Le compositeur islandais Johann Johanssonn s’est largement fait connaître pour ses trames sonores de films, en particulier The Theory of Everything sur la vie de Stephen Hawking, et deux chefs-d’œuvre de Denis Villeneuve : Sicario et Arrival. Cela dit, avant de mourir prématurément en 2018 à l’âge de 48 ans, il avait amorcé une exploration de la musique de concert.
A Prayer to the Dynamo a une origine canadienne car l’œuvre en trois mouvements est issue d’une commande de l’Orchestre symphonique de Winnipeg, octroyée à l’occasion du New Music Festival de 2012 (un festival qui rend le Montréalais en moi très envieux).
Il s’agit de l’œuvre classique la plus ambitieuse du compositeur, réclamant un grand orchestre ainsi que des échantillonnages sonores. Johannsson s’est inspiré de la centrale hydroélectrique désactivée de Ellidaar, près de Reykjavik, mariant sa fascination pour la technologie avec son talent de compositeur et son intérêt pour les sons concrets, ici ceux de l’espace industriel abandonné, ajoutés à la partition orchestrale.
Il en résulte une trame ample, riche et opulente, où une pulsation lente, vibrante dans les basses profondes, est accompagnée de thèmes grandioses joués aux cuivres. Le résultat est impérialement séduisant, rappelant par endroits la force tranquille mais irrémédiable, appuyée d’une trame néo-romantique, du Cantus Arcticus de Rautavaaraa ou même de la Symphony of Sorrowful Songs de Gorecki. Un hommage à un vestige de la modernité industrielle comme s’il s’agissait d’une cathédrale.
Le programme est complété par deux suites tirées des trames sonores de Johannsson, Sicario et The Theory of Everything. Le premier mouvement de Sicario (Target) témoigne des affinités percussives et expressionnistes de Johannsson avec des accords lourds et puissants, parsemés de jaillissements menaçants aux cordes. Le deuxième (Desert Music) est résolument romantique avec son poignant solo de violoncelle rendant bien l’aspect désolé du paysage mis en scène, alors que le troisième mouvement (Melancholia) fait exception avec son écriture pour guitare électrique solo lente et mélancolique, formée d’arpèges pointés.
The Theory of Everything est très différente : la musique se fait plus solaire et enjouée, bien que l’ombre d’une indéfinissable nostalgie plane constamment. Plus allante aussi, son orchestration légère et finement détaillée fera penser (et plaira) à ceux et celles qui aiment déjà les musiques de films d’Alexandre Desplat ou Thomas Newman.
Les trois pièces sont des premières mondiales et viennent étoffer la représentation que l’on pourra se faire de ce compositeur qui n’en était qu’à l’aube d’une carrière très prometteuse. On devra en rester là, mais c’est déjà appréciable.