Autant j’ai souvent de la misère, comme on dit en bon québécois, avec la musique classique symphonique, la trouvant emphatique, exagérément dramatique, bref pompier (voilà, c’est dit), autant les « bigue bandes » de jazz, comme disent nos cousins français, me réjouissent. Sans doute est-ce en raison de leur exubérance et de leur caractère foncièrement joyeux, mais avec eux, curieusement, aucun assaut sonique, aucun débordement n’est jamais trop.
Formé de trois batteurs, trois contrebassistes et dix souffleurs, le Supersonic Orchestra est du genre costaud. Et comme en plus cet enregistrement a été fait devant public (au festival de Molde en Norvège), tenez ben votre tuque dans les virages, ça déménage!
Même si ça commence en lion, tout ce beau monde ne roule pas à plein régime tout le temps, les arrangements se font parfois plus intimes et mettent alors en vedette de petites formations au sein de l’ensemble, laissent place à l’improvisation et donnent l’occasion aux ventistes de s’illustrer par quelques solos incendiaires. Quant à la section rythmique constituée de trois batteurs et trois contrebassistes, elle permet davantage à ceux-ci de jouer autour du rythme que de décupler la force de frappe de l’orchestre.
Émule de Paal Nilssen-Love et de son Big Unit, le leader Gard Nilssen est lui aussi batteur, notamment au sein d’un autre grand ensemble, le Trondheim Jazz Orchestra, mais aussi du groupe jazz-rock Bushman’s Revenge. Avec ce Supersonic Orchestra, il passe au blender autant Count Basie et le projet Africa/Brass de Coltrane que Sun Ra, en ajoutant même dans la dernière pièce une bonne dose d’afro-beat. J’ai beau ne pas connaître le norvégien, il suffit de jeter un œil au titre de celle-ci pour y voir le prénom de celui qu’on surnommait The Black President. L’apothéose des dernières minutes n’a rien à envier à la salve finale des feux d’artifice.