Imaginez-vous en 1975 et que vous êtes en voyage d’affaires en Éthiopie. Vous logez à l’hôtel Hilton d’Addis-Abeba et vous décidez d’aller prendre un verre en appréciant les divertissements offerts par l’établissement. Vous commandez un whisky, balayez la salle du regard, mais votre attention est captivée par l’orchestre qui s’exécute. De toute votre vie, vous n’avez rien entendu de tel. La section rythmique balance un groove irrésistiblement funky, les cuivres poussent des mélodies aux inflexions orientalisantes et l’organiste improvise des solos aux sonorités extra-terrestres. Votre voisin qui est éthiopien vous révèle que ce dernier se nomme Hailu Mergia et qu’il est le leader du groupe qui lui, s’appelle le Walias Band. Entre deux morceaux, vous continuez la conversation et vous apprenez que cet orchestre qui est le house-band des lieux vient de publier son deuxième album intitulé Tezeta sur des cassettes fabriquées en Grèce. Vous vous promettez d’en acheter une. Débordant d’enthousiasme, votre voisin vous révèle qu’à son humble avis, ce qui fait le succès du Walias Band de maestro Mergia, c’est son adresse à revêtir de nouveaux habits jazzy et modernes les airs traditionnels éthiopiens qui ont bercé son enfance. Derrière son micro, Hailu Mergia prend la parole pour présenter la prochaine pièce qui a pour titre Nefas New Zemedie. Vous n’avez aucune idée de ce que ces mots signifient, mais votre esprit se met à planer en entendant les notes issues du clavier astral de Mergia et le solo velouté de son saxophoniste. Après avoir chaudement applaudi les musiciens, vous vous levez afin d’aller commander un autre whisky et vous procurer une cassette de Tezeta en vous demandant si, un jour, le public occidental aura le bonheur de pouvoir entendre cet enregistrement que vous chérissez déjà.
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