L’heure est grave : le règne du président de la République du Bas-Canada, Robert Nelson, est mis en péril par un personnage mystérieux se nommant Capitaine Canada. Leçon d’histoire boiteuse ? Eh non ! nouvelle immersion dans l’univers déjanté du post-rigodon d’Alaclair Ensemble. Cette fois, le polyvalent Maybe Watson, qui a confirmé son savoir-faire sur son album solo Enter the Dance, une ode au rap old-school des années 90 paru en 2019, fait équipe avec le virtuose du beatmaking Vlooper. Ce dernier, qui change aussi d’identité le temps de cet opus, réalise un tour de force en pigeant directement dans la cour californienne de Madlib et de ses contemporains. Jumelées à la voix constamment trafiquée du protagoniste, ces productions ingénieuses offrent un vent de fraîcheur attendu sur la scène du rap keb. Le ton léger et les lignes désopilantes du Capitaine Canada nous décrochent maints sourires pendant la demi-heure d’écoute de cet album éponyme. Les gars d’Alaclair confirment à chaque projet, en solo ou collectif, qu’ils sont imbattables dans leur champ d’expertise : ne pas se prendre au sérieux de façon professionnelle. Sur Capitaine(s), le Capitaine Canada présente d’ailleurs « le emcee le plus irrévérencieux de la ville de Québec », un dénommé Clakmerde, chez qui on reconnaît le flow et le style d’Eman, vétéran du rap keb et collègue chez Alaclair. On assiste même à une première dans la pittoresque Poussin Chat, alors que Capitaine Canada invite nul autre que son alter-ego Maybe Watson à collaborer. Cet album-concept fourmille de références et de clins d’œil, sans que cela alourdisse pour autant le produit final. Si la position de Robert Nelson peut sembler chancelante dans le microcosme bas-canadien, celle d’Alaclair Ensemble est plus solide que jamais.
