marqué par le travail de J Dilla et de Pete Rock, il balance tout en douceur des rythmiques en apnée mâtinées d’accords de piano jazzy. La langueur de ces musiques s’accorde bien aux textes de Quelle Chris qui, sans se départir de sa goguenardise habituelle, sort de sa misanthropie de façade pour tendre la main à son prochain.
Cette fête de fin de soirée estivale compte de nombreux invités dont les plus connus sont Merrill Garbus (Tune-Yards) et Earl Sweatshirt. Ils apportent un peu de variété à un album qui court parfois le risque de devenir trop homogène. Heureusement, Keys n’est jamais à court de bonnes idées et les meilleures viennent surtout en fin de parcours : le rythme funky de la très chouette Sudden Death, les arrangements somptueux de Graphic Bleed Outs et les chœurs gospel de Mirage. Au final, sans être de la même trempe que les deux opus précédents de Quelle Chris, Innocent Country 2 est un très bon cru.