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The Burning Hell est l’un des projets folk et rock indés les plus singuliers au Canada. Ses membres sont à l’œuvre depuis plus de dix ans, en s’efforçant constamment de poser des images pleines d’esprit sur une trame sonore conviviale. Ces créateurs ont toujours fait de la musique pour eux-mêmes, trempant leurs orteils dans presque tous les genres, mais sans jamais s’arrêter. En fait, chaque album des Burning Hell est très différent du précédent.
Cette notion se vérifie avec leur dernier effort, Garbage Island, un album conceptuel quelque peu inspiré par le vortex de déchets qui vogue dans nos océans. Bien que Garbage Island aborde des préoccupations environnementales très réelles, ses créateurs y imaginent ce à quoi pourrait ressembler l’avenir, à long terme, pour les oiseaux et les humains.
Coincé entre deux provinces à cause de la pandémie, le groupe a eu beaucoup de temps pour enregistrer, mixer et produire lui-même Garbage Island, affinant ainsi son esthétique DIY et son style artistique.
Mathias Kom, fondateur et multi-instrumentiste de The Burning Hell, nous cause ici du concept de Garbage Island, de la nécessité de ne pas se prendre trop au sérieux, ainsi que de la préférence du groupe pour les récits fictifs, plutôt que les histoires personnelles.
PAN M 360 : The Burning Hell a toujours été un groupe qui fait tout lui-même, et Garbage Island est sans doute votre projet le pus autonome à ce jour. Vous avez enregistré, produit, conçu et mixé l’album vous-mêmes. Était-ce par nécessité à cause de la pandémie, ou était-ce prévu comme ça?
Mathias Kom : C’était, en partie, par nécessité. Nous étions coincés dans trois provinces différentes pendant la majeure partie de la première année de la pandémie; nous savions qu’il nous importait d’être créatifs si nous voulions faire un disque ensemble. En même temps, cela faisait un moment que nous nous dirigions dans cette direction. Nous avons tous différents degrés d’expérience en enregistrement et en mixage. Or, je crois surtout que nous aimons tous prendre notre temps puis échanger des idées, sans la pression des échéanciers de studios.
PAN M 360 : Il y a ce dialogue dans Fuck the Government, I Love You, l’une de vos chansons parues vers 2014, qui m’a vraiment marqué dès que je l’ai entendu : « Je t’ai dit que j’étais dans un groupe – Je t’ai demandé comment il s’appelait – J’ai répondu The Burning Hell – J’ai dit que je n’avais jamais entendu parler de toi – Je t’ai répondu que c’était probablement mieux comme ça ». Après avoir entendu ça, je me suis dit : « Vraiment, on peut tout faire avec la musique et ne pas se prendre au sérieux. » Donc, avec cette entrée en matière, vous prenez-vous au sérieux en tant que groupe indé?
Mathias Kom : C’est une question compliquée ! Je pense que j’ai toujours pris ce que je fais au sérieux. Mais en même temps, j’essaie de ne pas me prendre trop au sérieux, dans la mesure du possible. Il est primordial de garder notre sens de l’humour et de prendre du recul sur tout, surtout en matière de musique.
PAN M 360 : À propos du clip de la chanson Nigel the Gannet, était-ce vraiment la première fois que votre collègue Ariel (NDLR : Sharratt) créait une vidéo d’animation? Je suis absolument estomaqué!
Mathias Kom : Oui, elle a passé des mois là-dessus, je pense qu’elle a trouvé sa nouvelle passion!
PAN M 360 : Trouvez-vous qu’il est plus facile d’écrire ces histoires fantastiques, avec des personnages et des noms inventés, que d’écrire des récits plus personnels?
Mathias Kom : Je ne suis pas très doué pour écrire des chansons personnelles, même si nous avons créé un album entier – Flux Capacitor – de chansons plus ou moins autobiographiques. Néanmoins, je trouve toujours ça plus amusant de créer de nouveaux mondes, dans les chansons, que de puiser du matériel dans mon propre vécu.
PAN M 360 : Musicalement et instrumentalement, chaque chanson est si différente sur cet album. N’y avait-il pas de règles pour composer Garbage Island? Comme trouver un son sympathique et l’exploiter?
