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Avant son spectacle à la Sala Rossa dans le cadre du Taverne Tour, nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec l’autrice-compositrice-interprète Alexandra Levy, mieux connue sous le nom d’Ada Lea. Profondément ancrée dans la scène montréalaise et ses lieux emblématiques comme la Rockette et le Quai des Brumes, sa musique trouvait naturellement sa place dans ce festival.
Après what we say in private (2019) et one hand on the sterling wheel the other sewing a garden (2021), l’artiste a dévoilé en octobre l’EP notes, collection de morceaux restés en marge de son dernier album. Suite à une longue tournée en 2022, Ada Lea s’est recentrée sur l’écriture et la création de son troisième album, attendu cette année. Pour plonger dans la poésie de ses textes et la douceur de sa voix, rendez-vous à la Sala Rossa ce samedi 8 février pour une soirée indie/folk mettant également en vedette Charlotte Cornfield. D’ici-là, voici notre interview avec Ada Lea.
PAN M 360 : Dans ta chanson come on, baby! be a good girl for the camera, tirée de ton dernier EP notes, tu explores les difficultés de la vie en tournée, mais aussi les attentes imposées aux femmes. Selon toi, quel est aujourd’hui le plus grand défi d’être une femme dans l’industrie musicale ?
Ada Lea : C’est une bonne question. Bien sûr, je ne peux pas parler au nom de toutes les femmes, mais selon mon expérience, je trouve les déplacements physiquement et spirituellement épuisants. Prendre l’avion, conduire, changer de fuseau horaire… tout ça est très éprouvant pour mon corps. Conduire est aussi effrayant. On se sent pas toujours en sécurité, et quand il faut rouler plus de six heures par jour, les risques d’accident augmentent. Plus je vieillis, plus je prends conscience de notre fragilité. Les accidents arrivent. Ma grand-mère a été renversée et tuée par une voiture durant une journée comme les autres ! Et si quelque chose comme ça se produisait en tournée ? Et si j’étais responsable de cette tournée, que j’emmenais mes amis avec moi et que nous mourions tous ? Pour quelques concerts ? Pourquoi ?
Évidemment, c’est une situation quelque peu exagérée, mais au final, partir en tournée exige énormément de travail physique, pour très peu de récompenses et sans véritable sécurité. Les seules récompenses sont les liens humains. Alors si mon but est de partager des moments avec mes amis, pourquoi ne pas simplement aller voir un film ensemble au coin de la rue ? Bien sûr, jouer devant un public, partager un espace et vivre quelque chose ensemble est une expérience exaltante, mais je commence à me demander : à quel prix ?
PAN M 360 : J’ai adoré ta chanson serait-il… ? et je me demandais si ton processus d’écriture diffère entre une chanson en français et une en anglais. Aimes-tu autant écrire dans les deux langues, ou as-tu une préférence ?
Ada Lea : J’adore écrire en français. J’ai coécrit cette chanson avec Liberté-Anne Lymberiou. Elle parle plusieurs langues couramment : anglais, français, grec, espagnol, et une autre qui m’échappe. Elle parle même un peu italien, ce qui est amusant puisque ma mère est italienne. Alors, on se lance dans des discussions absurdes entre nonna et yiayia en mélangeant le grec et l’italien – « Why you no call me no more? » et des choses comme ça. J’imagine l’une de nous nettoyant le trottoir avec un balai pendant que l’autre crie « Bonjour ! » depuis le balcon.
PAN M 360 : J’ai lu qu’un troisième album était prévu pour 2025. En quoi se distingue-t-il de tes précédents projets ?
Ada Lea : Il est plus pictural. Après 2022, j’ai pris une pause des concerts et je me suis retirée. J’avais besoin de me reconnecter à moi-même. Les arts visuels ont toujours occupé une place importante dans ma vie. Pour cet album, j’ai foncé. J’ai écrit des chansons qui, pour moi, ressemblaient à des peintures. Qui allaient au-delà de tout ce que j’imaginais pouvoir créer en écriture. J’ai eu l’impression que c’était un cadeau de l’univers, et heureusement, j’étais là pour le saisir.
PAN M 360 : Lorsque tu développes un nouveau projet, as-tu une routine d’écriture bien établie, ou laisses-tu plutôt place aux élans spontanés de créativité ?
Ada Lea : Moyra Davey dit qu’elle obtient une bonne photo pour cinq rouleaux de pellicule. Je pense que c’est pareil pour l’écriture de chansons et la peinture. J’essaie d’écrire et de peindre autant que possible physiquement. J’aimerais avoir une routine plus rigoureuse.
PAN M 360 : Quelles sont tes plus grandes inspirations musicales en ce moment ?
Ada Lea : Les autres auteurs-compositeurs qui partagent ma méthode. Chaque chanson est un cadeau.
PAN M 360 : Il y a quelques jours, tu as sorti une reprise de Out on the Weekend de Neil Young avec Alex Nicol. Qu’est-ce qui vous a poussé à collaborer ensemble pour cette chanson et comment cette idée de reprise est-elle née ?
Ada Lea : Alex m’a contactée pour me proposer de chanter une chanson ensemble. Je me suis dit que si on passait une journée en studio, autant essayer un classique de Neil Young. C’est l’une de mes préférées de Harvest.
PAN M 360 : Tu es aussi artiste visuelle. Comment parviens-tu à jongler entre ta musique et ta pratique artistique ?
Ada Lea : Si je pouvais, je ne ferais que de la musique et de la peinture toute la journée, tous les jours. C’est un tel plaisir. Il n’y a rien de comparable. Je rêve de mélanger les couleurs et de laisser mon pinceau glisser sur la toile.
Le plus difficile, c’est de jongler entre mes nombreux emplois, mes multiples casquettes. Travailler sur l’art, ça, c’est la partie facile.
PAN M 360 : À quoi peut-on s’attendre pour ton spectacle à la Sala Rossa ?
Ada Lea : Aucune idée. Je suis impatiente de jouer avec mes amis et collaborateurs de longue date, Tasy Hudson et Chris Hauer. Pour la première fois, Chrissy Lawson nous rejoindra. J’ai aussi hâte de voir Charlotte Cornfield. J’ai vécu avec elle à New York, et j’ai joué de la basse dans son groupe pendant quelques années, avant d’écrire mes propres chansons. J’ai beaucoup appris grâce à elle. Sa bassiste, Kate Palumbo, était une de mes idoles quand j’étudiais la musique au cégep.
PAN M 360 : Ressens-tu le trac avant un concert ? Et si oui, comment parviens-tu à le gérer ?
Ada Lea : Je tombe presque toujours malade avant un concert. Parfois c’est la covid, parfois une gastro, parfois la grippe ou une autre maladie. Une fois, j’ai eu une bronchite à cause d’une toux persistante, et j’ai dû passer une radiographie et prendre un inhalateur la veille d’une tournée. Ils pensaient que ma côte était cassée à force de tousser. J’ai tellement peur de tomber malade et de ne pas avoir l’énergie de jouer que j’épuise mon corps. Par exemple, j’ai de la fièvre en ce moment.
PAN M 360 : Que peut-on te souhaiter pour l’année à venir ?
Ada Lea : La tranquillité mondiale. Une bonne santé, de la nourriture, de la musique, de la peinture et de l’amour.