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Wesli Louissaint n’a pas besoin d’introduction. Après plusieurs prix prestigieux depuis la fin des années 2000, le chanteur-guitariste enchaîne sans cesse les succès. Le producteur de multiples succès de type « afrobeat »peut compter sur un prix Juno et un Félix, en plus d’une multitude d’autres accolades dans le monde de la francophonie. L’artiste montréalo-haïtien travaille d’arrache-pied depuis plus de dix ans, pour célébrer l’énorme diversité des rythmes africains. Continuant sur sa lancée, il lance Tradisyon ces jours-ci,début juillet 2022. L’album, publié sur l’étiquette Cumbancha, est une lettre d’amour à la vaste culture haïtienne qui a bercé l’artiste depuis son enfance. Dix-neuf chansons permettent à l’auditeur de s’immerger dans le monde fantastique des rythmes vaudous et roots de Wesli. Un grand album mérite évidemment une grande célébration : celle-ci se fera au festival Nuits d’Afriquele mardi 19 juillet. Dans le feu de l’action, à la Place des Festivals, on pourra apprécier pleinement la profondeur et la diversité si importante pour cet ambassadeur de la culture haïtienne.
Dans l’atelier de Wesli, la pluie et le mauvais temps semblent des idées inexistantes. Avec un bonheur contagieux, il reçoit PAN M 360 pour jaser festivals, musique et culture.
PAN M 360 : Peux-tu nous résumer le parcours qui t’a amené vers Nuits d’Afrique?
WESLI : Ma carrière a été propulsée autour de 2009-2010. Malgré les hauts et les bas, je me suis fait une place sur la scène nationale. On pourrait même dire sur la scène internationale. Mais, avant ce rayonnement, je collaborais déjà avec plusieurs groupes musicaux. J’ai été réalisateur, arrangeur, guitariste et tant d’autres choses. En 2006, j’ai fondé mon propre label et collaboré avec une multitude d’artistes de partout en Amérique. Cette période dans l’arrière-plande l’industrie montréalaise m’a vraiment formé. En apprenant de multiples expériences, j’ai ramassé tout le bagage qu’il me fallait pour arriver où je suis aujourd’hui.
PAN M 360 : Tu te prépares donc à une deuxième apparition à Nuits d’Afrique… Excité?
WESLI : Oui! C’est ma deuxième visite comme nom connu… mais c’est la troisième fois que j’y participe. Nuits d’Afrique, c’est là où je me sens le plus authentique. Je peux à la fois être membre de la grande communauté québécoise, mais aussi me rapprocher de l’autre nation qui m’a vu grandir. En étant àce festival, je sens que je peux faire un pas de plus pour la communauté haïtienne. C’est valorisant de faire avancer cette cause. Cet évènement me donne toujours l’impression d’être chez moi et d’avoir ma place dans le monde.
C’est assez excitant de revenir dans le monde des festivals. Avec le déconfinement, ce sera mon deuxième, car il y a quelques jours j’étais au Festival de jazz. Mais depuis la sortie de Tradisyon, ce sera ma première apparition en public et à grande échelle. Si on veut comparer les deux, le Festival de jazz est un des plus grands évènements de la culture québécoise. C’est un moment rassembleur qui nous donne vraiment un aperçu impressionnant de la musique qu’on peut écouter à Montréal. Même si j’aime beaucoup ce dernier, il reste moins personnel que Nuits d’Afrique.
Là, je me sens mieux représenté. Comme si j’étais autant en Haïti qu’au Canada. C’est beaucoup plus motivant pour moi. C’est comme si tout le monde venait m’écouter jouer chez moi, dans mon salon! Ça me donne envie de bien mieux me préparer et m’améliorer.
PAN M 360 : Donc, ressens-tu un peu de pression?
WESLI : Normalement non, je ne m’en mets jamais beaucoup. J’effectue mon travail depuis si longtemps que jouer de la musique devient une seconde nature. Je me sens calme et prêt à faire passer mon message. Cet art fait partie de ma vie, au point que c’en est devenu une facette inhérente et indiscutable.
PAN M 360 : Pour ce premier Nuits d’Afriquedéconfiné depuis le début de la pandémie, tu dois te préparer différemment?
WESLI : Oh absolument! Tous les évènements musicaux post-pandémie doivent être envisagés différemment! On voit comment les gens ont besoin de plus d’énergie. Cette période nous a enlevé tellement de joie de vivre. Avec mon spectacle, je veux apporter une certaine compensation. Si on a perdu plein d’énergie, je veux en redonner le plus possible! Je veux qu’à la fin, l’auditoire se rappelle les connexions qu’il a faites lors du spectacle. Avec des sons venant purement de mes racines, je vais travailler à présenter un show personnel et authentique qui rappelle d’où je viens.
Les artistes musicaux peuvent venir de cultures totalement disparates, mais ils sont tous unis par l’âme de la musique. C’est instinctif et dur à expliquer, mais bien présent. Si vous voulez, c’est un peu la capacité de savoir quand il est le temps de jouer plus fort et plus vite, ou d’avoir une performance plus calme. Avec la COVID, tous les musiciens remarquent que le monde a un besoin de musique qui bouge. Un besoin d’énergie et de mouvement. Je prépare donc pour une prestation qui va pallier ce manque, le tout avec une superbe son root haïtien.