Mathias Kom : Garbage Island est issu de nos différentes influences, plus que n’importe lequel de nos albums. C’est ce qui explique, selon moi, sa diversité de sons et de genres. Nous n’avons pas décidé que telle ou telle chanson devait suivre un certain style. Compte tenu de la manière dont nous avons réalisé l’album, c’est-à-dire en nous expédiant des portions de chansons d’une province à une autre, tout ça a évolué de manière naturelle. L’énorme quantité de temps dont nous disposions nous a également permis d’essayer toutes les idées qui nous venaient, y compris la conception d’un harmonica de verre et d’un dulcimer bricolé, expressément pour l’album.
PAN M 360 : Je n’ai pas besoin de vous le rappeler, mais le monde se porte très mal d’un point de vue environnemental. Le thème de Garbage Island vient-il de là?
Mathias Kom : Tout à fait. Garbage Island désigne le vortex de déchets de l’océan Pacifique, l’un des nombreux vortex du genre qui tourbillonnent dans les océans. Mais l’album ne traite pas tant des préoccupations environnementales contemporaines que de ce à quoi pourrait ressembler l’avenir, à long terme, longtemps après que nous ayons définitivement détruit la planète. C’est sombre, mais cela se termine sur une note d’espoir.
PAN M 360 : Oui. Nous avons une véritable île d’ordures flottant quelque part dans le Pacifique, qui grandit chaque jour. Je suis sûr que les oiseaux s’y posent tout le temps, mais dans l’album, ils règnent en maîtres.
Mathias Kom : Le vortex d’ordures du Pacifique – et les phénomènes similaires dans d’autres parties du monde – prend constamment de l’ampleur. Or, dans l’univers de l’album, j’ai imaginé qu’il avait fini par se figer en une masse terrestre solide, ou du moins suffisamment solide pour que certaines créatures y élisent domicile. Beaucoup d’oiseaux dans le monde sont en péril, à cause des changements climatiques, de la perte de leurs habitats et d’autres formes de catastrophes environnementales. Mais en même temps, j’ai le sentiment qu’après la fin du monde, il y aura une poignée de survivants à plumes.
PAN M 360 : Quelle est l’importance du contexte, dans une chanson de Burning Hell ? Pensez-vous que les fans suivent les histoires ou qu’elles ne sont pour eux que des morceaux plaisants de rock alterno ou indé, excentriques et surréalistes? Et est-ce que cela compte vraiment pour vous, comme créateurs de chansons?
Mathias Kom : C’est une excellente question. Je pense que lorsqu’on écrit et qu’on lance une chanson, il faut en quelque sorte la laisser aller, et reconnaître que les gens vont s’y engager de la manière qu’ils veulent, ou pas du tout, et qu’on n’y peut rien. En concert, il m’arrive de présenter une chanson pour lui donner un contexte, mais en général, je la laisse se débrouiller toute seule. Certains fans aiment les récits denses; ça me réjouit, mais si les gens aiment quelque chose que j’ai fait, ça suffit à me rendre heureux, même s’ils ne saisissent rien des paroles.
PAN M 360 : Vous êtes devenus de faux ornithologues en réalisant ce livre d’accompagnement, « The Illustrated Field Guide to Birds of Garbage Island ». Comment était cette expérience? Cela a dû être très amusant.
Mathias Kom : Je me suis mis à l’ornithologie juste avant la pandémie, et le fait d’être coincé sur l’Île-du-Prince-Édouard pendant deux ans m’a permis de m’y plonger plus profondément. Le livre a émergé de cela, en quelque sorte. Je me suis beaucoup amusé à imaginer à quoi pourrait ressembler un guide ornithologique post-apocalyptique. C’était, en partie, une excuse pour collaborer avec certains de mes illustrateurs préférés. J’ai donné à tout le monde la même consigne : créer un oiseau réel ou imaginaire qui pourrait vivre sur l’Île aux ordures. Et j’ai eu beaucoup de plaisir à créer les récits qui accompagnaient les illustrations.
PAN M 360 : Je ne vous ai jamais vu en concert, alors avec cet album, y a-t-il une sorte d’imagerie associée à la performance sur scène? Des projections, des costumes? Ou est-ce que vous jouez essentiellement le rôle de narrateurs?
Mathias Kom : Si nous avions un jour le budget nécessaire pour le faire, je suis sûr que nous sauterions sur l’occasion d’avoir un spectacle élaboré avec des costumes, des décors, un éclairagiste itinérant et ainsi de suite. Mais pour cette tournée, nous n’aurons qu’une simple toile de fond faite de détritus, et nous ferons de notre mieux pour être de bons narrateurs.
The Burning Hell et Krista Muir à la salle URSA Mtl, le 23 septembre 2022. Achetez vos billets ICI!