PAN M 360 : Tu vas donc jouer beaucoup de ton nouvel album, Tradisyon. Pourquoi ce titre?
WESLI : Parce que ce nouveau projet est ancré dans les coutumes haïtiennes et africaines existant depuis la traversée des esclaves. Je voulais enraciner ces pratiques sous forme de chansons. À Nuits d’Afrique, on va en entendre de la tradition! En ce moment, je présume que le monde a besoin d’un peu d’authenticité. C’est exactement ce que je cherchais avec ce titre!
Dans tous les cas, c’est mon authenticité que je veux présenter le 19 juillet. C’est sûr que je vais peut-être faire une ou deux incursions dans mes autres projets. Il faut quand même que je donne un peu de nostalgie à ceux qui m’ont soutenu longtemps!
PAN M 360 : Combien de temps as-tu mis sur cet album? Que voulais-tu faire ressentir avec ce projet?
WESLI : Tradisyon, c’est un long projet de pandémie. C’est le fruit de plusieurs années de travail. Ce qui est sorti cet été, ce n’est d’ailleurs que la première partie. Il existe un deuxième volume que je vais sortir en septembre. En plus de parler de mes origines, ces deux offrandes sont une exploration de ce que j’ai vécu durant cette période. Tout ce que j’ai vécu, ressenti et observé, je l’ai mis là-dedans.
Mon album précédent, Rapadou Kreyol, est un peu la raison pour laquelle je me suis lancé dans cette aventure. Il s’agissait d’une exploration de beaucoup des rythmes africains qui sont, selon moi, un peu trop délaissés par la jeunesse haïtienne. Pendant que j’effectuais mes recherches, j’ai fait beaucoup de découvertes sur la richesse de ma culture. J’ai réalisé que j’avais besoin de plus qu’un album pour présenter toute la riche immensité au sein de la culture haïtienne. Je me suis dit : OK! Rapadou Kreyol est fini, mais maintenant, je dois entrer encore plus profondément dans l’authenticité de la culture haïtienne. Je voulais montrer la profondeur de cet univers né à l’arrivée des esclaves. C’est l’exploration de rythmes oubliés depuis des générations et aussi de rituels vaudous non répertoriés.
J’aime toujours dire que j’ai deux cœurs. L’un d’eux est voué au Canada; c’est la société qui m’a accueilli, hébergé et intégré. Si je n’étais pas ici, je n’aurais jamais eu la carrière que j’ai eue. Mais je n’oublie pas l’Haïti. J’ai passé tellement de temps là-bas. J’y vais au moins trois à quatre fois par an. Je suis encore énormément impliqué dans les affaires de ce pays. Tradisyon, c’est une célébration de ces deux cœurs.
PAN M 360 : Tu es généralement un artiste qui collabore beaucoup pour ses chansons. Pourtant, on ne trouve pas beaucoup d’artistes invités sur Tradisyon. Pourquoi?
WESLI : Eh bien, pour le premier volume, je voulais un produit qui était plus cruou authentique. Pour ça, il faut aller le chercher soi-même. C’est quelque chose qui devait être vécu par moi seul. Vu que l’album avait une touche plus personnelle, j’ai choisi de faire des hommages à la place de collaborations. Il y a de grands artistes haïtiens qui se sont éteints dernièrement. Je voulais rappeler à la jeunesse leur place au sein de notre culture. Il faut se rappeler Azor Rasin Mapou et Wawa Rasin Ganga. C’est des gens qui ont des carrières de plus de quarante ans. Ils ont enrichi les racines de notre culture grâce à leurs rythmes et à leurs chansons. Je devrais aussi mentionner l’hommage que j’ai fait à Éric Charles. C’est un des plus grands chanteurs de style « twoubadou ». Il a fait connaître ce genre à travers le monde.
PAN M 360 : Et est-ce que ce processus va changer pour le deuxième volume?
WESLI : Absolument, Tradisyon II, je vois ça comme l’arrivée à la ligne de la victoire! Il y aura beaucoup plus de collaborations et de featurings. Vous verrez tout ça en septembre! Je ne vais pas trop m’éterniser pour garder le mystère. Par contre, je peux dire que si le premier volet touche plus les racines de la musique haïtienne, le deuxième ira chercher dans un style plus moderne.
PAN M 360 : Et après ce deuxième album, y a-t-il des projets de vacances?
WESLI : Non, pas vraiment. Je suis déjà en train de préparer plusieurs spectacles et tournées partout en Amérique et en Europe. Je veux partager ma musique avec le reste du monde. En attendant, le Québec pourra avoir la primeur de Tradisyon pour un petit moment. Je ne suis pas le seul musicien qui dira ça. Nous vivons de la reconnaissance et du travail. Quand on produit une œuvre, on se sent accompli et valorisé par la société. Dans des moments occupés, on ne ressent pas autant la fatigue. Je n’ai pas besoin d’un prix ou d’argent. J’ai besoin d’un instrument et d’un public. Les connexions qui sont faites par la musique, c’est ce qui importe.
Wesli se produira sur la scène TD – Radio-Canada le mardi 19 juillet à 20 h. GRATUIT!